À seulement 34 ans, son élection à Aniche fait de Xavier Bartoszek le plus jeune maire du Douaisis. Celui qui ne partait pas favori au départ rêve désormais d'insuffler un vent de renouveau dans cette ville sinistrée du Bassin minier, qu'il aime profondément.
Élu avec 49,18% des voix, Xavier Bartoszek a la victoire modeste. "Ce n'est pas moi qui ai gagné, c'est le fruit du travail de toute une équipe !" Une équipe qu'il a constituée, pas à pas au cours de ces deux dernières années, composée de 35 habitant(e)s d'Aniche.
"Personne n'a été parachuté, raconte le maire fraîchement élu. Notre équipe est un échantillon de la commune, tous les âges - de 18 à 72 ans -, tous les quartiers sont représentés, toutes les sensibilités politiques. Des communistes, des socialistes, des Républicains, des personnes qui pensent ce qu'elles veulent. Notre seule condition, c'était : pas les extrêmes.""Nous, on était sans étiquette, c'est la sous-préfecture qui nous a étiquetés Divers gauche", précise Jessica Tanca, future première adjointe. Car à la tête de la liste Aniche, notre ville, il y a avant tout un binôme. Comme Xavier, Jessica était adjointe lors du mandat précédent, déléguée aux affaires scolaires. Cette conseillère indemnisation à Pôle Emploi de 40 ans est aujourd'hui sa plus fidèle alliée.
"Je l'ai suivi parce que j'ai confiance en lui, on a la même vision, les mêmes idées, la même façon de travailler. C'est quelqu'un de sincère, qui a la main sur le cœur. Il a un tel respect d'autrui... Il aime les gens." La phrase est lâchée, et reviendra souvent, dans la bouche de son entourage.C'est quelqu'un qui aime les gens.
Xavier est un gamin d'Aniche, il connaît tout le monde et tout le monde le connaît. "Il aime pouvoir aider, précise Élodie, sa jeune épouse. C'est difficile de se promener avec lui dans la rue sans se faire interpeller. L'autre jour, quelqu'un avait un problème sur le trottoir devant chez lui, il nous a arrêtés dans la rue, eh bien Xavier est allé voir sur place, puis il a sollicité lui-même les services techniques pour qu'ils fassent ce qu'il fallait."
En première ligne pendant la crise Covid
"Et pendant le confinement, ajoute-t-elle, je ne l'ai pas vu beaucoup non plus. Mais je l'ai toujours connu ambitieux. Et c'est comme ça que je l'aime." Animatrice en crèche, elle est restée à la maison quand lui a continué à travailler à l'hôpital de Somain. Infirmier hygiéniste, Xavier a même été en première ligne pendant la période Covid. Il s'est porté volontaire pour rejoindre l'unité fraîchement créée de SSR Covid, soins de suite et de réadaptation. En travaillant parfois de 6h à 21h30, et un week-end sur deux.Pour la directrice des soins de l'hôpital de Somain, Xavier "fait preuve d'une grande maturité, d'un sens profond de l'intérêt pour le service public. Il a une très belle éducation, et c'est suffisamment rare pour être souligné." Peggy Deneef a Xavier sous sa responsabilité depuis quatre ans.
Elle l'a vu postuler comme responsable de la coordination du plateau des consultations spécialisées. "Il a immédiatement rempli sa mission, raconte-t-elle. C'est quelqu'un de très respectueux de sa fonction, des personnes avec lesquelles il travaille et bien sûr des patients."
"Il a une très bonne maîtrise de ses émotions, ne s'emporte jamais, ajoute-t-elle. Il n'intervient pas à chaud et gère le consensus. Il sait se positionner quand il le faut et taper du poing sur la table, mais avant, il aura utilisé toutes les stratégies de management. Il sait écouter et entendre."
