Ce 28 octobre 2024, une quarantaine d'activistes ont mené deux actions simultanées autour de la centrale nucléaire de Gravelines pour dénoncer les risques que la création de deux nouveaux réacteurs engendrerait, notamment à cause du dérèglement climatique et de l'augmentation du niveau de la mer.
Des éclats de voix et le grondement d'un groupe retentissent aux abords de la centrale nucléaire de Gravelines. Vers 9 heures, une quarantaine d'activistes de Greenpeace France bravent les interdictions et pénètrent au sein du périmètre de la centrale la plus importante d'Europe de l'Ouest.
Une poignée de militants armés de bombes de peinture taguent les portes de l'écluse qui sépare la centrale de la mer. Sur le chenal, deux zodiacs sont mis à l'eau et arpentent le canal de rejet en brandissant deux banderoles. Les salariés et autres personnes présentes lors de cette action coup de poing peuvent lire sur les bandeaux jaunes : "Montée des eaux, nucléaire à l’eau".
Un message d'information publique qui vise à alerter les habitants, du Dunkerquois et d'ailleurs, sur le risque d'inondation qui pèse sur la centrale de Gravelines.
Un projet "irresponsable"
Des cerfs-volants violets en forme de méduse flottent dans les airs derrière les embarcations de Greenpeace. Des fumigènes bleus sont tirés : symboliquement, l'eau gagne déjà du terrain sur la centrale, construite sur le polder du delta de l'Aa. Une terre artificiellement asséchée située sous le niveau de la mer. Une zone nucléaire sensible, en proie à des risques de submersion à long terme, causés par l'augmentation du niveau de la mer et le dérèglement climatique. C'est en tout cas le constat alarmant que dresse le dernier rapport de l'ONG, publié le 3 octobre 2024.
Plus encore, Greenpeace souhaite lancer l'alerte concernant le projet de construction de deux nouveaux réacteurs à Gravelines dans les prochaines années, comme imaginé par Emmanuel Macron en 2021.
Ces deux nouveaux réacteurs seraient d'une part exposés à ces mêmes risques, qui vont en plus augmenter avec le dérèglement climatique.
Pauline Boyer, chargée de campagne pour la transition énergétique chez Greenpeace
Un dessein jugé irresponsable par les activistes venus militer ce lundi autour de la centrale. Pauline Boyer, chargée de campagne pour la transition énergétique chez Greenpeace, explique : "Pour la centrale actuelle, EDF (ndlr : exploitant de la centrale nucléaire de Gravelines) n'avait pas le choix : l'enceinte a été ceintrée par une barrière de protection. Elle ne pouvait pas déplacer la centrale. Par contre, ces deux nouveaux réacteurs seraient d'une part exposés à ces mêmes risques, qui vont en plus augmenter avec le dérèglement climatique."
Des risques d'accident nucléaire accrus
Une situation dangereuse pour les habitants, ainsi que pour les travailleurs et travailleuses de la centrale, qui seraient en proie à des risques d'accident nucléaire plus importants. "Les marées montantes peuvent rompre les lignes électriques et créer une panne de courant dans la centrale. Ce qui mettrait à mal les pompes d'eau dont la centrale a besoin en permanence pour refroidir ses réacteurs." Pauline Boyer fait notamment écho à la catastrophe nucléaire qui a failli frapper la centrale du Blayais, dans le Sud-Ouest, lors de la tempête de 1999 qui avait provoqué une grande inondation dans le système de secours de refroidissement.
Pour pallier tout risque éventuel, Greenpeace demande à EDF de renoncer à ce projet de nouveaux EPR (réacteur pressurisé européen) - considéré "bien trop dangereux" - et de répondre aux questions de la société civile concernant le dérèglement climatique. "Le débat public a commencé depuis septembre et EDF ne met pas à disposition du public des informations claires sur la prise en compte du dérèglement climatique", fustige Pauline.
Le débat public a commencé depuis septembre et EDF ne met pas à disposition du public des informations claires sur la prise en compte du dérèglement climatique.
Pauline Boyer
Si l'opération menée par l'ONG ce 28 octobre ne parvient pas à attirer l'attention d'EDF, celle-ci aura au moins eu le mérite d'avoir interpellé sur les dangers du dérèglement climatique à travers une action non-violente. Une heure après le début de l'opération, 25 activistes ont cependant été interpellés par la police. Une embarcation est, elle, parvenue à échapper aux forces de l'ordre, laissant flotter derrière elle ses banderoles et ses méduses.