Meilleur ouvrier de France : Amandine Leroy, gouvernante d'excellence, "j'ai commencé en bas de l'échelle et j'ai monté les échelons"

C'est une catégorie méconnue du concours du Meilleur ouvrier de France : "gouvernante des services hôteliers". Amandine Leroy, qui exerce dans un établissement de Chantilly, l'a décroché en 2023. Elle nous parle de son métier devenu une passion au fil des années.

Elles ne sont qu'une dizaine en France à avoir décroché le titre de Meilleur ouvrier de France, catégorie "gouvernante des services hôteliers". Un titre qu'Amandine Leroy prend comme une reconnaissance pour un métier encore trop méconnu. "Ça représente l'excellence de mon métier. C'est une fierté. J'ai commencé au plus bas de l'échelle et j'ai monté les échelons".

À 34 ans, Amandine Leroy est actuellement gouvernante générale à l'hôtel Le Grand Pavillon à Chantilly, dans l'Oise. "C'est la maîtresse de maison. Non seulement on est garantes de la propreté d'un établissement, mais on est garantes de l'harmonie entière de l'hôtel. Ça peut passer par la décoration, le choix des fleurs, le choix du mobilier ou le confort. On préconise et notre expertise est vraiment écoutée par nos directions. Je peux vous parler de draps de lit ou d'une nappe de restaurant gastronomique."

De femme de chambre à gouvernante générale

Pourtant, rien ne prédestinait la jeune femme à travailler dans le tourisme. Un bac économie en poche, elle se voyait plutôt éducatrice spécialisée. "Lors d'un job étudiant, j'ai eu la chance de travailler dans la restauration et je me suis dit qu'en fait, il y a plein de choses à faire dans la restauration. Et je me suis inscrite dans une école hôtelière, l'INFA, près de Chantilly. J'ai fait un stage de mise à niveau à l'hôtel Bel Ami, à Paris. Et là, par chance, je suis tombée sur un gouvernant général qui a souhaité me prendre sous son aile. Il m'a fait découvrir les métiers de l'ombre, les métiers des étages et je n'en suis jamais sortie".

Forte de cette expérience, Amandine poursuit dans cette voie. Après l'école hôtelière, elle décroche son premier contrat de gouvernante du soir, là même où elle avait fait son stage. Elle y retrouve son mentor, Maxime Roberton. "Il m'a transmis sa passion et son savoir-faire sans rien me cacher. C'est lui qui m'a transmis son amour du métier réellement". Pour ce premier contrat de manager, elle a sous sa coupe une petite équipe de femmes de chambre. "Je faisais les chambres avec elles sur le service du soir qui s'appelle le service de couverture, se souvient la jeune femme. Le soir, on repasse dans les chambres pour les préparer avant la nuit".

Peu à peu, la gouvernante prend plus de responsabilités. "J'avais une quantité de chambres précise à contrôler avec des clients à gérer aussi bien à l'arrivée qu'au départ". Elle apprend à manager les équipes, se remet sans cesse en question jusqu'au jour où elle accepte un premier poste de gouvernante générale pour l'ouverture de l'hôtel Les Cures marines, en Normandie.

L'apprentissage du luxe

Puis retour à la capitale, cette fois pour l'ouverture de l'hôtel du Rond-Point des Champs-Elysées. "C'était un hôtel chargé d'histoire, avec un service à la française, avec une vraie touche de luxe. Il n'y avait que 36 chambres. C'est là que j'ai vraiment appris les codes du luxe, l'hyper personnalisation aux clients".

Un savoir-faire unique que seuls apportent l'expérience et le travail.

"Le luxe, ce n'est pas tout ce qui brille. C'est faire vivre une expérience au client. C'est comprendre ses attentes et savoir les dépasser."

Amandine Leroy, gouvernante et Meilleur ouvrier de France

"Quand on est gouvernante, on rentre dans l'intimité des gens puisqu'on rentre dans leur chambre. À l'hôtel du Rond-Point, je me rappelle un enfant, je voyais que ses parents allaient acheter des petits biscuits pour son petit déjeuner. Il ne prenait pas notre petit-déjeuner à nous. Le lendemain matin, j'avais repéré leur habitude, on est allé nous-mêmes acheter son petit-déjeuner et on lui a proposé à table. L'enfant et les parents ont trouvé que c'était l'effet waouh ! C'est-à dire qu'on s'est adapté à leur demande sans même qu'ils nous le demandent. Ce sont des petites attentions qui transforment le séjour en effet waouh".

