Les hôpitaux publics organisent, ce 7 juin, une grande journée de mobilisation à travers toute la France. Dans les Hauts-de-France, les actions et manifestations ont essaimé. A Roubaix, Lille, Beauvais ou Boulogne, des soignants épuisés demandent plus de moyens.
"La semaine dernière, j'ai vu une aide-soignante, dans un état dépressif. Parce que pendant le Ségur de la santé, on a parlé de 400 euros d'augmentation, et qu'elle y a cru. Mais sur sa nouvelle fiche de paie, il n'y avait que cinq euros de différence. Nous subissons une précarité institutionnalisée" dénonce Jacques Adamski, secrétaire de la CGT, micro à la main, dans la cour de l'hôpital Victor Provost.
Dans une situation critique, l'hôpital de Roubaix avait dû déclencher un plan blanc inédit, le 11 avril, pour manque de personnel. En fonctionnant à flux tendu, avec des personnels épuisés par les deux ans de crise du covid, la structure peine à être attractive et à recruter, entrant dans un cercle vicieux. Environ 10% du corps infirmier manque à l'appel. Il ne faisait donc aucun doute que la CGT se joindrait à la mobilisation nationale pour l'hôpital public, qui se déroule ce 7 juin dans plusieurs villes de France. Cette journée d'action mobilise les soignants, mais aussi tous les autres personnels administratifs et techniques nécessaires au bon fonctionnement des établissements, et parfois oubliés du Ségur de la santé tenu en 2021.
"Ce qu'on attend, c'est une réponse budgétaire nationale pour pouvoir embaucher des gens. En face, le secteur privé est capable de mettre de l'argent, d'augmenter des salaires s'il veut embaucher. Nous, on nous propose des primes de la discorde. Par exemple, dans les services de soins intensifs, l'infirmière a une prime mais l'aide-soignante avec qui elle travaille en binôme n'en aura pas. On veut de vraies augmentations de salaire, pas ces petites primes qui alimentent les conflits. Demain, les soignants vont-ils choisir des services non pas parce que ça les intéresse, mais parce qu'on y a des primes ?" s'inquiète le responsable syndical.
"On fait payer 19 euros pour une nuit aux urgences, alors qu'on n'a pas de médecin"
A Boulogne-sur-Mer, infirmiers, médecins, brancardiers, aides-soignants se sont relayés pour tenir le piquet de grève, à tour de rôle, pendant que les urgences fonctionnent encore. "Là, je sors de 24h de garde d'affilée. Cette nuit, j'ai joué à Tétris. Les patients, il faut leur trouver la bonne case au bon moment, sinon tout s'amoncelle et on perd le "jeu". C'est triste pour moi, mais surtout pour les patients" grince Philippe Bourel, délégué départemental de la fédération des médecins urgentistes de France. "On n'a pas été revalorisés depuis plus de 10 ans et avec l'inflation, on a perdu près de 300 euros en 15 ans. On nous donne des petites primes, et un Ségur qui n'est pas à la hauteur des attentes des agents, c'est le moment de montrer qu'on n'est pas contents" appuie Frédéric Bourgeois, secrétaire général CGT du centre hospitalier. Les soignants de Boulogne-sur-Mer se rendront, ensuite, à la grande manifestation organisée à Paris.
Même son de cloche au centre hospitalier Simone Veil, à Beauvais, en Picardie. Comme à Roubaix et Boulogne, c'est une grève toute relative qui s'organise, puisque les agents sont réquisitionnés à leur poste. Ils viennent cependant à tour de rôle, quelques minutes au moins, pour occuper l'espace et montrer leur détermination à un combat de longue haleine. Ici aussi, on réclame des embauches et des lits supplémentaires. "Aujourd'hui, le point essentiel, c'est d'avoir les effectifs, les lits en aval, pour arrêter l'engorgement des urgences. On fait payer 19 euros pour une nuit aux urgences, alors qu'on n'a pas de médecin de garde de ville, qu'on se bat pour trouver un médecin traitant" rappelle Eric Couq, secrétaire CGT du CH de Beauvais.