Une campagne mouvementée
Humble, le jeune homme ne cherche pas à se mettre en valeur. Pourtant, de l'avis de tous, Xavier Bartoszek est quelqu'un sur qui on peut compter. Tous ? Pas tout à fait. Marc Hemez, maire sortant, a eu le sentiment d'être trahi. Et il l'a fait savoir, par voie de presse et sur les réseaux sociaux."On a fait une campagne propre, se targue Xavier Bartoszek. On n'a pas répondu à nos opposants. De toute façon, Marc Hemez, je le respecte et je le remercie, car c'est lui qui m'a donné ma chance. Il m'avait repéré parce que quand j'avais une vingtaine d'années, je m'intéressais déjà à ma ville et j'assistais à tous les conseils municipaux."
"Entre les deux tours, se remémore Jessica Tanca, on s'est vraiment fait secouer, c'était difficile pour Xavier. On a été diffamés, calomniés, attaqués personnellement... On s'est acharnés sur Xavier, notamment notre opposant, Pascal Cléry (RN). Et puis l'ancien maire a ouvertement critiqué l'équipe sur le site de la Ville."
"J'ai voulu toucher toute la population, tous les âges, toutes les sensibilités culturelles", affirme-t-il. Et de lister toutes ses actions : "J'ai soutenu le Centre de mémoire de la Verrerie d'en haut, relancé le festival de courts-métrages de l'office municipal de la culture, j'ai organisé des expositions avec l'Association anichoise des amis des arts (4A)..."
"On a organisé des sorties culturelles dans la région, à Lille, Arras, au Louvre Lens, à Notre-Dame de Lorette. J'ai soutenu l'association d'histoire locale, j'ai instauré la gratuité pour les Anichois à la médiathèque..."
Xavier Bartoszek, en tant que conseiller communautaire, a aussi contribué à mettre en réseau toutes les médiathèques de la Communauté de communes Cœur d'Ostrevent. Son président, Frédéric Delannoy, qui vient d'être réélu à l'unanimité pour un troisième mandat de maire (PS) à Hornaing, le sait bien : "Xavier est un battant."Il réfléchit vite, il comprend vite, il agit vite.
"Je l'ai vu arriver l'interco, il n'avait pas trente ans. Il m'a demandé un rendez-vous, ce qui est rare, pour discuter de sa vision du territoire, et du développement en matière culturelle. Il m'a tout de suite marqué, parce qu'il a une tête bien faite. Il réfléchit vite, il comprend vite, il agit vite. Il mérite ce qui lui arrive, il est arrivé premier dans tous les bureaux de vote ! Il a gagné envers et contre tous car dans le milieu politique, personne à part moi n'a cru en lui."
Xavier Bartoszek n'est pas du genre à se laisser abattre. Toute la campagne, il n'a rien lâché, à l'image de son grand-père paternel, Stanislas, arrivé de Pologne à 12 ans pour travailler dans les mines et qui, enseveli lors d'un éboulement, n'a jamais cessé de taper sur les tuyaux d'air comprimé pour manifester sa présence aux secours. De lui, Xavier a cette pugnacité, cette rage d'avancer.
L'amour du Bassin minier
Né à Somain dans l'hôpital où il travaille aujourd'hui, il a grandi dans une cité minière. "Mes parents travaillaient tous les deux alors mes grands-parents s'occupaient de moi. Je passais la semaine chez eux, à Somain. J'ai baigné dans l'ambiance de la mine. Les anecdotes du fond, je les connais par cœur. C'est encore ce que j'aime, aujourd'hui. Le dimanche après la messe, en général, je leur rends visite."Catholique pratiquant, Xavier a été enfant de chœur avant sa communion, à l'église Saint-Martin, l'église qu'il fréquente encore tous les dimanches matins. Seul. "Je l'accompagne en politique, s'amuse Élodie, sa femme, mais pas en religion ! Ça, c'est son moment à lui." "J'ai des semaines surchargées, confirme Xavier. Prendre une heure par semaine c'est vital, pour me retrouver, prier pour les Anichois, prier pour avoir la force d'améliorer leur quotidien."
"Il a même fait Aniche-Lourdes à vélo pour les JMJ !", se souvient sa mère, Élisabeth Bartoszek. Quant à la carrière politique de son fils, elle ne sait pas où elle le mènera : "Il n'en parle jamais ! Quand il a été nommé à la Culture, on ne l'avait pas vu venir !"
