"Ils ont piétiné la classe ouvrière" : les salariés d'ArcelorMittal en grève depuis une semaine

Depuis le 4 décembre, les salariés de la société de sidérurgie ArcelorMittal de Dunkerque et de Mardyck sont en grève. Une mobilisation historique pour dénoncer des conditions de travail et le "manque de communication de la direction".

"On n'a pas vécu de si gros mouvements depuis mai 68." Une grève historique est en train de gronder dans les rangs des salariés d'ArcelorMittal, société de sidérurgie basée dans le Nord à Dunkerque et Mardyck.

Depuis le lundi 4 décembre 2023, "une grande partie des presque 4 000 ouvriers" travaillant dans les deux usines ont pris part au mouvement social selon la CGT. En début d'après-midi ce mardi 12 décembre 2024, les ressources humaines de Dunkerque indiquaient de 6,66 % des effectifs de son site avait pris part au mouvement.

Un climat "explosif"

Dans le train direction Paris, Gaëtan Lecocq, technicien logistique chez ArcelorMittal et secrétaire général CGT de l'usine de Dunkerque, se rend aux négociations prévues avec la direction. Même si selon lui, "le dialogue est de toute façon rompu."

À l'origine de cette grève : les négociations annuelles obligatoires (NAO) passées avec la direction régionale le 4 décembre. "Nous demandions une augmentation de 300 euros bruts, mais la direction campe sur une hausse de 90 euros par salarié et par mois. Ce n'est pas suffisant", explique le technicien.

Nous demandions une augmentation de 300 euros bruts, mais la direction campe sur une hausse de 90 euros par salarié et par mois. Ce n'est pas suffisant.

Gaëtan Lecocq, secrétaire général CGT de l'usine de Dunkerque

Des NAO peu concluantes, négociées dans un climat "déjà explosif". Selon Gaëtan Lecocq, depuis déjà plusieurs années, les conditions de travail se dégradent avec "des installations pourries", dans lesquelles "la direction n'investit plus" et qui mettent en danger la sécurité des salariés. L'application d'une nouvelle convention collective en janvier 2024 est également dans le viseur des salariés.

"Faire passer un message"

La plupart des salariés des usines de Dunkerque et Mardyck étaient donc déjà en grève le 4 décembre, mais un évènement est venu réellement fédérer le mouvement et mettre définitivement le feu aux poudres.

Gaëtan Lecocq raconte : "Dans la nuit du 4 au 5 décembre la gendarmerie et la police sont entrées chez cinq salariés à 1 heure du matin, pour les forcer à retourner travailler, sous prétexte que leur poste était important pour la sécurité des installations, alors que ce n'est pas le cas."

Dans la nuit du 4 au 5 décembre la gendarmerie et la police sont entrées chez cinq salariés à 1 heure du matin, pour les forcer à retourner travailler.

Gaëtan Lecocq

Pour le représentant syndical, il s'agissait surtout de "faire passer un message", d'autant plus que les salariés visés seraient des sympathisants des syndicats de l'usine. Une affirmation que conteste Alexandre Delabre, directeur de la communication de l'usine de Dunkerque : "pour des raisons de sécurité, des effectifs minimums doivent être présents sur le site sans pour autant remettre en cause le droit de grève. Les salariés qui ont fait l'objet de réquisitions faisaient partie de ces effectifs et ont quitté leur poste. Ils savaient que leur présence était obligatoire."

Les salariés qui ont fait l'objet de réquisitions faisaient partie de ces effectifs et ont quitté leur poste. Il n'y avait aucune découverte de leur présence obligatoire.

Alexandre Delabre, directeur de la communication

Une chose est sûre, suite à cet évènement, les débrayages se sont étendus à des usines ArcelorMittal hors de la région et à de nouveaux salariés, qui se sont "mis en grève juste pour faire valoir ce droit bafoué par la direction".

Des signes avant-coureurs

Le ras-le-bol des salariés est tel que, même si les négociations prévues ce mardi midi s'avèrent finalement positives, les syndicats affirment que la colère ne pourra pas être apaisée. "Vous savez ce qu'il se dit parmi les salariés ? Que la direction est en train de tuer le secteur de la sidérurgie et qu'ils ont piétiné la classe ouvrière."

Vous savez ce qu'il se dit parmi les salariés ? Que la direction est en train de tuer le secteur de la sidérurgie et qu'ils ont piétiné la classe ouvrière.

Gaëtan Lecocq

Gaëtan Lecocq, descendant d'ouvriers chez ArcelorMittal depuis trois générations, en est certain : ils ont "atteint un point de non-retour." "Des services complets sont en grève, certains ne s'étaient jamais mobilisés... Même nos pompiers sont en grève !" Une situation extrême donc, que les syndicats avaient pourtant présagée et dont ils avaient averti les dirigeants deux mois auparavant.

En ce jour de négociations, une mobilisation devant l'usine de Dukerque a été annoncée. "Sachez que la CGT ne sera plus responsable de ce qu'il se passera à l'usine après 12 heures, à la fin des négociations", assène gravement le représentant syndical, présageant le pire. Du côté de la direction, une "volonté de continuer à dialoguer pour trouver un accord" perdure. "Il n'y a aucune position dure de la direction, qui fera sûrement un pas en avant pour les salariés", attestait Alexandre Delabre ce midi.

Un point d'étape dans les négociations

Vers 14h30, les premières informations commencent à tomber concernant la nouvelle phase de concertations. La direction ne change finalement "que très peu sa position" concernant les NAO selon la CGT, avec 3,7 % de hausse de salaire général et un talon de 90 euros. "C'est de la petite popote, le fond de change pas." Les salariés, qui bloquent l'entrée de l'usine de Dunkerque depuis ce midi, se disent "dépités" par ces premières annonces et souhaitent maintenir l'état de grève.

À Paris, une suspension de séance a été décidée pour marquer une pause dans les négociations qui durent depuis plusieurs heures.

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