Le street-art pour illustrer la guerre, un moyen ludique d'intéresser à la mémoire : "il y a une vraie interactivité avec les plus jeunes"

Gros succès de l'exposition itinérante "Graff et Guerre" qui tourne depuis deux ans dans les Hauts-de-France. Plus de 11 000 personnes, surtout des scolaires, ont pu la découvrir. Une exposition qui questionne les plus jeunes sur le thème des conflits passés et présents.

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Boris Etienne-Verley est à l'origine de "Graff et Guerre". Animateur jeunesse au centre culturel et social Flers-Sart de Villeneuve d'Ascq, dans le Nord, il souhaite trouver un moyen ludique d'intéresser les jeunes à la mémoire, l'histoire, notre histoire. "En 2018, pour le centenaire de la fin de la Grande Guerre, les jeunes du centre et moi avons préparé une exposition photos sur les grands sites mémoriels de notre région. Nous nous sommes donc rendus sur place : à la nécropole de Notre-Dame-De-Lorette, à Ypres, Vimy, mais aussi plus au sud, en Picardie, à Beaumont-Hamel, Thiepval et au cimetière chinois de Noyelles-sur-Mer."

"Nous avons ainsi réalisé une cinquantaine de clichés labellisés Mission Centenaire par la préfecture du Nord. Les jeunes qui ont accompli ce travail étaient âgés de 15 à 17 ans, et ils m'en reparlent encore, six ans après, lorsque je les recroise".

Marquer durablement les jeunes esprits avec cette mémoire douloureuse, mais nécessaire, pour comprendre le monde et ses soubresauts contemporains : c'est le but justement recherché par Boris Etienne-Verley. "Pour poursuivre ce travail mémoriel, entre 2019 et 2021, en plein Covid, on a réalisé un court métrage de 49 minutes sur les deux guerres. Et mon groupe d'ados a cherché et retrouvé des lettres, une correspondance de soldats de toutes nationalités, ayant combattu dans notre région. Le film s'intitule 'D'une flamme à l'autre', de la flamme du Soldat inconnu à Paris, à la flamme du 'Tertre des massacrés', à Ascq."

Le street art, le plus court chemin pour toucher un large public

"Et puis en 2022, je me suis posé la question : comment fédérer plus de monde encore autour de ce projet de la mémoire, du souvenir de ces guerres ? Alors j'ai pensé au street-art. Un support artistique idéal pour toucher les plus jeunes notamment", poursuit Boris Etienne-Verley. "J'ai donc sollicité des artistes graffeurs pour créer des œuvres en lien avec la thématique de la guerre au sens large. Ils avaient carte blanche. Ils sont 34 à avoir répondu présent à ce jour. Et d’autres graffeurs vont encore rejoindre l'aventure. Tous ont travaillé bénévolement. Ce sont des figures de l'art graphique urbain, venus de la région de Lille, de Belgique et même de Bretagne. Si des artistes picards sont intéressés, ils sont les bienvenus".

Boris Etienne-Verley se réjouit que son appel ait été entendu. "Notre projet, baptisé Graff et Guerre, a évolué. De vingt œuvres, nous sommes passés à cinquante aujourd'hui : pochoirs, collages, graff purs et même sculptures. Sur palettes ou toiles, au format 60 sur 80".

Ca fait deux ans que Graff et Guerre tourne et c'est réservé tout le temps

Boris Etienne-Verley

Succès immédiat pour ce concept d'exposition itinérante sur le thème de la guerre. Collèges, lycées et écoles font appel à Boris et son musée mobile pour engager une réflexion sur les conflits avec les scolaires. "Chaque œuvre est expliquée et donne lieu à un échange. Il y a donc une vraie interactivité avec les plus jeunes. C'est une porte d'entrée idéale, car le support est ludique".

Les établissements scolaires ne sont pas les seuls à faire appel à Graff et Guerre. "Les communes aussi, ainsi que les musées consacrés à la guerre, l'Historial de Péronne, le musée de la Résistance à Bondues, le Fort de Seclin, Villeneuve-d'Ascq et même la Belgique" précise Boris Etienne-Verley. "Il y a une condition tout de même, la seule, que les œuvres soient assurées pour un montant de 25 000 € et que l'espace où elles sont exposées soit surveillé".

Graff et Guerre : une exposition qui repose sur la bonne volonté

"Cette exposition est unique en son genre dans la région et peut-être en France, à ma connaissance. Elle est intéressante, car elle offre deux points d'entrée sur l'histoire : une accroche purement visuelle et une approche historique. Ces 50 tableaux et sculptures évoquent bien sûr les deux grandes guerres mondiales, mais aussi le Vietnam ou des conflits contemporains."

Une démarche qui repose sur la bonne volonté. Car Boris Etienne-Verley ne dispose d'aucune subvention pour mener à bien ce travail qui nécessite de nombreux et lointains déplacements ainsi que de la manutention, pour accrocher les œuvres de street art. "C'est le centre social Flers-Sart de Villeneuve qui prend en charge les frais jusqu’à présent. Et heureusement, les collègues des services municipaux de la commune me donnent un coup de main pour installer et désinstaller, car tout cela prend beaucoup de temps !".

"Il est bon de se réapproprier notre patrimoine culturel"

"Le bilan de Graff et Guerre est très positif. Depuis 2022, nous avons reçu 11 000 visiteurs. J'en profite pour adresser un signe aux établissements scolaires picards : ils n'ont pas encore fait appel à nous, or, nous serions heureux de nous rendre sur place." En attendant, Graff et Guerre continue son itinérance. Les archives départementales de Lille accueillent l'exposition jusqu’à fin janvier, puis une partie des œuvres sera visible au musée de Froment, dans le Nord, pendant un an.

"Quant à mes jeunes et moi, on est parti sur un autre projet : on travaille en stop motion avec des Lego sur le massacre d’Ascq. Là encore, il s'agit d’expliquer de façon interactive, ce massacre de 86 civils fusillés par les Allemands le 2 avril 1944, en représailles, après un sabotage".

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