"Mais finalement, je ne suis pas étonnée... Il aime tellement les Anichois, et il est tellement mature. À l'école, il était toujours premier, et il parlait déjà comme un adulte ! C'est quelqu'un de très apprécié, toujours dispo et à l'écoute. Sérieux, curieux, il s'intéresse à tout. Il est courageux, dynamique. Il a beaucoup d'empathie pour les autres, il est toujours prêt à rendre service."
Les yeux de cette mère comblée brillent d'admiration. Mais n'a-t-il donc pas de défaut, cet homme-là ? "Ah si, quand même, intervient Daniel, son père. Quand il a quelque chose en tête, il l'a bien en tête. Il va jusqu'au bout de la chose, s'il pense que c'est une belle chose."
Jessica Tanca, elle, dirait "perfectionniste". "Il aime que tout soit tiré à quatre épingles, parfait, et ça peut être épuisant pour ceux qui travaillent avec lui. C'est vrai, ce n'est pas vraiment un défaut, mais c'est le seul que j'ai trouvé !", rit-elle. "On n'est pas toujours d'accord, mais on discute. S'il a tort, il saura dire qu'il a tort. S'il a raison, il se battra pour le prouver. S'il se trompe, il saura s'excuser."
Sa famille, ses amis, c'est son soutien ; le Bassin minier, son port d'attache. Chez les Bartoszek comme chez les Szczurek, du côté de sa mère, il ne viendrait à personne l'idée d'aller vivre ailleurs. Même Stéphanie, la grande sœur de Xavier, qui travaille à Villeneuve-d'Ascq, près de Lille, est installée à Fenain.
Un programme solide
"J'aime ma ville, tout simplement, confie Xavier. Mon seul objectif, c'est de faire revivre ma ville, de la redynamiser. Avant, on avait de l'industrie, des mines, des verreries. Tout a fermé petit à petit. Il n'y a pas eu de sursaut de la municipalité, dirigée à l'époque par Michel Meurdesoif (PC). Ils se sont laissé couler. Le chômage a augmenté d'un coup, la ville a périclité."
"Aujourd'hui le taux de chômage à Aniche avoisine les 30%, regrette-t-il. Il faut absolument faire quelque chose, créer du boulot." Au-delà de l'emploi, l'équipe a trois points prioritaires. Tout d'abord, reconstuire une piscine pour remplacer la piscine Tournesol construite en 1968 et désormais fermée.
"Il y a sept écoles à Aniche, les élèves sont obligés d'aller à Sin-le-Noble en bus, ça leur laisse moins d'une demi-heure dans le bassin. La communauté de communes a repris la compétence du Sport. En reconstruisant une piscine à Aniche, ça permettra aux communes alentour d'en profiter. Auberchicourt, Monchecourt, Masny, Écaillon..."
Redynamiser le centre-ville
Deuxième axe, le centre-ville. "Aujourd'hui, déplore Xavier Bartoszek, on a une grande place vide, traversée au milieu par un bus, avec des pots de fleurs tout autour. Le cœur ne bat plus. Notre objectif est de redynamiser le centre, en remettant le marché sur la place, des concerts les week-ends d'été."Enfin, la sécurité : "On veut créer une police municipale, en complément de la police nationale dont le territoire est trop large pour être suffisamment réactive quand on a besoin d'elle à Aniche." L'équipe souhaite aussi créer un conseil municipal des jeunes, des animations intergénérationnelles, relancer l'activité du cinéma - L'Idéal Jacques Tati, connu pour être le plus ancien cinéma ouvrier du monde -, peut-être créer une deuxième salle.
Pour s'atteler au mieux à ces lourdes tâches, Xavier Bartoszek a décidé de mettre de côté sa carrière à l'hôpital, et de se consacrer à temps plein à son premier mandat. Remplacera-t-il également Marc Hemez au poste de vice-président de la Communauté de communes ? Il est trop tôt pour le dire.
Et si Élodie, sa femme, ne serait "pas étonnée de le voir aller plus loin en politique", pour l'heure, Xavier vit au jour le jour. Première étape, ce samedi 4 juillet à 10 heures, la mise en place du conseil municipal, qui sera retransmise en direct sur Facebook. Et dès lundi, "il va falloir se retrousser les manches."