Alors que ses élèves passent leurs examens en ligne, la directrice et des professeurs de l’École supérieure de commerce de Compiègne racontent leur adaptation face aux restrictions sanitaires et l'adoption - enthousiaste - des réseaux sociaux.
Pas d’examens en présentiel cette année à l’ESC, grande école de commerce de l’Oise. Pas de portes ouvertes, non plus. Le déconfinement a commencé, mais les lycées professionnels ne rouvriront au mieux que le 2 juin, les grandes écoles et universités en septembre.
Dans ce contexte, à chaque établissement de s’organiser pour contrôler quand même ses élèves - contrôle continu ou examens à distance - mais aussi attirer et sélectionner de nouveaux inscrits pour la prochaine rentrée.
À l’ESC, le défi est en passe d’être relevé avec succès, grâce aux outils numériques.
"On a bien ramé !"
Depuis le 11 mai et jusqu’au 5 juin, 120 élèves de l’ESC passent leurs examens à distance, par internet, notamment sous forme de QCM à temps limité.
"On a trouvé des logiciels qui passent vite d’une question à l’autre, explique la directrice Odile Gonzalez. Les élèves ne peuvent donc pas aller chercher la réponse ailleurs, ils ne peuvent pas noyer des imprécisions dans une rédaction : ils savent ou ils ne savent pas."
Alors que les partiels de Stratégie d’entreprise, par exemple, comprennent normalement une étude de cas, ce sera cette fois un QCM : "Cette solution est, selon moi, la plus sécurisée", confirme Arnaud Decourcelle, professeur de cette matière. "Tout est prêt de mon côté pour lancer l’épreuve en ligne de 3h top chrono !", trépigne pour sa part un professeur de Management des organisations, Stéphane Sueur.
Pour trouver les outils numériques adéquats, "On a bien ramé !", concède avec humour Odile Gonzalez, "mais on est très agile." Les plus jeunes enseignants et ceux travaillant en plus à l’Université de Reims ou à l’UTC de Compiègne - qui pratiquent aussi l’examen à distance - ont partagé leurs retours d’expérience.
Concrètement, tous les élèves sont invités à se connecter sur une plateforme en ligne, un quart d’heure avant l’examen. "Une fois, un jeune avait du mal à se connecter, on l’a appelé et on y est arrivé", raconte la directrice, satisfaite de n’avoir connu que "des petits bugs" : "Une fois, il nous a manqué une copie, le jeune avait du mal à se connecter parce que c’était trop lourd ou bien le réseau ne passait pas, mais il a pu prouver qu’il avait essayé dans les temps."
Alors que l’organisme chargé des TOEIC, les célèbres tests de maîtrise de la langue anglaise, oblige les candidats à placer une caméra derrière eux pour vérifier qu’ils ne regardent pas un dictionnaire, l’ESC n’a rien prévu de tel. La bienveillance semble de mise.
"Pas de crainte" pour la valeur des diplômes
Dans tous les établissements, à tous les niveaux, les concours et examens de 2020 ne ressemblent à aucun autre. Alors un soupçon pèsera-t-il sur ce millésime ? Les recruteurs penseront-ils que les diplômes ont été donnés et ne valent pas autant que d’habitude ? Odile Gonzalez n’a pas cette crainte.
"Non, pas chez nous, affirme-t-elle. Les professeurs ont fait cours à distance et savent très bien si les compétences sont acquises ou non. Nos jeunes sont tous en alternance, les recruteurs les suivent et 30% des Master ont déjà une promesse d’embauche : ça prouve qu’ils n’ont pas peur de leur valeur."
En revanche, la valeur du Bac pose question. "C’est plutôt nous qui avons peur pour la rentrée, avec les petits Terminales, parce qu’une partie du programme n’a pas été approfondie, confie la directrice de l’ESC. Il y aura peut-être des révisions et du travail individuel à demander."
La directrice en direct sur Instagram
Il n’y a pas de concours écrit pour entrer à l’ESC. Les sessions d’admission se font à l’oral. Et pour les Licences et Masters, c’est la directrice elle-même qui mène les entretiens cette année… par Skype.
L’école a bien entamé sa mutation numérique. Elle a même investi l’un des réseaux sociaux les plus populaires dans la jeunesse : Instagram. Le compte de l’école existe depuis 5 ans, mais désormais, "On est hyper actif sur Insta !", se réjouit la directrice.
Cette dernière a fait ses armes sur un autre réseau. "J’ai fait un Facebook Live il y a un mois et ça a bien fonctionné, raconte-t-elle. Je pense qu’on va en refaire après l’épidémie, parce que c’est un moyen hyper adapté aux jeunes, c’est moins formel, c’est bien !"
À partir de cette semaine, pour compenser l'annulation des portes ouvertes, c'est sur Instagram qu'Odile Gonzalez donne rendez-vous aux jeunes intéressés par l'ESC. Lors de quatre soirées (mardi-mercredi et à nouveau la semaine prochaine), à 18h, elle sera en direct sur la page de l’école pour présenter une filière de formation et répondre en temps réel aux questions.
Plus globalement, plusieurs enseignants dressent un bilan très positif de la numérisation des cours eux-même, pendant le confinement.
"Les exercices pratiques en groupe fonctionnent très bien à distance, affirme Pierre Delorme, professeur en Banque et analyse financière. C’est vraiment chouette, tout le monde joue le jeu. [C’est] une opportunité pour ces futurs managers. Demain, en entreprise, la plupart d’entre eux seront certainement amenés à utiliser des outils de travail collaboratif."
"Lorsque la continuité pédagogique à distance a été annoncée (...), je me suis empressée de repenser mes cours (...), j’ai coaché les étudiants en amont en leur expliquant le fonctionnement de la plateforme et les règles à suivre (...) et ils ont été vraiment super !", raconte Carine Niez, professeur de Développement commercial et gestion de la relation clients. Elle ajoute que l’effort d’adaptation de son "discours" et de son "rythme" lui ont apporté "de nouvelles compétences et ouvre d’autres opportunités pour le futur".