La réforme du collège est entrée en vigueur à cette rentrée mais elle est toujours contestée par plusieurs syndicats enseignants qui ont appelé à la grève ce jeudi. Une manifestation s'est déroulée dans la matinée à Lille.
Cet appel à la grève une semaine tout juste après la reprise des cours, à l'appel d'une intersyndicale constituée du Snes-FSU, premier syndicat du secondaire, Snep-FSU (enseignement professionnel), FO, CGT, Sud et Sundep (privé). La ministre de l'Education Nationale, Najat Vallaud-Belkacem, évoque pourtant une rentrée "apaisée", celle "de la réalité et non des fantasmes", après les polémiques, grèves et manifestations qui ont entouré la réforme depuis sa présentation il y a un an et demi. Elle estime que les collèges réticents ne dépassent pas 5 à 10% et a adressé une fin de non-recevoir aux demandes de moratoire.
Les syndicats opposés à cette réforme craignent notamment une "mise en concurrence" des matières et des collèges, voire un grignotage des horaires des disciplines. "On fait un pari. Une grève de rentrée, c'est un acte fort, dès le début de l'année, on pose le conflit", expliquait une semaine avant la reprise des cours Benoît Teste, secrétaire général adjoint du Snes, disant espérer "une grève qui peut être majoritaire". Quatre jours après la rentrée, Frédérique Rolet, secrétaire générale du syndicat, semblait plus prudente : "Honnêtement, le taux de grévistes, je ne sais pas, quelques établissements sont déjà en grève", a-t-elle indiqué, en référence à des établissements protestant contre les effectifs des classes. Selon nos reporters sur place, la manifestation organisée ce jeudi matin à Lille n'a mobilisé que 150 à 200 enseignants. A 14h30, le rectorat de l'académie de Lille n'avait recensé officiellement que 5,83% de grévistes dans les collèges, 3,92% dans les lycées d'enseignement général et technique, 1,28% dans les lycées professionnels.
Une réforme qui divise
Le Snes a édité un fascicule avec des pistes pour "entrer en résistance pédagogique": ne pas mentionner l'aide personnalisée (AP) ni les enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI) dans les emplois du temps, ne pas se sentir obligé de participer à certaines réunions... Le syndicat avait déjà appelé à boycotter ou perturber les journées de formation à la réforme organisées par le ministère l'année dernière. Le Snalc - syndicat minoritaire qui a quitté l'intersyndicale après un désaccord sur les modalités d'action - a de son coté publié un "mode d'emploi" pour abroger la réforme "de l'intérieur"."Que des collègues doutent et se posent des questions, c'est légitime", mais l'appel à la grève, "c'est de l'affichage", estime Christian Chevalier, secrétaire général du SE-Unsa, syndicat pro-réforme. Il ne s'attend pas à une grande mobilisation jeudi et pense que "la majorité" des enseignants "entreront dans le dispositif" de la réforme. Pour Frédéric Sève, secrétaire général du Sgen-CFDT, également favorable à la réforme, "ça se passe bien" en gros dans un quart des collèges, "mal" dans 15%, tandis que dans 60-65% des établissements, "c'est en construction, il y a un temps nécessaire à l'appropriation de la réforme". Reste qu'une partie des enseignants peut, sans participer à la grève, appliquer la réforme a minima et jouer la montre en attendant une éventuelle abrogation, promise par plusieurs candidats aux primaires après l'élection présidentielle. Pour Mara Goyet, professeur d'histoire-géographie et auteur de plusieurs livres sur le collège, il existe une "contestation modérée" de la réforme qui n'a pas été entendue, regrette-t-elle sur son blog. "On va se retrouver là, comme des cons, en masse, à faire semblant de faire un truc (par devoir, oui, on est fonctionnaires et nous réservons notre capacité de résistance pour des cas plus graves) (en 2017 on risque de douiller) auquel nous ne croyons pas", prévoit-elle.