"80% des AVC pourraient être évités" : 5 choses à savoir pour réagir face à cette maladie chronique

En cette journée mondiale de lutte contre l'AVC (accident vasculaire cérébral), Charlotte Cordonnier, cheffe du service de neurologie au CHU de Lille, revient sur les symptômes de cette maladie chronique, première cause de mortalité chez les femmes, qui touche 13 000 nouveaux patients chaque année dans le Nord-Pas-de-Calais.

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Le 29 octobre a lieu la journée mondiale de lutte contre l'AVC (accident vasculaire cérébral). Une maladie qui frappe de plus en plus de personnes en France, en lien notamment avec un mode de vie de plus en plus sédentaire. Si cette maladie hante les consciences, ses symptômes et les bons gestes à adopter ne sont, eux, pas forcément acquis de tous.

Charlotte Cordonnier, cheffe du service de neurologie au CHU de Lille, lève le voile sur l'AVC en cinq questions, pour permettre à chacun et chacune d'agir face à une maladie où chaque seconde compte.

Comment reconnaître les signes d'AVC ?

"Un accident vasculaire cérébral correspond à un défaut d'irrigation du cerveau brutal ou au déchirement d'une artère. Dans 80% des cas il s'agit d'une artère qui se bouche, ce qui correspond à un infarctus, dans le reste des cas il s'agit généralement d'une hémorragie cérébrale. À chaque fois le cerveau n’est plus nourri (sang, oxygène...), donc il dysfonctionne et va perdre des fonctions : impossibilité de bouger la jambe ou le bras, de s'exprimer, de comprendre certaines phrases, on ne voit plus d'un œil, on a la bouche déformée, la moitié du visage est engourdie ou paralysée... Des signes neurologiques qui apparaissent toujours soudainement."

Le cerveau n’est plus nourri (sang, oxygène...), donc il dysfonctionne et va perdre des fonctions. (...) Des signes neurologiques qui apparaissent toujours soudainement.

Charlotte Cordonnier, cheffe du service neurologique au CHU de Lille

Si cela arrive, que faut-il faire ?

"En français on a l'acronyme VITE qui permet de rappeler la marche à suivre : V pour visage déformé, I pour incapacité à bouger, C pour trouble de la parole et E pour "en urgence j'appelle le 15". Si on fait face à un AVC, il faut surtout laisser la personne allongée et dans tous les cas il faut aller très vite et appeler le 15 (SAMU). Chaque minute compte et doit servir à renourrir le cerveau.

Si les symptômes finissent par disparaître, il faut tout de même rester vigilent. C'est un épisode que l'on appelle "déficit transitoire", une sorte de signal d'alerte à prendre au sérieux car c'est le meilleur moment pour une intervention médicale : le cerveau a récupéré mais le risque est toujours là. Il faut donc appeler le 15 car le risque qu'une artère se bouche dans les heures qui suivent est très élevé."

► À lire aussi : "L'AVC n'est pas qu'une pathologie de la personne âgée" : connaître les signes, réagir vite

Quels sont les risques si l'accident se prolonge ?

"800 000 personnes vivent avec séquelles en France aujourd'hui. Elles apparaissent dans le cas où l'on ne parviendrait pas à renourrir le cerveau assez rapidement. Plus vite le patient sera traité, moins il aura de séquelles. Sinon la personne ne récupérera pas entièrement son autonomie. En 2024 on peut guérir d'un AVC si on vient dans le bon hôpital à temps. C'est pour ça qu'il faut faire 15 : les urgences pourront vous emmener vers l'unité vasculaire qui disposera du bon matériel et pourra mettre en place la rééducation. Le risque de séquelles est lié au temps que l'on va mettre à repérer les symptômes, à être admis au bon endroit et ensuite la capacité du cerveau à récupérer.

Le risque de séquelles est lié au temps que l'on va mettre à repérer les symptômes, à être admis au bon endroit et ensuite la capacité du cerveau à récupérer.

Charlotte Cordonnier

Les AVC sont la première cause de handicap physique. Ils peuvent provoquer des difficultés à marcher, à communiquer, à mémoriser mais également ce qu'on appelle les "séquelles invisibles". C'est-à-dire : même si l'on a récupéré, le cerveau a quand même une cicatrice qui cause des difficultés de concentration, un temps de réaction plus long, une forte fatigabilité... Des handicaps qu'il est important de prendre en compte notamment dans l'environnement professionnel."

Peut-on diminuer le risque d'accident vasculaire cérébral ?

"Dans le Nord-Pas-de-Calais on compte 13 000 nouveaux cas d'AVC par an et 150 000 en France. Mais on estime que 80% des AVC pourraient être évités, principalement en dépistant l'hypertension artérielle - en prenant donc sa tension régulièrement -, en évitant de fumer, en faisant une prise de sang régulière pour chercher le taux de cholestérol ou vérifier le diabète, également, la pratique d'une bonne activité physique est importante.

Lorsqu’une personne a été victime d'AVC, elle devra suivre un parcours de soins important car il s'agit d'une maladie chronique, avec des risques qui perdurent. On peut limiter ces risques en reprenant une activité physique, en arrêtant de fumer, mais cela nécessite forcément des traitements pour fluidifier le sang ou compenser la cicatrice."

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Quelles personnes y sont les plus vulnérables ?

"L'âge moyen de l'apparition d'un AVC est de 72 ans, mais chaque année des personnes de moins de 50 ans sont touchées et concernent 15 000 nouveaux cas. Les accidents vasculaires cérébraux peuvent aussi toucher les enfants, avec les mêmes symptômes, même si c'est beaucoup plus rare. Il faut donc que les médecins et que les soignants perdent l'idée reçue du facteur jeunesse, que l'on cesse de dire "il ou elle est jeune, ça ne peut pas être un AVC".

Globalement les femmes y sont plus sensibles, c'est d'ailleurs la première cause de mortalité chez elles, et non plus le cancer du sein.

Charlotte Cordonnier

Mais globalement les femmes y sont plus sensibles, c'est d'ailleurs la première cause de mortalité chez elles, et non plus le cancer du sein. Elles sont à risque car elles vivent plus longtemps, peuvent développer plusieurs maladies qui favorisent les AVC et ont des variations hormonales qui jouent également sur les accidents vasculaires cérébraux. Par exemple pendant la grossesse ou la ménopause car les œstrogènes qui protégeaient les vaisseaux disparaissent. Mais les différences femme-homme ne se résument pas qu'aux hormones, également à la différence dans la coagulation et l'anatomie des vaisseaux, ainsi que des problématiques sociétales d'accès aux soins et de sous-médicalisation de la population féminine, qui va prendre soin des autres mais peu d'elle-même."

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