Ce 16 juin, une policière de 40 ans s'est tiré une balle dans la poitrine au commissariat de Dunkerque. Elle est actuellement hospitalisée à Lille. Elle avait, il y a 15 jours, dénoncé un harcèlement moral. Une enquête administrative a été ouverte. Plusieurs collègues ont été entendus la semaine dernière.
"Je vous ai alertés car la souffrance au travail à la csp (circonscription de sécurité publique) de Dunkerque est quotidienne et qu'il est plus facile de dire qu'un suicide est lié à la vie privée qu'à la vie professionnelle. Vous savez la problématique des suicides de policiers est aussi de savoir si c'est lié à un management défiant ou toxique", explique Philippe Dupré, le délégué syndical Unité SGP police, basé à Lille. "Or là, on peut vraiment se poser la question, puisqu'il y a 15 jours, elle avait alerté le directeur départemental d'une souffrance au travail liée au harcèlement moral par sa hiérarchie".
Prise au sérieux, cette alerte a provoqué l'ouverture d'une enquête administrative et "plusieurs collègues ont ensuite été entendus comme victimes, jeudi 9 juin".
"C'est tragique... Elle est passée à l'acte dans une douche ce matin à 7h30, au commissariat. Heureusement, les collègues lui ont fait un point de compression pour stopper l'hémorragie sinon, je pense qu'elle serait décédée. Il y a une vraie souffrance au travail, l'ensemble des unités croule sous les dossiers. Les collègues rentrent le soir en se disant 'j'espère qu'il ne va rien se passer'. Ils croulent sous les dossiers et ne peuvent souvent pas enquêter. Du coup épuisement et souffrance. Et je n'exagère pas", explique le représentant syndical avant de poursuivre : "ce qui est incompréhensible c'est que la hiérarchie ne lui ait témoigné aucun soutien à ce moment là."
Pour Unité SGP police, c'est l'absence de libération de la parole, l'absence de protection des agents et le management toxique qui pèsent au quotidien sur nos collègues"
Là, aujourd'hui, nous sommes des héros car on a sauvé notre collègue mais dans une semaine, on retrouve notre situation de gueux corvéables à merci
Un enquêteur du commissariat de Dunkerque
Sous couvert d'anonymat un policier de la sûreté urbaine de Dunkerque explique : "On a 100 dossiers d'atteinte aux personnes chacun à gérer. Dans les années 1990, il y avait 21 à 22 hommes par brigade et il y avait 5 brigades. Là on est 4 brigades de 13. Comme il manque du monde à tous les étages, on nous appelle régulièrement pour le service de quart, pour les migrants, pour les gardes à vue parce que la BAC a arrêté trois cambrioleurs. Du coup, difficile de faire avancer les dossiers déjà en nombre. Là aujourd'hui, nous sommes des héros car on a sauvé notre collègue mais dans une semaine, on retrouve notre situation de gueux corvéables à merci", explique-t-il désabusé.
Un rassemblement de solidarité à la policière qui a tenté de mettre fin à ses jours se fera devant le commissariat de Dunkerque ce vendredi 17 juin, à midi.