Les 15 et 16 juillet, La Condition Publique accueillait l'étape roubaisienne du concours "Filme l'avenir", trois jours après Valenciennes.
Cet été, deux villes des Hauts-de-France, Valenciennes et Roubaix, faisaient partie des 18 étapes de "Filme l’avenir", un dispositif d'ateliers cinéma destiné aux jeunes à partir de 15 ans. Une tournée dans quinze villes en métropole et trois en Outre-Mer, organisée durant toutes les vacances pour promouvoir le concours, et inviter les jeunes générations à s’exprimer via la vidéo sur leurs espoirs pour un changement positif de la société.
Pendant deux jours, ils contribuent à la réalisation d'un court métrage de fiction de 90 secondes qui leur permettra de participer au concours Filme l'avenir (#FLA), organisé par l'Association Les Ami(e)s du Comedy Club et présidé par Jamel Debbouze. Les films, sélectionnés par un jury de professionnels et de de personnalités emblématiques, seront diffusés sur France TV Slash.
Le principe du concours est de permettre aux jeunes des quartiers et aux associations de faire entendre leurs voix à travers des vidéos courtes.
Faire passer un message dans un film tourné avec un smartphone
Pour s'assurer du succès de l'opération, les organisateurs de "Filme l'avenir" mettent les associations locales dans la boucle du projet largement en amont. De fait, le projet est bien relayé et les jeunes participants sont d'autant plus motivés qu'ils sont déjà actifs dans des pratiques artistiques ou créatives.
L'opération est très bien encadrée. De jeunes réalisateurs, auteurs, comédiens, dont un bon nombre sont actifs au niveau local, accompagnent les jeunes participants. Après seulement trois ans, Filme l'avenir apparaît comme un projet bien rôdé.
A Roubaix, c'est La Condition Publique qui accueille le projet, alors que le Festival "Pile au rendez-vous" bat son plein, proposant des DJ-Sets, bals, ateliers et balades culturelles jusqu'au 24 juillet.
Vingt-cinq jeunes, venus de la ville ou des communes alentours (Tourcoing, Croix, Wattrelos, Villeneuve d'Ascq, etc.) sont réunis. Tous ont été mobilisés par des associations locales. Répartis en cinq groupes, ils se sont mis à l'œuvre avec entrain.
Un planning au cordeau est annoncé et respecté : une première matinée de découverte, au cours de laquelle des courts métrages sont montrés aux jeunes, ce qui permet aux animateurs de donner quelques conseils d'écriture et de tournage, en commentant les projections. Ensuite, tous participent à des ateliers de théâtre, pour briser la glace et appréhender les écueils du jeu d'acteur face à la caméra, bien souvent une première pour eux.
L'après-midi de la première journée est dédiée à l'écriture des synopsis des films, toujours sous l'œil bienveillant des professionnels et associatifs. La journée se termine dans la bonne humeur, chaque groupe vient "pitcher" son film, sous les applaudissements des autres. Avant de partir, chacun fait le point sur ce qu'il devra amener le lendemain : accessoires, costumes, etc.
La deuxième journée est dédiée à la réalisation : tournage le matin, montage l'après-midi, et c'est dans la boîte !
"Tous vos plans doivent servir l'histoire"
Pour ce qui est du matériel, pas "d'artillerie lourde" ici. Pour réaliser les films, tourner et monter, le dispositif est très léger : un smartphone et l'application FilmicPro, un micro et une poignée stabilisatrice. C'est la meilleure façon de concentrer les esprits sur le récit et le message plutôt que de se perdre dans des considérations techniques.
Colia Vranici, réalisatrice originaire de Dunkerque, accompagne la tournée durant l'été. Très engagée au plan associatif, elle trouve du sens à ce projet de terrain. Elle sait que ce type d'expérience peut révéler des talents et débloquer des jeunes qui n'osent pas toujours franchir le pas de la création. Imperturbable quand ceux-ci se focalisent trop sur l'aspect technique ou formel, elle les remet avec tact sur les rails : "Recentrez-vous sur l'histoire, tous vos plans doivent servir l'histoire", conseille-t-elle. Car pour faire un film en deux jours, il faut privilégier la simplicité et la rapidité d'exécution.
D'ailleurs, lors de séances d'écriture, la plupart des groupes optent pour un dispositif narratif simple, en privilégiant notamment des plans séquence. On ne s'étonne plus aujourd'hui de voir les jeunes connaître les techniques de tournage et le vocabulaire ad hoc.
Un thème : "Joue-la collectif"
Les associations locales et les structures accueillantes sont fortement impliquées dans l'organisation et le déroulement des deux journées, à l'instar de Zéro Vice City, une jeune association roubaisienne qui organise des ateliers et conférences autour de l'éducation aux arts. Lyna, la rappeuse ou Antoine, le photographe, n'ont pas hésité à accompagner le projet "Filme l'avenir". Leur motivation est avant tout de "dénouer les nœuds, débloquer et encourager les jeunes" pour dépasser le syndrome de l'imposteur qui limite bien souvent leur engagement dans des activités créatrices, selon eux.
Par un heureux hasard, ou pas, le groupe qu'ils suivent est composé de jeunes très impliqués dans les arts urbains, comme Ryan, 22 ans, originaire de la région parisienne et qui cet été participe à un spectacle de danse avec la Cie roubaisienne L'Oiseau Mouche. Avec lui, Janes, 18 ans, un jeune Roubaisien qui se donne à fond dans le rap. Les deux jeunes hommes sont sur la même longueur d'onde : c'est avant tout l'expérience de groupe qui les a attirés. Leur film sera une dystopie : dans une société où la parole est limitée et contrôlée, des jeunes trouvent le moyen de s'exprimer ensemble, en rappant par télépathie...
"Si vous tombez sept fois, relevez-vous huit fois !".
Denzel Washington
Un autre groupe fera un film sur l'ascension fulgurante d'un danseur de hip-hop, qui enflammé par son succès perdra le contrôle. Sa chute, au sens propre comme au figuré, sera brutale. Pour le titre, ils hésitent entre "Freeze", qui évoque une technique de breakdance et "Un éclair", pour marquer le côté éphémère et violent du succès. C'est Meng, jeune vidéaste de Villeneuve d'Ascq âgé de 28 ans, qui filmera ses camarades, tous volontaires pour passer devant la caméra. Il y a deux jeunes de Croix, Alicia, infirmière en psychiatrie et Lahna, sa jeune sœur lycéenne, puis Aïda, étudiante de19 ans, et enfin Hamza, vidéaste de 21 ans à Wattrelos.
Pendant le tournage, tous les jeunes gardent en tête la maxime de l'acteur et réalisateur américain Denzel Washington, prononcée lors d'un discours en 2017 et dont l'extrait vidéo leur a été montré la veille : "Si vous tombez sept fois, relevez-vous huit fois !".