Plusieurs membres du collection "Non à la démolition de l'Alma-Gare" ont fait le déplacement à l'Assemblée Nationale le 30 novembre. Ils étaient auditionnés dans le cadre d'un projet de loi pour la démocratisation de la rénovation urbaine.
"C'est une proposition de loi qui a été travaillée depuis plus de deux ans, quand nous n'existions pas encore, avec plusieurs associations dont la fondation Abbé Pierre. Ils se sont associés avec des collectifs de quartier comme le nôtre à Paris, Grenoble... " retrace Florian Vertriest.
Le 30 novembre, le président du collectif "Non à la démolition de l'Alma-Gare" et quelques militants étaient auditionnés à l'Assemblée Nationale, pour soutenir un projet de loi qui veut modifier en profondeur les pratiques de la rénovation urbaine. Pour recueillir le témoignage des résidents de l'Alma, plusieurs députés ont fait le déplacement comme David Guiraud, Barbara Pompili, Charles Fournier ou Carlos Bilongo.
"Ils sont en accord total avec ce projet de loi. Le député Bilongo vient d'ailleurs visiter l'Alma ce 2 décembre. On a vraiment créé un beau lien avec ces députés, ça c'est super" apprécie Florian Vertriest.
Rénovation urbaine : "des comptes à rendre"
Le projet de loi en question se nomme "Démocratiser la rénovation urbaine et le logement social" et veut réformer l'ANRU, l'agence de la rénovation urbaine, qui fête ses 20 ans en 2023. Elle a vu le jour en 2003 sous l'impulsion de Jean-Louis Borloo, qui a engagé l'Etat dans un plan massif de rénovation des quartiers populaires. Mais le projet s'est enlisé : en 2020, seuls 50% des logements neufs promis ont été construits.
Pourtant, cela n'a pas empêché le lancement d'un deuxième programme d'envergure en 2019, le "nouveau programme national de rénovation urbaine" (NPRU). "Sur 329 quartiers, il prévoit la démolition de 65 600 logements, 53 100 reconstructions et 84 800 réhabilitations pour un budget de 10,3 milliards d'euros", géré par l'ANRU, rappellent les associations signataires de la proposition.
Quatre grandes orientations sont développées dans ce projet de loi :
- Créer un "fonds pour une démocratie d’initiative citoyenne" pour permettre de financer l’organisation collective des citoyens et des possibilités de contre-expertise indépendante
- Garantir le droit à l’information et d’initiative des habitants en matière d’urbanisme pour co-construire les politiques de rénovation urbaine
- Garantir une animation neutre de la concertation, équitable et indépendante
- Organiser à la demande des citoyen·ne·s, des "assemblées de comptes à rendre" durant tout le processus de rénovation urbaine
A Roubaix, un projet qui enflamme les oppositions
Parmi ces 329 quartiers, celui de l'Alma, à Roubaix, où le NPRU a déclenché une vague de contestation chez les habitants. A l'Alma, ce sont 480 logements, dont 428 logements sociaux qui doivent être détruits, pour un plan qui prévoit 390 rénovations et seulement 90 constructions. Le collectif de quartier accuse la mairie et les bailleurs d'orchestrer l'abandon du quartier pour pousser les habitants dehors, et parle même d'un "grand remplacement."
"Nous avons aussi rencontré les autres collectifs : quand ils parlent, on s'entend. Ils vivent les projets d'urbanisme de la même manière que nous. On essaie de nous dire que c'est nous le problème mais non, partout, on retrouve les mêmes problématiques" appuie Florian Vertriest.
Le maire, Guillaume Delbar, estime cette refonte nécessaire pour résoudre les "problèmes structurels du quartier" et reste ferme sur son projet. "On a constaté que ces grands ensembles vivaient mal d'une manière générale et l'aspiration n'est pas de reconstruire des tours. Il s'agit de retrouver une attractivité, un cadre de vie" plaide-t-il. Son équipe réfute toutes les accusations autour d'un manque d'information et de consultation des habitants.
L'opposition municipale, par la voix du conseiller Michel David, dénonce de son côté un projet mal mené : "On aboutit à la situation actuelle : pas d'adhésion au projet, pas de confiance dans la parole donnée, beaucoup de résignation et de colère" a-t-il lancé lors du conseil municipal du 6 octobre.
Les constats des associations rédactrices du projet de loi, après leurs auditions, formule des conclusions qui vont dans le même sens. "De nombreux chantiers de rénovation urbaine s’imposent par une démarche autoritaire et descendante, sans la compréhension et l’adhésion des habitants. Ces projets s’imposent sans possibilité de contre-expertise et sans évaluation économique, sociale et environnementale sérieuse" écrivent-ils. "Tout s'aligne avec nos revendications", résume Florian Vertriest.
Le ministre Olivier Klein pourrait porter la proposition de loi devant l'Assemblée Nationale à la mi-décembr.