Au cinéma, à la télévision et même dans la pornographie, l’orgasme vaginal est la norme. On oublie souvent le clitoris, organe dont le rôle est d’apporter du plaisir.
En général, si on vous parle de clitoris, ce qui vous vient à l'esprit, c'est un petit haricot de quelques millimètres situé au-dessus de la vulve. Pourtant, c'est seulement la partie émergée de l’iceberg.
En fait, le clitoris peut mesurer plus de 10 cm de long à l’intérieur de la vulve, de part et d’autre de l’entrée du vagin. Plus il est stimulé, plus toutes ses parties gonflent ! Le clitoris et le pénis se ressemblent beaucoup. Dans cette illustration tirée du livre "S3xperience" de la sexothérapeute Margot Fried Filliozat, le gland est en orange foncé sur les deux organes.
On comprend mieux pourquoi le stimuler durant l’acte sexuel, en plus de la pénétration, peut être un atout pour réussir à monter au septième ciel. "Peu de femmes ont facilement un orgasme par la pénétration vaginale. Une majorité a besoin de stimulation clitoridienne pour jouir. Pourtant, dans mon cabinet, la grande majorité des femmes qui n’ont pas d’orgasme vaginal se sentent anormales ! Pour ne plus se sentir seule et dysfonctionnelle, nous avons besoin de comprendre. Comprendre que nous sommes normales et comprendre comment fonctionne notre anatomie du plaisir pour en vivre son plein potentiel."
Le clitoris, un outil pour débloquer l'orgasme
Le clitoris semble jouer un rôle central dans le plaisir sexuel féminin. 80 % à 95 % des femmes auraient besoin au moins d'une stimulation clitoridienne pour atteindre l'orgasme, selon l’étude de la docteure Laurie Mintz de l'université de Floride avec sa publication "Becoming Clitorate" en 2018. Selon l'étude d'Elisabeth A. Lloyd dans son ouvrage de 2005 intitulé "In The case of the female orgasm", seulement 25 % des femmes atteindraient systématiquement l'orgasme par pénétration.
Enfin, pour l'équipe de chercheurs de l'université d'Indiana, les proportions sont encore plus faibles. En 2017, 18,4 % des femmes interrogées rapportaient pouvoir jouir juste avec la pénétration et 36 % indiquaient que leurs orgasmes étaient meilleurs lorsque le clitoris était stimulé pendant la pénétration."
Le clitoris reste encore peu connu
Le clitoris est dessiné dans très peu de manuels de SVT au collège alors qu'il y a un cours sur les organes reproducteurs en quatrième/troisième. Le collectif SVT égalité, un réseau de professeurs qui lutte contre les stéréotypes dans l'enseignement, a félicité l’éditeur Magnard, car il a été le seul à montrer l’anatomie complète du clitoris sur son schéma à partir de 2017.
Un professeur de SVT au collège explique les raisons du peu de temps consacré au clitoris en classe : "Quand tu prends le bulletin officiel, il n'y a pas de ligne sur le clitoris. Les programmes que l'on nous donne sont évasifs, tu es libre d'aborder ce que tu veux. Lors de mon cours sur les organes reproducteurs, je prends dix minutes à la fin du cours pour montrer à mes élèves un clitoris imprimé en 3D en expliquant que sa stimulation provoque du plaisir. Comme il n'a pas été prouvé que le clitoris avait un intérêt dans la reproduction, il passe souvent à la trappe. Certains professeurs ne sont pas très à l'aise avec le sujet, d'autres disent qu'ils n'ont pas le temps. Et puis il y a les enseignants qui s'autocensurent par peur de la réaction des parents."
Pour les parents ouverts sur le sujet, il existe des livres adaptés aux petites filles comme "Le Petit illustré de l'intimité" de Mathilde Baudy et Tiphaine Dieumegard, aux éditions Atelier belle. Dans cet ouvrage, on trouve des schémas explicatifs comme ci-dessous.
Les adolescents n’ont pas vraiment l’occasion d’étudier l’intérêt du clitoris. Conséquence, les adolescentes sont peu à chercher à découvrir ses pouvoirs sensoriels. À 15 ans, seulement 24,9 % des filles se sont déjà masturbées contre 82,2 % des garçons, selon la grande enquête sur les comportements sexuels en France d’Alfred Spira et Nathalie Bajos.
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En finir avec le tabou autour du clitoris
Diane Deswarte, fondatrice du club Kamami organise des apéros sexo à Lille et intervient dans les établissements scolaires dans le cadre des cours de vie sexuelle et affective. Elle revendique qu’il faut sortir du tabou sur le clitoris pour que les femmes se réapproprient l'entièreté de leur plaisir : "C’est clair que si l’on part du principe que le plaisir féminin, c'est mal, qu’il est représenté n’importe comment dans les films et les séries - personne n’a jamais joui en seulement deux coups de reins contre un mur après un regard enflammé dans un ascenseur - qu’on ne trouve pas le clitoris dans les manuels scolaires alors qu’en parallèle on dessine des pénis sur les murs ou les tables des collèges, c’est normal que ça paraisse plus compliqué."
Selon la sexologue lilloise, les premiers amours, les premières fois et la sexualité sont les sujets n°1 de la cour de récréation. Les enfants et les adolescents sont tout à fait curieux de ce sujet. Elle ne rencontre pas de difficulté à capter l'attention des élèves et insiste sur la normalité de connaître son anatomie dès que l'on en ressent le besoin : "L’UNESCO affirme que l’éducation complète à la sexualité n'avance pas l’âge du premier rapport, mais qu’en revanche, la sexualité et les relations sont bien plus saines, plus plaisantes et plus épanouies. Que cela permet également de réduire les violences et d’établir aussi l’égalité hommes femmes."
Une méconnaissance de l'anatomie qui a des conséquences concrètes dans la vie sexuelle des Françaises. Lors de l’étude Ifop de 2014, près de huit Françaises sur dix (79 %) sexuellement actives admettent avoir rencontré des difficultés à jouir. Une femme sur trois (33 %) admet n’avoir pas eu d’orgasme au cours de son dernier rapport sexuel.
Retrouvez l'intervention de Diane Deswarte, sexologue et fondatrice du Club kamami, dans l'émission Hauts féminin sur le clitoris, et tous les autres épisodes sur france.tv.