Michel Deraed fait partie des 7 500 parties civiles du procès en appel du Mediator qui démarre ce lundi 9 janvier. Le Linsellois de 78 ans, président de l’ADVM Calais, association de défense des victimes du médicament attend "enfin" la vérité.
Il aurait aimé se rendre au procès à Paris mais n’en a pas la force. Michel Deraed va suivre les audiences à distance, par le biais de son avocat. "Il m’a promis un compte-rendu, je vais guetter mes mails".
Impossible en effet pour le retraité de se déplacer : "prendre le train, dormir à Paris, je ne suis pas d’aplomb". L’homme souffre de diabète et d’insuffisance rénale, "tout ça à cause du Mediator, dit-il, un poison qui a affaibli mon corps, c’est comme ça que je le ressens encore".
A la fin des années 90, l'homme souffre de diabète, son médecin traitant lui prescrit alors du Mediator, un médicament "miracle" lui dit-on à l’époque. Mais rapidement, l’état de santé de l’ancien chef de service de la Police municipale de Tourcoing se dégrade. En 2009, il subit une lourde opération du cœur. "Après ça, on voulait me redonner du Mediator, mais là, c’est moi qui ai dit non, j’avais entendu parler de l’affaire à la télé", se défend Michel Deraed.
C’est en effet cette année-là que le scandale éclate. Le médicament du laboratoire Servier est retiré du marché. La pneumologue lanceuse d’alerte Irène Frachon vient de prouver sa dangerosité, notamment des risques cardiaques avérés.
En 33 ans, le Mediator a été prescrit à 5 millions de personnes et aurait causé, selon l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), 500 à 2 000 décès.
"On a tous été trompés. Aujourd’hui, j’en veux à Servier et ses collaborateurs, ils le savaient. Ils ne devraient plus exister".
Michel Deraed
Après le premier procès en 2021, le laboratoire est condamné à 2,7 millions d’euros d’amende pour "tromperie aggravée" et "homicides et blessures involontaires". Mais le groupe est relaxé du délit d’escroquerie.
Ce que n’accepte pas Michel Deraed, "j’y pense encore tous les jours, ces gens-là devraient aller en prison. Ils ont trompé, ils ont tué, ce sont des criminels. Je vais loin mais c’est ce que j’ai sur le cœur".
Par la voix de son association de victimes, il dénonce la criminalité organisée du système Servier. Le groupe, lui, affirme ne pas avoir connaissance de la toxicité du produit. La culpabilité du laboratoire devrait être confirmée lors de ce procès en appel affirme l'avocat du retraité, Me Jean-François Changeur. Sur les 60 victimes qu'il défend, 55 viennent des Hauts-de-France. "On est sur le volet de la tromperie aggravée, les preuves sont là, on espère la confirmation de la condamnation et des sommes obtenues en 2021".
Les plaignants ont reçu entre 20 000 et 60 000 euros d'indemnités. "Oui, on a eu de l’argent, confirme Michel Deraed, mais vous savez l’argent, ça n’arrange pas la maladie. Moi, j’aurais préféré avoir un médicament qui me soigne".
Le procès en appel de l'affaire du Mediator débute ce lundi 9 janvier à Paris et doit durer jusqu'au 28 juin.