Elections départementales 2021 : la droite sur sa lancée dans le Nord

La gauche aura sans doute du mal à reprendre le conseil départemental du Nord qu’elle avait perdu en 2015. La droite a 11 cantons d’avance, ce qui, malgré quelques querelles internes ici et là, lui donne une confortable avance. Et elle fait alliance avec LREM. Darmanin en guest-star.

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C’était mardi soir. Le 4 mai. Gérald Darmanin (LREM) annonçait sa candidature aux élections départementales dans le Nord, dans le deuxième canton de Tourcoing, sous les couleurs de la majorité sortante. Majorité clairement de droite. L’ancien maire de Tourcoing et ancien porte-parole de Nicolas Sarkozy sera en binôme avec Doriane Bécue, celle qui l’a remplacé à l’hôtel de ville. 

Enfin ! Enfin un peu de mouvement dans cette campagne sans grand suspense, qui tarde à démarrer, et qui, traditionnellement, n’attire pas les foules. On se dit même qu’avec un peu de chance, l’irruption du ministre-candidat va provoquer dans le Nord le débat passionné qui agite le sud à propos du rapprochement de LREM avec le président d’un conseil régional LR. 

Mais non ! Le patron local des Républicains émet une molle protestation. Et Christian Poiret, vice-président sortant, chef de file de la droite et candidat à la présidence du département, précise que Gérald Darmanin est "candidat Union Pour le Nord !" Ça change tout.

Droite modérée et pragmatique

Précision effectivement importante. L’Union Pour le Nord (UPN), c’est ce groupe majoritaire qui domine l’hémicycle. Un "club" composé de Républicains, de centristes et de divers-droite. Une droite "plurielle", modérée, pragmatique, sociale, plus portée sur le quotidien des habitants du Nord que sur la politique politicienne, peu sensible aux consignes des appareils, en bons termes globalement avec son opposition.

L’UPN est à l’image du président du conseil départemental, l’ancien sénateur UMP, Jean-René Lecerf, 70 ans, qui ne se représente pas, personnalité libre et indépendante, très consensuel, pour qui la candidature de Gérald Darmanin ne "pose aucun problème". On verra…

Cette UPN est donc composée de 52 élus, qui tiennent 26 cantons. La gauche, elle, ne tient que 15 cantons avec 30 élus. Voilà comment se partage le conseil départemental du Nord, à la veille de cette élection de juin 2021. Présenté comme ça, le scrutin ne semble pas des plus palpitants. On imagine mal la droite, qui dispose d’une large majorité, perdre une dizaine de cantons. 

"Rien n’est joué", tempère malgré tout Christian Poiret (DVD), qui sent bien que son pire ennemi sera le désintérêt des électeurs. Christian Poiret est le vice-président de l’assemblée sortante et chef de file de l’Union Pour le Nord, candidat à la succession de Jean-René Lecerf. 

On sait que l’abstention sera très élevée, reprend-t-il. Et donc… qui seront les électeurs qui iront voter ? Les nôtres ou ceux du camp d’en face ? Il n’y aura pas de triangulaires au second tour, puisqu’il faut 12,5% des inscrits pour se maintenir ; et il y aura forcément des deuxièmes tours puisqu’il faut 25% des inscrits pour être élu. La participation, c’est la colonne vertébrale de cette élection départementale.

"Le danger pour la majorité sortante, c’est quoi ?", se demande une conseillère départementale sortante UPN.

"C’est l’abstention, évidemment. C’est le RN. Ce sont les bisbilles internes liées à des incompatibilités de personnes qui pourrissent l’ambiance à l’intérieur d’un même canton. Et ce sont aussi ces candidats de La République En Marche qu’on nous impose. Gérald Darmanin à Tourcoing. Le député (conseiller départemental sortant) Paul Christophe à Dunkerque. Coline Craeye à Sin-le-Noble. La députée Charlotte Lecocq à Templeuve. Le député Vincent Ledoux à Tourcoing 1. On n’en n’a pas débattu. Notre dernière réunion de groupe, c’était mi-octobre pour élire Christian Poiret comme chef de file. Et après plus rien. On a subi. Jusqu’alors, nous prenions nos décisions de façon unanime. Je crains qu’avec l’arrivée chez nous de LREM, ce ne sera plus le cas. On fait entrer le loup dans la bergerie." 

Ces fameuses "bisbilles", elles ont lieu dans des cantons qui votent franchement à droite, et donc, même si elles ne font pas bon effet, ne présentent pas de réel danger politique. Dans le canton de Valenciennes-Saint-Saulve, Laurent Degallaix et Valérie Létard, le maire de Valenciennes et la vice-présidente du Sénat, ont sans ménagement demandé au binôme sortant UPN de leur laisser la place ! Ce qu’il a évidemment refusé. 

Dans le canton de Lambersart et celui de Templeuve, le binôme qui avait gagné les élections en 2015 s’est fâché et chacun part de son coté en 2021. Ailleurs, deux maires, souvent de générations différentes, sont en concurrence. "On n’est pas dans la division extrême, relativise Christian Poiret. Le problème des divergences, ça arrive dans tous les groupes. Ce sont les électeurs qui choisiront. L’UPN accordera son investiture au second tour."

La gauche menacée par l’UPN et le RN

La gauche, elle ne serait pas mécontente si, déjà, elle pouvait conserver ses 15 cantons. Même unie – sans toutefois La France Insoumise - ce ne sera pas facile. L’UPN a l’ambition de faire basculer à droite le canton de Coudekerque-Branche ; le maire de la ville principale, Coudekerque, ne se présente pas, ce qui laisse de l’espace au maire de Bergues Jean-Loup Tronquoy. 

Quant au RN, il lorgne plus que jamais sur le canton d’Anzin qu’il avait raté de 103 voix en 2015. "On a perdu le Nord pour longtemps, regrette un élu socialiste. On n’est même plus dans la nostalgie des anciens présidents PS qui tenaient solidement les rênes du conseil général, les Derosier, Kanner, Manier… On n’a même pas désigné – avant le premier tour - celle ou celui qui sera notre présidente ou président si par miracle la gauche reprend le département. C’est dire…" 

Le Parti Communiste ne fait pas de zèle. Exemple dans le canton de Marly : il ne présente pas de candidat dans cet ancien fief de Fabien Thiémé, conseiller général du Nord pendant près de vingt ans, figure du PC décédé en 2019.

Enfin, du côté du Rassemblement National, l’objectif numéro un est d’entrer au conseil départemental du Nord. Le seul qui lui résiste dans les Hauts-de-France, puisque le parti de Marine Le Pen est présent dans l’Aisne, l’Oise, le Pas de Calais et La Somme. 

On l’a dit, en 2015, ce qui était encore le Front National avait raté l’élection d’une centaine de voix dans le canton d’Anzin ; mais aussi de 300 voix dans le premier canton de Dunkerque et de 500 dans celui de Denain. Le couplage le même jour des élections régionales – plus politiques – et départementales devrait favoriser le vote RN.

Les élections auront lieu les 20 et 27 juin 2021. "Premier tour le jour de la fête des pères, note, pessimiste, une conseillère sortante. Et deuxième tour la veille des vacances. Ce que j’entends sur le terrain, c’est que tout le monde aura la tête ailleurs, c’est que personne ne viendra voter…"

 

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