Mais au-delà des sourires, il y a aussi toute une grosse équipe à gérer. Des femmes de chambre, des équipiers, des gouvernantes, des lingers ou encore des gestionnaires de fournisseurs. La gouvernante générale a l'œil partout. "La gouvernante doit être aussi aguerrie en termes de gestion de budget pour pouvoir rentrer dans les objectifs que la direction lance. Le coût dépend de la gamme des hôtels où vous exercez. Moi, j'ai la chance d'avoir travaillé dans des hôtels avec des cibles de clientèle totalement différentes, sur des gammes de linge totalement différentes, qui peuvent aller du simple au double. Plus vous montez en gamme, plus la dépense de linge est importante. Si on part sur du coton peigné égyptien, forcément, vous doublez votre dépense de linge. C’est indéniable. Donc ce sont des budgets qui peuvent monter très haut".

"Je me suis préparée à ce concours un an à l'avance"

C'est sur toutes ces compétences que sont jugées les gouvernantes lors du concours Meilleur ouvrier de France. Lorsqu'elle s'est sentie prête, Amandine Leroy a sauté le pas. "Je me suis préparée à ce concours un an à l'avance. D'un point de vue professionnel, ce sont des années d'acquisitions. On en apprend tous les jours. D'ailleurs, lors de la finale, je me suis retrouvée à gérer une plainte client que j'avais déjà gérée dans mes expériences antérieures."

Les sujets des épreuves reflètent la réalité et l'évolution du métier de gouvernante générale : organisation, gestion d'équipes, projets, planification. Trois jours d'épreuves théoriques et pratiques.

"En ce qui concerne l'apprentissage de la technique, je me suis beaucoup intéressée un an auparavant aux détails des matériaux, le choix du linge, la signification des fleurs. J'ai pu rencontrer la Carsat avec qui j'ai pu travailler sur la bienveillance et le bien-être au travail. Les nouvelles technologies aussi font partie de la préparation. J'avais rencontré un antiquaire à Lamorlaye qui m'avait aidée sur comment savoir détecter l'époque d'un meuble et comment l'entretenir.

"La gouvernante générale doit savoir reconnaître un meuble Louis XV d'un meuble Louis XVI et savoir comment l'entretenir. Ça fait partie de la technicité qui nous est demandée dans l'excellence de notre métier."

Amandine Leroy, gouvernante et Meilleur ouvrier de France

Contrairement aux chefs de cuisine, les gouvernantes sont peu nombreuses et doivent se débrouiller par elles-mêmes pour s'entraîner. "Il faut savoir que contrairement à la cuisine qui est le col bleu blanc rouge le plus connu actuellement, nous, nous ne sommes que dix. C'est une classe assez rare et contrairement aux chefs de cuisine qui sont coachés, suivis avec une préparation millimétrée, nous, les gouvernantes, sommes moins cadrées. Nous devons faire nous-mêmes nos propres recherches et on a l'association des gouvernantes générales de l'hôtellerie en France qui permet aussi de nous aider à rencontrer des partenaires et travailler sur des sujets d'actualité."

Son long travail de préparation lui a permis de passer toutes les épreuves avec succès. Chaque candidat devait par exemple proposer au jury une application liée à un objet connecté permettant de libérer du temps pour le personnel des étages en simplifiant l'exécution de leurs tâches quotidiennes. Amandine a proposé l'utilisation de la réalité augmentée pour former du personnel rapidement sur des sujets précis. Une idée qui a fait mouche.

Pour préparer la finale, elle a pu compter sur David Vrignon, un gouvernant général avec qui elle avait travaillé par le passé. Un soutien précieux qui l'a aidée, sans doute, à transformer l'essai et à décrocher le titre de MOF.

Une excellence à transmettre

"La préparation m'a enrichie d'un point de vue culture générale sur mon métier. J'ai suivi les étapes avec beaucoup de positivité et je me suis dit 'c'est génial ce que je suis en train de vivre', notamment quand j'étais en finale. Et quand j'ai eu le titre, j'ai atteint l'excellence de mon métier".

"C'est un accélérateur de carrière. Ce n'est pas une fin en soi mais un tournant dans une carrière professionnelle et personnelle également."

Amandine Leroy

Le col tricolore ouvre de nouveaux horizons. Amandine a déjà été démarchée par plusieurs hôtels. Elle sait que de nouvelles aventures l'attendent, mais elle se donne le temps de la réflexion. Pour l'heure, elle savoure son titre MOF et compte bien le valoriser. "J'aimerais bien porter l'image du service à la française vers d'autres horizons. En France, on a la chance d'avoir des métiers qui sont valorisés par ce titre, on est vraiment reconnu à l'international. Pour moi, c'est important de porter cette image-là. Quand on est Meilleur ouvrier de France, on a un devoir de transmission".

Sur les sept candidats arrivés en finale, seules deux ont décroché le col tricolore. La deuxième, Marie Favre, exerce à l'hôtel Jiva Hill, à Crozet dans l'Ain.

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