Pas de cantine scolaire pour les enfants souffrant d'allergies alimentaires : "clairement, notre fille est exclue"

La municipalité de Beauvais a décidé de ne plus servir de repas aux les élèves souffrant d'allergies alimentaires. À la place, les parents doivent systématiquement prévoir un panier-repas. L'annonce fait réagir parents d'élèves et élus.

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Dans la famille d'Emma, chaque veille d'école, c'est le même rituel. Ses parents sont en cuisine. Ils préparent le repas qu'elle devra emporter à la cantine. La fillette de 7 ans est allergique à l'arachide.

Depuis la rentrée à Beauvais, tous les enfants souffrant d'une intolérance alimentaire doivent apporter leur propre panier-repas à la cantine. Une décision incompréhensible pour les parents d'Emma. L'an dernier encore, la petite fille bénéficiait d'un projet d'accueil individualisé (PAI). La mairie avait l'obligation de fournir le menu aux parents et les allergènes correspondants. À eux de surveiller les repas et de donner des aliments de remplacement en cas de problème.

"En quatre ans de cantine, c'est arrivé une fois, remarque Guillaume Feuillet, le père d'Emma. On avait dû remplacer un dessert. Aujourd'hui, du jour au lendemain, on nous demande de fournir les repas complets, entrée, plat, dessert, et de ne plus simplement remplacer le jour où on a besoin de remplacer. Là, on a déjà les menus de septembre et d'octobre, on a les allergènes qui vont avec, on n'a aucune fois d'arachides dedans."

"C'est une pratique discriminatoire"

"Je préfère aller à la cantine et que ce soit eux qui me donnent le repas" murmure Emma.

"Clairement, elle est exclue" renchérit Isabelle Lepetit, la maman. "Elle transporte elle-même son petit sac jusqu'à la cantine, elle le transporte pour retourner au car et elle n'a pas forcément le repas en même temps. Sans oublier par ailleurs, qu'au départ, quand on l'a mise à la cantine, le but était d'élargir ce qu'elle mange. Donc on se force aussi à suivre le menu, histoire de l'éveiller à des choses que nous, nous n'aurions pas forcément faites."

S'appuyant sur un avis rendu par la Défenseure des droits, l'opposition municipale parle également d'une situation discriminatoire. "Le fait de systématiser sans évaluation individuelle des enfants, c'est une pratique discriminatoire, dénonce Roxane Lundy, conseillère municipale d'opposition (Génération.s). Et je crois que dans notre ville qui prône des valeurs d'inclusion et d'égalité, on ne peut pas accepter que de telles pratiques discriminatoires soient mises en place avec l'impact que ça va avoir sur les parents, dans leur organisation quotidienne et dans leur pouvoir d'achat".

"C'était compliqué à gérer"

Les cantines scolaires de la ville préparent quotidiennement plus de 3 200 repas. Pour justifier sa décision, Franck Pia, maire de Beauvais (UDI) évoque l'accroissement des PAI. Aujourd'hui, 45 enfants sont enregistrés comme souffrant d'une intolérance alimentaire. Pour lui, il s'agit de ne prendre aucun risque : "On est à plus de 42% en trois ans, se défend Franck Pia, maire de Beauvais (UDI). Pourquoi ? Je ne sais pas. Tenant compte de cette situation, eu égard au risque supplémentaire que pourrait représenter l'absorption d'un aliment allergène, on a effectivement pris cette décision et institué ce qu'on appelle un PAI complet parce que c'était compliqué à gérer au sein du personnel de restauration. Ce nouveau règlement a été voté au conseil municipal à l'unanimité en juin dernier. Il permet à ce qu'il n'y ait pas d'erreurs dans ces repas et j'ajoute que l'accès à la cantine sera gratuit".

Si les parents ne paieront aucun frais d'accueil, cette moindre mesure ne suffit pas à convaincre la maman d'Emma : "L'incidence, c'est le coût, explique-t-elle. La cantine devait coûter 2,56 € cette année par repas et là, on est facilement à trois ou quatre fois plus par repas selon ce qui est préparé. Vendredi dernier par exemple, ils ont toujours un gâteau. On a voulu lui acheter la même pâtisserie, c'était déjà plus cher que le repas de la cantine. Et cuisiner pour une personne n'a pas le même prix de revient au repas que cuisiner pour une centaine d'enfants."

En France, la majorité des villes appliquent ce même règlement. Les parents d'Emma envisagent, eux, de porter l'affaire sur le terrain judiciaire.

Avec Haron Tanzit / FTV

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