Après les empoignades et la polémique, place à la justice: la répression des fraudes accuse Intermarché d'avoir pratiqué de la revente à perte avec ses fortes promotions sur plusieurs produits dont le Nutella et transmet le dossier au parquet d'Evry.
"Nos agents ont conclu au fait qu'Intermarché n'a pas respecté les dispositions en vigueur concernant la revente à perte, ce qui relève d'une infraction pénale", a déclaré à l'AFP une porte-parole de la répression des fraudes. Elle a précisé qu'un procès-verbal allait être remis à la justice jeudi. "Il appartient maintenant à la justice de donner les suites nécessaires à ce manquement présumé", a ajouté la porte-parole, indiquant que la revente à perte est passible d'une amende maximum de 375.000 euros pour une personne morale.
Contacté par l'AFP, Intermarché n'était pas disponible dans l'immédiat pour réagir. "Très clairement c'est une mise en garde", a commenté jeudi sur RTL Delphine Gény-Stéphann, secrétaire d'Etat à l'Economie, évoquant une promotion "extrêmement agressive". "Je dénonce le fait qu'ils ont enfreint la loi dans cette opération de promotions (...) qu'ils ont d'ailleurs interrompue et je pense que ça servira de contre-exemple à l'ensemble de la profession", a-t-elle ajouté.
Bousculades et bagarres
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait annoncé fin janvier l'ouverture d'une enquête à la suite des promotions de moins 70% proposées par Intermarché sur de la pâte à tartiner Nutella, des couches Pampers, du café Carte Noire et de l'eau pétillante Perrier. Cette opération commerciale a donné lieu à des bousculades voire à des bagarres dans plusieurs magasins.Les vidéos montrant des clients se ruant sur les pots ont fait le tour des réseaux sociaux, obligeant Intermarché à présenter ses excuses aux clients.
Des promotions encadrées
Face à la polémique, le patron d'Intermarché avait indiqué que l'enseigne ne mènerait plus de promotions allant jusqu'à moins 70%, sans toutefois s'estimer responsable des débordements. Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire avait critiqué l'opération et invité l'enseigne à "ne plus faire ce genre de promotion". "Il y a un accord qui a été signé par Intermarché et les autres distributeurs pour ne plus faire ce genre de promotions. Ils doivent tenir parole", avait déclaré le locataire de Bercy, faisant référence à la charte de bonne conduite signée mi-novembre, à l'issue des Etats généraux de l'alimentation.Ferrero, propriétaire de la marque, s'était de son côté désolidarisé de l'opération, et avait souligné que "cette promotion a été décidée de manière unilatérale" par Intermarché. Ferrero avait "déploré cette opération et ses conséquences qui créent confusion et déception dans l'esprit des consommateurs". A l'heure actuelle, la revente à perte est autorisée dans certains cas précis, notamment pendant les périodes de soldes, avec des produits acquis par le distributeur au cours du mois précédent.
Les États généraux de l'alimentation, qui ont rassemblé toute la filière alimentaire, des agriculteurs aux distributeurs, ont également débouché sur un projet de loi, présenté fin janvier, visant à mieux encadrer les pratiques de la grande distribution. Censé mettre fin à la guerre des prix entre distributeurs et redonner un peu d'air aux agriculteurs, il prévoit notamment un "encadrement" des promotions.
Elles pourront porter au maximum sur un tiers (34%) de la valeur des produits et 25% du volume vendu par an.
Ce projet de loi prévoit également de relever le seuil de revente à perte (SRP) de 10 %, c'est-à-dire que les produits devront être vendus au minimum au prix acheté, majoré de 10%, pour couvrir les frais de logistique et de transport.