Ce Mardi 14 mai, les obsèques du célèbre journaliste Bernard Pivot auront lieu dans son village de Quincié-en-Beaujolais, Rhône. L'occasion de revenir sur son parcours et la passion que lui voue Bernard Declerck, un habitant de Verlinghem, depuis 1976.
En 2017, Bernard Declerck, banquier retraité écrivait une biographie de l'amoureux des livres et homme de lettres Bernard Pivot. Sa fraîcheur, sa simplicité lui ont toujours plu. Dès 1976, un an après la première diffusion d'Apostrophes, Bernard Declerck devient fan de Bernard Pivot. Entretien.
Quel rapport aviez-vous avec Bernard Pivot ?
Je suis toujours resté fan. Je n'ai pas découvert "Apostrophes" la première année (1975), mais à la fin de la deuxième année de diffusion. Dès le premier instant, je n'ai plus jamais raté l'émission parce que je suis devenu fan de Bernard Pivot parce que je trouvais qu'il posait aux grands écrivains, les questions que leur aurait posées le grand public, ou quelqu'un qui n'était pas de la partie, qui n'était pas un grand intellectuel.
Il avait l'art de formuler ses questions...
C'est cela aussi qui était merveilleux. Pivot savait pratiquement à chaque fois faire en sorte que les écrivains interrogés répondent aux questions. Ces réponses ont donné envie à des millions de gens de lire. Et j'en fais un peu partie. Je lisais un peu avant mais il m'a donné envie de lire des livres que je n'aurai pas lus. Il m'a séduit. Tout comme les lecteurs, qu'on pouvait retrouver le samedi (au lendemain de la diffusion d'Apostrophes) chez leurs libraires pour acheter les livres dont ils avaient entendu parler à la télévision la veille.
Qu'est-ce qui vous a décidé à faire sa biographie ?
Un soir j'étais seul devant ma télévision et je vois qu'on écrit la biographie de - je ne sais d'ailleurs plus qui - et je me dis : "mince, si je devais écrire la biographie de quelqu'un, ce serait Bernard Pivot". En 1988, j'ai eu l'idée, et connaissant son adresse, je lui ai demandé la permission d'écrire sa biographie. Il ne m'a jamais répondu. En grand fan, j'avais pris l'habitude de me rendre à l'enregistrement de son émission à Paris. Et seul, j'arrivais souvent à me faufiler, dans le public. À un moment, lors du cocktail, je suis allé voir Pivot, je me suis présenté et il a crié : "c'est vous le fou, vous voulez faire ma biographie, mais non, c'est pas sérieux ça". C'est comme ça qu'il m'a coupé l'herbe sous le pied. Mais j'étais tellement fan que je voulais absolument l'écrire.
Pourquoi Bernard Pivot ne le souhaitait pas ?
C'est très simple, c'est la simplicité de l'homme. C'est quelqu'un qui disait : "je ne suis pas un écrivain, je suis un journaliste qui écrit des livres car, un écrivain, Monsieur, modifie le style, apporte des choses originales". Il était d'une modestie incroyable. Ce n'était pas de la fausse modestie. Il y a plein de témoignages là-dessus et je suis certain qu'il ne voulait pas se mettre en avant.
Comment avez-vous procédé ?
J'ai eu une chance extraordinaire. Je ne suis pas intello, pas du milieu parisien, pas écrivain, j'ai eu le coup de bol que des grands personnages acceptent de témoigner. En juin 2001, à la dernière de Bouillon de cultures, en même temps que le départ en retraite de Pivot, je me suis introduit dans une salle où était retransmise l'émission. Je suis allé voir Marcel Jullian, un des créateurs d'Antenne 2, qui a accepté un rendez-vous avec moi dans une salle isolée d'un restaurant parce qu'il adorait Pivot. Claude Sérillon et le frère de Bernard Pivot ont suivi... J'ai eu cette chance aussi que Pivot était très apprécié.
Qu'avez-vous appris sur Pivot en écrivant votre livre ?
Beaucoup de choses. C'était par exemple un élève moyen, il aurait aimé être vétérinaire mais il y avait trop de maths et de physique... Par contre, un lointain parent avait remarqué que Bernard Pivot aimait lire les journaux et avait conseillé à son père cette piste. Il a passé le concours de l'école de journalisme de Paris, mais il avait pris un billet retour d'emblée, pensant ne pas être pris. Finalement, non seulement il a été pris mais a fini major de sa promotion.
Comment a réagi Bernard Pivot à la sortie de votre livre ?
Bien. J'avais téléphoné à Anne-Marie Bourgnon, sa secrétaire, et envoyé mon livre. Trois semaines après, Bernard Pivot me téléphone et me dit : "Ça m'a plu, il est complet". Après le Goncourt, où il était membre du jury, il m'a reçu, très charmant, peu après la fin août 2017, dans un restaurant, très longuement, et a accepté de répondre favorablement à deux demandes. Dire un mot en couverture du bouquin. Et m'aider à faire la promotion du bouquin. Et il est venu à Lille signer des livres, avec moi, qui signais ma bio.
Cinq dates que vous retenez de lui ?
1957. Bernard Pivot sort vice-major de la promotion de l'Ecole de Journalisme, CFJ, rue du Louvre à Paris
1958. Bernard Pivot est embauché au Figaro littéraire en tant que courriériste littéraire.
1975. Le 10 janvier, premier numéro d'Apostrophes
1984. Première année des championnats d'orthographe
2014. En janvier, Bernard Pivot est désigné par Edmonde Charles-Roux pour prendre sa suite à la présidence de l'Académie Goncourt.
Bernard Declerck donne des conférences sur Bernard Pivot.