C'est une tradition. La famille Auslender brade depuis plus de 30 ans, lors du grand rendez-vous festif de la rentrée. Une "religion", un "moment familial", qui se partage avec les cousins, les copains, mais aussi la foule, les acheteurs, les bradeux. Ici, trois générations sont rassemblées et bradent, ensemble, pour leur plus grand plaisir.
Il y a là Ariel, 6 ans, qui apprend à rendre la monnaie en compagnie de sa tante Elisabeth, devant le stand de vêtements et de jouets. Benjamin et Nathan, les deux beaux-frères, d'une quarantaine d'années, un peu en arrière de l'étal. "Généralement, je mets en place les tables le matin, puis mes sœurs prennent le relais une heure après pour la vente", explique Nathan, pour qui, comme le reste de la famille, la braderie est un peu "une religion".
Le mot est fort et fait sourire ses sœurs Elisabeth et Valérie. Néanmoins, chez les Auslender, depuis que Corinne (leur mère) et son ancien mari sont venus habiter rue Royale, il y a environ 40 ans, au moins trois générations ont appris à brader, discuter, vendre, faire la fête à l'occasion de la braderie de Lille. C'est à la fois pour eux un temps de partage et d'échange, une réunion de famille mais aussi une "fabrique à souvenirs".
"Fabrique à souvenirs"
"Il y a des années, on a fait des croque-monsieur, quand on avait 20 ans on a fait un stand de tequila. On avait les copains qui étaient rue d'Angleterre et qui vendaient eux aussi de la tequila. C'était très drôle, on se renvoyait les clients", explique Elisabeth.
Nathan, lui, se remémore son papa qui lui apprenait à compter. "On comptait combien coûtaient le pain, le jambon. Avec 10 tranches on faisait 30 croque-monsieur. On allait à Metro et puis on gérait le stock, on calculait les tarifs".
Valérie se souvient de "50 personnes sur une tablée gigantesque réunies dans le jardin. Tous nos amis, à tous les trois, avaient été invités", et aussi de "la salle d'attente du cabinet médical de maman transformée en salon d'essayage avec un miroir, ou en boîte de nuit avec de grosses enceintes, et on faisait la fête dehors".
Alors certes, pendant les études, il y a peut-être eu, une ou deux fois, un membre de la famille qui n'était pas là, car à l'étranger. "Mais sinon, c'est un vrai rendez-vous familial : le petit a dormi chez mamie, je me suis occupée de mes neveux ce matin, il y a un vrai truc collégial avec cette braderie".
Corinne, la maman de Valérie, Nathan et Elisabeth, adore l'esprit de la braderie : "C'est une vraie fête, le moyen de se retrouver, il y a la famille, les amis. On est tous là. Je suis assez étonnée d'avoir transmis le virus, parce que toutes les générations sont là. C'est sympa".
Dany Boon et Eric Dupond-Moretti
Elle se souvient de ses débuts avec un peu de nostalgie : "Ici, on était vraiment une grande famille, parce que dans le quartier, on connaissait tout le monde. Tous nos voisins étaient là. Et chacun avait sa spécialité. Je me rappelle une année où, en face, il y avait Philippe qui était un peintre de la région et qui jouait de la guitare avec Dany Boon, avant qu'il ne soit connu."
"On les connaissait, c'était vraiment le quartier. En face, on vendait des gaufres. Il y a vraiment un esprit très sympathique ici. On allait manger des moules... Aujourd'hui c'est sympathique aussi, mais c’est autre chose", assure Corinne, avant de préciser que : "L'année dernière, à la place de l'ancien cabinet d'Eric Dupond-Moretti, ils avaient fait une boîte de nuit avec DJ et il y avait une ambiance de dingue dans la rue, c'était la folie."
Au fil des années, des époques, les générations poussent. Elisabeth remarque que, dans sa mémoire, la braderie est parfois un repère et permet de se souvenir d'un événement qui a eu lieu à peu près "l'année de telle ou telle braderie".
Corinne aussi a des souvenirs lointains qui remontent, ceux de ses beaux-parents, de son ex-mari et des deux familles qui étaient réunies. Mais cela, c'est une autre histoire...