Un centre pour personnes radicalisées ouvre cette semaine à Lille : c'est quoi ? A quoi ça sert ?

Si le centre de prise en charge pour personnes radicalisées a ouvert le 7 octobre à Lille, les premiers publics devraient passer la porte du centre à partir de cette semaine. L'occasion de faire le point sur un lieu qui alimente beaucoup de fantasmes. 

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Suspectées de radicalisation islamistes ou mises en cause dans un dossier terroriste, quelques dizaines de personnes en France sont suivies en dehors de la prison dans un centre du "programme d'accueil individualisé et de réaffiliation sociale" (PAIRS). Il en existait à Paris, Marseille et Lyon, il en existe désormais un aussi à Lille. Dans un lieu tenu secret. 
 

Un dispositif atypique 


Une prise en charge ciselée, pour un public restreint au profil particulier : des "radicalisés" qui nécessitent un accompagnement renforcé mais pas -ou plus - une incarcération. "Une réussite" pour la Direction de l'administration pénitentiaire (DAP) car, jusqu'à présent, "aucune récidive", n'a été constatée. 

Ce quatrième centre débutera sa prise en charge à Lille dans un lieu anonyme pour "des raisons de sécurité et éviter des psychoses inutiles", explique la DAP. 
 

Des personnes "radicalisées" qui ne viendront que ponctuellement


Sur Twitter, certaines personnes expriment leur peur face à l'arrivée de cet espace dans le centre de Lille, comme cet internaute : "Scandale ! Au coeur de Lille, des terroristes islamistes sortis de prison ainsi que djihadistes de retour seront intégrés en grand secret dans un centre". 
 
Ou ce délégué départemental de la fédération du Rassemblement national de la Mayenne, Jean-Michel Cadenas qui tweete : "Il s'agit d'un dispositif de suivi en milieu ouvert. On n'arrête pas le 'progrès'!"
 
"Contrairement aux fantasmes" entourant l'installation de cette antenne, "ce n'est en aucun cas un centre d'hébergement ni même un guichet d'entretien, mais avant tout un centre administratif où se retrouvent les professionnels", répond l'administration pénitentiaire. 

Piloté par la DAP et l'association Artémis, spécialisée dans la prévention de la radicalisation, PAIRS est réservé à des profils plutôt "bas du spectre" et "accessibles à une prise en charge". Ils sont soit "revenants" de zones de conflits, velléitaires au jihad ou encore personnes condamnées ou poursuivies pour apologie du terrorisme, déjà condamnés ou en attente de leur jugement, hommes et femmes. 

Ils sont tous suivis par un Service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP) et intègrent le programme sur décision d'un juge. 
 

165 000 personnes suivies en dehors de la prison dont 770 radicalisés


Le programme PAIRS représente une faible proportion des 770 radicalisés suivis en dehors de la prison. En un an, 68 personnes en ont bénéficié pour une capacité totale actuelle de 125 places. Les moyens alloués au dispositif sont "sans précédent" face au défi "majeur" des sortants selon la DAP qui refuse d'en dévoiler le budget. 

Le dispositif découle du choc des attentats djihadistes de 2015 et du "trauma" de l'assassinat en juillet 2016 d'un prêtre par un radicalisé sous bracelet électronique à Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime). 

L'administration pénitentiaire s'est depuis "largement outillée" : en détention, l'accent est mis sur la formation de personnels, la création de binômes de soutien éducateur/psychologues et de quartiers spécifiques, et sur la montée en puissance du renseignement pénitentiaire. 
 

PAIRS, un programme "plus souple" pour en remplacer un autre


En 2018, PAIRS a pris la suite d'un premier programme testé en secret à l'automne 2016, RIVE pour "Recherche et intervention sur les violences extrémistes". "Un dispositif positif mais qui manquait de souplesse", pour François Toutain, chef de la mission de lutte contre la radicalisation violente à la DAP.

PAIRS a été conçu sur le même principe que RIVE, mais dès le départ, avec une envergure nationale, un fonctionnement plus souple (mutualisation des intervenants) et surtout, des capacités d'hébergement dans un parc locatif. Un hébergement toujours individuel pour ne "surtout pas créer de 'jihad academy'", souligne Naoufel Gaied, l'adjoint de M. Toutain.
  

Une prise en charge individuelle et pluridisciplinaire 


La prise en charge est individuelle et pluridisciplinaire, suivant un système de mentorat, et est modulable, de vingt à trois heures hebdomadaires. L'équipe d'encadrement compte travailleurs sociaux, conseillers en insertion professionnelle, psychologues et médiateurs du fait religieux, pour un accompagnement "cousu main" depuis la sortie de prison jusqu'à "l'autonomie" et le "retour en société".

"On ne touche pas à la pratique cultuelle, mais on apporte une approche sociologique, historique, anthropologique", indique M. Gaied. "Les mots-clés, c'est dialoguer, contextualiser", témoigne Yamina, travailleuse sociale à PAIRS-Paris, qui propose des rencontres avec des auteurs ou des reporters de guerre, organise des visites au département art islamique du Louvre.
           
Les entretiens d'évaluation sont réalisés "au plus près de leur vie": au parc, devant l'école de leurs enfants, dans des librairies religieuses ou sur les lieux de culte. "Les voir dans différents contextes permet de lutter contre la dissimulation", explique Sami Souid, directeur du centre parisien.
 

Sur 38 personnes suivies à Paris, PAIRS a permis le "retour en activité" de 24

 


En un an d'existence à Paris, PAIRS a fait ses preuves: sur les 38 personnes actuellement suivies (17 femmes et 21 hommes âgés de 19 à 42 ans), "24 sont en retour d'activité", pointe M. Souid.

"Le retour à l'emploi, c'est un facteur de désistance (de sortie de la délinquance, ndlr), pour les radicalisés comme pour tous les détenus", appuie la directrice du SPIP de Paris, Claire Mérigonde.

 
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