Obligatoire au 1er janvier 2024, le tri des biodéchets devient un casse-tête pour les grandes villes. Les collectivités ont la responsabilité de fournir aux habitants des mesures pour le tri à la source. Ou en est la Métropole lilloise dix-neuf jours avant l'échéance ? Petit tout d'horizon des avancées.
Les déchets alimentaires, dans la métropole lilloise, c’est 92 kg par an et par habitant. D'une façon générale ces biodéchets remplissent le 1/3 de notre poubelle ordinaire. Un geste qu’il va falloir abandonner. Car ces déchets finissent incinérés, un comble, quand ils peuvent être valorisés.
Où déposer ces biodéchets ?
En ville ou en appartement, il n'est pas aisé de composter chez soi. À condition d'en avoir à proximité, le composteur collectif est une option.
À Tourcoing, Anthony Verpoort en a créé un au mois de juin, avec l’aide d’un maître composteur. Car composter est un art ! Aérer régulièrement, transférer le contenu d'un bac à un autre pour que le compost mûrisse. Anthony Verpoort a été formé pour être le réfèrent de la trentaine d'utilisateurs de compost.
Seau à la main, il déverse des épluchures en tout genre : "Pour que ce soit équilibré, il faut que je mette le même volume de matière sèche," précise-t-il. "Les composteurs collectifs sont ouverts à tout le monde mais, nous avons mis des cadenas pour que n'importe qui ne vienne pas jeter n'importe quoi. Le but est que lorsque quelqu'un souhaite l'utiliser, je vienne le rencontrer, je lui explique comment ça marche pour que ça fonctionne et que l'on n’ait pas des bouts de plastiques qui soient jetés, ou de la viande." Anthony Verpport insiste, "On ne met pas n'importe quoi dans un composteur."
Tout cela demande du temps et un engagement des utilisateurs. Pour l'instant, la Métropole lilloise accompagne 150 composteurs collectifs et entend doubler leur nombre d'ici deux ans.
Tout le monde n’a pas besoin de s’impliquer dans le compostage. Aujourd’hui, 40 % des habitants de la MEL bénéficient d’une collecte en porte à porte avec des poubelles compartimentées. Face à l'une d'elles à Lys-les-Lannoy, Aurélien Boulain, (chef de service prévention et pilotage des déchets ménagers à la MEL), démontre : "Là, on est vraiment sur un bon exemple, l'usager a bien mis ses ordures ménagères dans le compartiment ordures ménagères et ses biodéchets dans le compartiment dédié. Nous sommes vraiment dans le bon exemple, ce qui permet pour le collecteur de collecter les deux flux d'une manière séparée, pour les valoriser de manière séparée."
Beaucoup d’usagers l’ignorent encore : ce compartiment dédié peut accueillir autant les restes de repas que les déchets verts du jardin.
En Belgique (...) nous n'avons pas deux poubelles mais cinq ! C'est un petit geste pour la planète mais pour nous-même aussi.
Marie-OdileUsagère convaincue
Mais la collecte en porte-à-porte est difficile à transposer dans les grandes villes, plus denses. Depuis le mois de janvier, la MEL teste des points d’apports volontaires sur une dizaine de marchés. Et c'est naturellement que Marie-Odile dépose ses biodéchets, "j'ai vécu plus de dix ans en Belgique ou l'on trie, nous n'avons pas deux poubelles mais cinq ! C'est un petit geste pour la planète mais pour nous-même aussi."
Les usagers convaincus sont encore marginaux pour l'instant. Alors, c'est le jeune réseau des Alchimistes qui conduit l’expérience pour la MEL. Face au bac, Pauline décrit le contenu d'un paquet déposé : "Filtres à café, un peu d'épluchures, de la courge, des coquilles d'œufs, c'est vraiment très qualitatif. Depuis janvier 2023, poursuit-elle, on a déjà collecté vingt-quatre tonnes de biodéchets, ce qui est plutôt satisfaisant et encourageant pour la suite."
En fin de marché, les bacs sont collectés pour être triés et transformés en compost. Arrivés à Lille en 2020, les Alchimistes comptent aujourd’hui deux sites pour une vingtaine d’emplois créés. Le site est en capacité de réceptionner trois mille tonnes par an.
La MEL et son prestataire travaillent ensemble pour trouver des solutions adaptées à chaque quartier. "Nous n'aurons pas 100% des usagers métropolitains qui auront une solution tri à la source des biodéchets, reconnaît Aurélien Boulain, mais nous allons reprendre au mois de mars, la campagne de distribution des composteurs individuels. Ce qui permettra à l'usager de composter en individuel ou en collectif ou d'avoir un abribac en fonction des réflexions de la Métropole lilloise." Ces abribacs sur le modèle des collecteurs de verres seront testés dans deux quartiers lillois au printemps.
Tout ne sera donc pas en place au 1er janvier mais la transformation des biodéchets en or noir pour nos légumes ou en biogaz pour nos chauffages devrait monter en puissance. Si les ménages ne sont pas encore dans l'obligation de les trier, ils y sont vivement invités.