"On se dégoûte tellement, on est tellement dans le brouillard" : drogues, alcool, médicaments, ces patients racontent leurs addictions

Drogues, alcool, jeux d’argent, … Découvrez le quotidien de patients au sein d'un service d’addictologie, à Lomme, près de Lille, dans un documentaire qui décrypte l'addiction, cette maladie chronique, à travers des témoignages emplis d'espoir. Témoignages.

Ex-consommateur d'héroïne pendant dix ans et sous traitement de méthadone depuis dix ans, Marco n'a pourtant jamais arrêté de travailler. Il suit sa première cure, qu'il fait pour se désaccoutumer de la consommation d'alcool, qui a pris le pas sur le reste. L'élément déclencheur, dit-il, c'est l'incapacité soudaine à se lever, à cause de douleurs dans les membres. Aujourd'hui, il veut "réapprendre à vivre, sans alcool"

On se dégoûte tellement, on est tellement dans un brouillard, on n'a plus conscience de vivre et on n'a plus le goût de vivre. 

Fabrice, alcoolodépendant

Tout le monde peut sombrer dans l'addiction. Johann Boisleme, réalisateur d'un documentaire inédit, à voir jeudi 4 avril à 23h05, veut battre en brèche l'idée reçue selon laquelle il faudrait seulement de la volonté pour s'en sortir, pour décrocher définitivement de l'addiction. À 48 ans, il avoue avoir vécu "30 ans d'addictions en tous genres". Depuis trois ans il a cessé ses consommations, mais il lui arrive parfois de replonger. 

Au sein du service d’addictologie de la polyclinique de La Mitterie, à Lomme, près de Lille, Johann Boisleme a rencontré des hommes et des femmes qui, comme lui, luttent pour se défaire de leurs addictions et se libérer des pièges dans lesquels ils se sont laissés prendre.

En cure pour la quatrième fois, Julien, voudrait décrocher des stimulants qu'il prend, comme la cocaïne ou le speed. La difficulté, consent-il, c'est que les produits stupéfiants stimulants ont un double effet ; ils sont à la fois euphorisants et "fonctionnels", "opérationnels". 

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Pour Julien, addict à différent stimulants, la drogue, c'est un peu comme la roulette russe ©France Télévisions

La drogue, c'est un peu comme la roulette russe. Il y a 90% de chances qu'on en consomme et qu'on ne devienne jamais addict, mais il y a quand même 10% de chances qu'on le devienne.

Julien, addict à différentes drogues dures 

Amélie vient deux fois par semaine au centre Lommois, en hôpital de jour, pour être aidée à rester abstinente, "à garder le cap", dit-elle. Elle a pu décrocher de son addiction au cannabis, mais reste dépendante à l'alcool et aux benzodiazépines. Elle dénonce le tabou de l'addiction chez les femmes, qui fait que très peu d'entre elles, en comparaison aux hommes, franchissent les portes du centre de soin. Honte, déni, dissimulation, sont autant de freins à demander de l'aide.

"Il faut que les gens comprennent que c'est vraiment une maladie, c'est quelque chose de compulsif"

 

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Anxiolytiques et benzodiazépines sont prescrits à grande échelle en France, ©France Télévisions
 

L'anxiété est une porte d'entrée à l'addiction. Pour soulager les patients, les anxiolytiques, les benzodiazépines sont délivrées à grande échelle en France. Alors, pour certains, la solution devient le problème. Christelle témoigne : "Ça a commencé avec les benzo... J'étais un peu triste, angoissée, et je suis allée voir mon médecin qui m'a prescrit du Prozac. C'était comme des bonbons". Cette addiction aux anxiolytiques l'a conduite à faire plusieurs tentatives de suicide. 

Le Dr Marie Jasserand, médecin addictologue, explique : "Le problème des anxiolytiques, c'est que ça va soulager une angoisse, par exemple, mais que l'effet de sevrage des anxiolytiques, c'est le trouble anxieux". Ainsi démarre l'engrenage de l'addiction. L'addictologue précise : "Donc, après, je vais en prendre pour soulager l'effet de manque de mon traitement. Si j'en prends en continu, c'est ce qui va se passer". Quand l'angoisse de départ a disparu ou cessé, la consommation des médicaments sert à gérer le manque de ces mêmes médicaments. Un cercle vicieux qui peut mener à des consommations excessives et des risques lourds sur la santé. 

"L'abstinence, facile à dire !" 


"Moi, les addictions heureuses, je ne connais pas. Par contre, les abstinences malheureuses, oui !", affirme Johann Boisleme. Des addictions, il en a "côtoyé" quelques-unes, assure-t-il. Comme lui, tous les patients, qui effectuent une cure de cinq semaines sont amenés à revenir sur leur vécu.

La cure, c'est pour mettre le pied à l'étrier, pour entamer un nouveau chapitre, rappelle la psychologue Audrey Lefebvre à un patient lors d'un atelier en groupe. Mais l'histoire n'est pas finie et le passé est toujours là. Il faut donc travailler sur les sources, les causes profondes de l'addiction, dont l'origine est à chercher dans le passé des patients. Ceux-ci doivent faire un travail sur leur parcours personnel pour redonner du sens à leur vie, sans le produit. 

"Addiction, une maladie chronique"

Un documentaire inédit à voir jeudi 4 avril à 23h05 sur France 3 Hauts-de-France et disponible pendant 30 jours en replay sur france.tv

>> Voir le documentaire en avant-première sur notre site


Réalisation : Johann Boisleme 
Production : Media TV / Crescendo Média Films / France 3 Hauts-de-France

Collection documentaire "Tous accros, nos addictions"

Dans le cadre des collections documentaires de La France en vrai, France 3 vous propose 8 films qui se consacrent aux causes, aux mécanismes et aux conséquences de la dépendance. Des documentaires qui disent beaucoup de nous, de nos désarrois, mais aussi et avant tout, qui saluent des combats pour en venir à bout. 

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