Le fabricant de tubes d'acier, après des années de galères, s'attacha à trouver de nouveaux clients et de moderniser son équipement.
Des salariés "apaisés" mais "toujours dans l'incertitude" : après des années de rebondissements épuisants, l'aciérie Ascoval de Saint-Saulve, près de Valenciennes (Nord), où Bruno Le Maire est attendu lundi, relève la tête mais son avenir à moyen-terme, dépendant de facteurs externes, reste flou.
En mai, deux mois après la "douche froide" qui avait vu Altifort retirer son offre de reprise, faute de financement, le ministre de l'Economie saluait la "jolie fin" du feuilleton Ascoval avec la reprise in extremis du site par British Steel, via Olympus.
Créée en 1975 par le sidérurgiste Vallourec, l'usine - qui produit depuis plus 40 ans des barres rondes en acier au carbone et des produits forgés - sortait en effet de quatre années de déboires financiers, qui avaient épuisé ses salariés et mobilisé les pouvoirs publics jusqu'au chef de l'Etat.
L'entreprise compte aujourd'hui 264 salariés, contre 300 il y a un an, en raison de "départs à la retraite mais aussi d'une quinzaine de démissions, surtout des techniciens", affirme Nacim Bardi, délégué CGT.
"On vit sous perfusion"
"On vit toujours dans l'incertitude, alors certains sont partis voir ailleurs, là où l'avenir était peut-être plus serein", confie-t-il. Car malgré un "apaisement" chez les salariés, "l'ambiance est à la résignation. On ne peut pas maitriser ce qui nous arrive", estime-t-il.
La région Hauts-de-France a indiqué avoir débloqué la première tranche d'un prêt de 8 millions, pour une aide publique totale d'environ 47 millions. "On vit sous perfusion de l'argent public - et privé quand il y en a", relève M. Bardi. "Ce qui nous importe aujourd'hui est de pouvoir attirer d'autres clients dès l'année prochaine." Le directeur Cédric Orban n'a pas souhaité s'exprimer.
De fait, "depuis sa reprise, Ascoval s'attèle surtout à deux tâches: trouver des clients (une douzaine à l'heure actuelle)
pour développer au niveau commercial, et se doter de nouveaux équipements afin de se diversifier sur le marché", indique une source proche du dossier.
"On pourra voir si ça s'éclaircit à partir de septembre 2020, car notre coulée aura été adaptée : on sera capable de faire du rond, du carré et du rectangle et donc de diversifier nos produits", confirme M. Bardi en référence à la forme des barres d'acier.
"On veut y croire"
En attendant, la production tourne au ralenti avec un carnet de commandes qui peine à atteindre les 50%. Les employés travaillent une semaine sur deux depuis juillet, avec un salaire "presque complet mais sans les primes et compléments", note-t-il.
Car l'usine souffre d'une conjoncture économique difficile, marquée par une baisse généralisée de la demande d'acier. Un gage d'incertitude accentué par le rachat en cours de British Steel par le Chinois Jingye, qui a fait émerger des interrogations sur le possible impact pour Ascoval.
L'usine de Saint-Saulve n'est pas directement concernée par les déboires judiciaires du numéro deux britannique, ce dernier étant la propriété d'Olympus. Mais la procédure pourrait compromettre le partenariat sur lequel l'aciérie travaille avec le site d'Hayange (Moselle), fournisseur de la SNCF, que Jingye a placé dans son périmètre.
"Notre avenir, c'est un grand point d'interrogation"
"Si les Chinois rachètent Hayange, ils peuvent décider de se passer du partenariat avec Ascoval, ce qui serait vraiment dommageable du point de vue commercial", glisse-t-on au cabinet du président des Hauts-de-France, Xavier Bertrand.
"Notre avenir, c'est un grand point d'interrogation", résume M. Bardi. "On espère que les Chinois vont nous accepter dans leur deal."
Bercy assure rester "très attentif à l'évolution de la situation" et Bruno Le Maire, accompagné de la secrétaire d'Etat Agnès Pannier-Runacher, se rendra sur le site lundi pour un "comité de suivi de la reprise par Olympus Steel".
La région, elle, "se veut prudente notamment au vu des nombreux rebondissements que le dossier a connus". "Mais on est plus confiants qu'il y a un an ou six mois car il y a un vrai projet", souligne-t-on chez Xavier Bertrand. "Pour l'instant le business plan est respecté (...) La direction, en laquelle on a toute confiance, est restée en place. Il y a quand même des améliorations et on veut y croire".