Chaque année entre Noël et l'Epiphanie, qui cette année tombe le 6 janvier 2025, les Rois mages sillonnent les Flandres pour apporter chaleur et convivialité dans les foyers. Une tradition plus que centenaire, relancée il y a une vingtaine d'années pour la plus grande joie des petits et des grands.
Une dernière retouche maquillage et un petit ajustement de costumes, et voilà les Rois mages prêts à partir en tournée dans Saint-Jans-Cappel, en ce dimanche 5 janvier 2025, veille de l'Epiphanie. Pour rien au monde, Balthazar, Melchior et Gaspard ne manqueraient ce rendez-vous traditionnel des Flandres, remis au goût du jour en 2000 par l'association De Katjebei.
"Bonne année, bonne santé !", lancent les Rois mages de porte en porte. Ils sillonnent les Flandres depuis Noël dans une balade conviviale et gratuite. Une dizaine de visites par jour jusqu'à l'Epiphanie, cette fête chrétienne qui, dans la confession catholique, célèbre la venue du Messie et la visite qu'il reçoit des Rois mages.
Pour marquer leur entrée, et avant de déguster galettes et tisane, ils entonnent le chant de l'étoile, De Starrekelied. "Maer starre, maer starre, je moet zo stille nie staen.", lancent-ils comme un appel à être guidés. "Étoile, étoile, mais tu ne dois pas rester immobile, nous devons aller ensemble à Bethléem." Et l'étoile tourne, impressionnante, portée par Balthazar, fier d'être là.
Une tradition plus que centenaire
"La tradition, je la connais depuis que je suis petit, explique-t-il, parce que, déjà à l'époque, nos anciens faisaient les tournées. J'ai toujours connu le passage des Rois mages dans chaque maison. C'est un honneur aujourd'hui d'être l'un d'entre eux."
"C'est une tradition qui remonte à plusieurs centaines d'années, complète César Storet, grimé en Melchior. En fin d'année, les indigents allaient chanter devant les portes des maisons pour récolter un sou, un peu de viande, à boire."
"Les gens dans le besoin bénéficiaient d'un aspect plus bienveillant des foyers pour récolter un peu d'appoints pour les fêtes de Noël. La tradition s'est transformée il y a une cinquantaine d'années en un événement plus religieux et spirituel, porté par trois Rois mages costumés. L'un joue de la musique, un autre tient un bâton de pèlerin et le troisième tient une étoile qui tourne."
Une collecte caritative
La notion de quête, elle, est restée. "Il y a aussi encore une dimension de collecte, concède un Gaspard plus vrai que nature. Aujourd'hui nous ne sommes plus dans le besoin, mais l'idée c'est que l'argent qui est récolté soit reversé à des associations plutôt caritatives du secteur et au-delà, donc on est toujours dans cette dimension solidaire."
Mais le plus important, c'est le partage. "C'est une tradition qui avait disparu, raconte encore César, et j'ai fait partie des trois personnes qui l'ont relancée il y a 24 ans. J'en avais 20 ! Je ne savais pas dans quelle aventure je me lançais... Ce n'était pas ancré dans ma génération, puisque ça s'était arrêté dans les années 80. Mais c'est un moment de partage inouï avec les habitants qu'on rencontre. Je ne me lasserai jamais de cette intensité."
"Quand je pense que j'ai pris certaines personnes dans mes bras il y a 24 ans alors qu'elles venaient de naître... Quand je les retrouve aujourd'hui et qu'elles ont leurs propres bébés... L'émotion est palpable !" "On les connaît, ajoute David Devienne, habitant de Saint-Jans-Cappel attaché à cette tradition. Ce sont des amis, mais il y a toujours un côté émouvant à leur passage. Maintenant, ce qui est rigolo, c'est qu'on amène nos enfants et que c'est à eux de découvrir tout ça."
Une camaraderie magique
César défend cette culture flamande depuis très longtemps. "Je suis attaché à ce que la tradition se perpétue, je me bats pour conserver ces différences qui nous enrichissent. Et puis, il y a la camaraderie, la fraternité entre Rois mages. On a commencé à trois, on est aujourd'hui une quinzaine de l'association De Katjebei à tourner. C'est magique."
Sur son site, l'association confirme que cette tournée a pour fonctions de colporter et renforcer le message biblique dans une communauté chrétienne flamande très croyante et de servir de quête pour les plus démunis : pain, beurre, vin, argent et surtout gaufrettes, qu'on appelle lukje ou styntje.
Recette des lukje (petites étrennes)
La recette de ces gaufrettes est simple : délayer 40 grammes de levure de boulanger dans de l'eau tiède. Faire une fontaine avec un kilo de farine, une poignée de cassonade et une pincée de sel. Verser 750 grammes de beurre fondu et 4 œufs entiers. Mélanger avec la levure. Travailler la pâte et la laisser monter au chaud. Former des petites boulettes et les presser dans un gaufrier à petits trous.
Au-delà de manger ou récolter de l'argent, pour l'association, cette tournée représente la sauvegarde de "souvenirs transmis de génération en génération, de siècle en siècle. C'est la transmission de l'histoire d'un peuple, c'est la mémoire de l'ethnie flamande."
