Des Insoumis jusqu’au RN, à l’échelle locale, régionale ou nationale, les politiques mouillent la chemise pour tenter de sauver l’entreprise Valdunes et ses 345 emplois répartis sur deux sites nordistes. La semaine dernière, le groupe chinois MA Steel, unique actionnaire, a annoncé ne plus injecter 1 centime dans l’entreprise de fabrication de roues en acier et d’essieux pour les trains.
L’usine est à l’arrêt depuis vendredi, et Fabien Roussel, présent ce mardi 9 mai 2023, exhorte les salariés à poursuivre la mobilisation. "Si nous on intervient à l’Assemblée Nationale mais qu’ici, il ne se passe rien, c’est comme si on pissait dans un violon", lance le secrétaire national du Parti Communiste Français devant la foule compacte.
Quelques minutes plus tôt, l’un de ses collègues, situé à l’opposé dans l’hémicycle de l’Assemblée, s’est lui aussi rendu au chevet des salariés. Sébastien Chenu s’est également engagé à se battre et à interpeler le gouvernent, face à la fermeture possible de ce fleuron industriel.
Car après l’annonce brutale de l’actionnaire chinois MA Steel, le risque existe de fermeture pure et simple de l’unique usine française de fabrication de roues en acier et d’essieux pour les véhicules ferroviaires. En témoigne les messages placardés par les salariés sur la façade de l’usine.
"Ils ont la technologie et ils s'en vont"
En janvier 2020 pourtant, l’une de nos équipes avait interrogé le directeur général de Valdunes, qui se voulait des plus optimistes. "MA Steel n’est pas venu en France pour faire un coup, pour racheter la technologie ou pomper le savoir-faire des gens de Valdunes et repartir en Chine, assurait Daniel Cappelle devant notre caméra. C’est bien un travail conjoint dans la durée et c’est comme ça qu’on l’a bâti non pas ensemble mais aussi avec nos clients principaux qui sont les grands comptes ferroviaires en Europe".
Mais trois ans plus tard, patatras. C’est précisément le scénario qui s’est joué jeudi 4 mai dernier, lorsque les 345 salariés ont appris que l’actionnaire chinois, arrivé en 2014, décidait brutalement de ne plus financer l’activité sur les deux sites nordistes de l’entreprise, à Trith-Saint-Léger et Leffrinckoucke.
"Les Chinois ont repris l'entreprise il y a une dizaine d'années avec l'idée de pouvoir acquérir les brevets grande vitesse. Aujourd'hui, ils ont les brevets, ils ont la technologie et ils s'en vont", dénonçait Ludovic Bouvier, responsable CGT Métallurgie dans le Nord et le Pas-de-Calais.
Trouver des solutions, et vite
Une colère des salariés partagée par les hommes et les femmes politiques. Dans la foulée de l’annonce brutale, la communauté d’agglomération de la Porte du Hainaut, par la voix de son président communiste Aymeric Robin, en a solennellement appelé au ministre de l’Economie Bruno Lemaire et à l’Etat. "Le territoire ne peut accepter qu’une délocalisation s’organise sous nos yeux au cœur du pôle industriel ferroviaire", écrit-il dans un communiqué.
Au même moment, le président LR de la région Xavier Bertrand somme lui aussi l’Etat, par le biais du ministre de l’Industrie Roland Lescure, de réunir "dans les meilleurs délais la direction de Valdunes ainsi que l’actionnaire majoritaire en présence des représentants du personnel et des élus locaux (pour) trouver une solution pour l’avenir de ces deux sites industriels majeurs pour les Hauts-de-France".
Nous ce qu’on cherche, c’est la survie de cette usine. Que ça passe par tous les partis politiques, on n’en a que faire.
Maxime Sivaux, délégué CGT Valdunes
Des prises de position qui apparaissent comme le dernier espoir pour les salariés de voir leur outil de production sauvé, comme l’explique Maxime Savaux, délégué CGT de l’entreprise. "Nous ce qu’on cherche, c’est la survie de cette usine. Que ça passe par tous les partis politiques, on n’en a que faire. Que ce soit gauche, droite, extrême-droite, extrême gauche, on veut que cette société perdure et on veut que la société soit sauvée. Et ça, ça passe forcément par une intervention de l’Etat".
"L'Etat doit savoir ce qu'il veut"
Un appel à l’aide qui coïncide avec toutes les prises de paroles politiques de ces derniers jours. Fabien Roussel demande l’intervention urgente de l’Etat, une aide qui pourrait selon lui s’inscrire dans le plan pour l’industrie verte que la première ministre doit présenter dans les 100 prochains jours. "En matière industrielle, des entreprises où la Banque Publique d’Investissement et l’Etat sont actionnaires, même minoritaires, ça permet d’attirer les banques et les investisseurs. C’est ça l’objectif, et c’est possible tout de suite".
Maintenant, ou jamais… c’est également la question posée par le député RN du Nord. "Aujourd’hui, l’Etat doit savoir ce qu’il veut. Est-ce qu’on veut protéger notre industrie ? a interrogé Sébastien Chenu, et auquel cas il faut intervenir, il faut demander à la SNCF de passer ses commandes ici à Valdunes plutôt qu’à l’étranger. Ou est-ce qu’on laisse faire, est-ce qu’on laisse le marché faire ? Et auquel cas le gouvernement verra encore une usine fermer".
Après les visites des deux députés ce mardi 9 mai dans la matinée, deux autres politiques sont annoncés dans l’après-midi au chevet des salariés : l’Insoumis François Ruffin et la secrétaire nationale d’Europe Ecologie les Verts Marine Tondelier. À quand la visite des ministres ? Cela devrait être une question de jours.