Une cantine, attendue depuis plusieurs années dans un collège, va enfin voir le jour : "c’est un soulagement pour les familles"

Depuis des décennies, le collège Jacques Monod à Compiègne n'a pas de cantine, poussant ainsi l'établissement, les parents d'élèves et les collégiens à trouver des plans B. Mais l'annonce d'une cantine sortie de terre en 2026 redonne de l'espoir... même si elle se situera à 5 minutes à pied.

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À l'ordre du jour du conseil départemental de l'Oise : la création d'une demi-pension au collège Jacques Monod.

Lundi 15 mai, corps enseignant, parents d'élèves et personnels de l'Éducation nationale sont présents pour faire le point sur ce projet qui galvanise les esprits depuis "plusieurs décennies". 

Une société en évolution

Nadège Lefebvre, la présidente du département de l'Oise, explique que l'absence d'une cantine au sein de cet établissement est historiquement situé. "C'est un collège au centre-ville de Compiègne, dans une zone très urbanisée et, à l'époque, lorsqu'il a été construit, la cantine ne se se posait pas parce que sûrement, les enfants rentraient manger chez eux."

Au fil du temps, la société a changé, évolué : "les gens travaillent, n'ont pas toujours tout au pas de leur porte et ils ont besoin de mettre leurs enfants dans une cantine."

L'analyse est partagée par Laurent Béchir, représentant des parents d'élèves, qui note que 30 à 40 ans auparavant, il y avait "beaucoup de mères au foyer qui accueillaient leurs enfants le midi, ce n'est plus le cas aujourd'hui."

De longues procédures 

Mais pourquoi faut-il autant de temps pour qu'une cantine sorte de terre ? Depuis 2020, les comités d'intérêts locaux de quartiers (Veneurs, Saint-Lazare, Les Avenues, Les Sablons et Hauts Sablons) avaient déjà suggéré "le manège des Grands Écuries du Roi, jouxtant le collège" qui "serait le lieu propice pour la réalisation de cette cantine."

D'autant plus que l'emplacement permettrait "aux élèves de rester dans l'enceinte du collège" sans pour autant ne pas prendre en compte "la dimension historique du lieu et en maintenant un espace important pour les chevaux" : soit  500m2 nécessaires sur plus de 4 500 m2 de terrain.

Néanmoins, l'idée n'a pas été reprise. Alors les recherches se sont poursuivies du côté du service urbanisme de la Ville. Il a fallu "convaincre l'OPAC (office public de l'habitat) de céder au Département une partie de ce site pour la réalisation de ce projet", explique Benjamin Oury, élu à l'urbanisme. Il y a eu alors des "discussions entre l'OPAC, le Département" et la ville de Compiègne les a accompagnés. 

Ils ont ensuite demandé aux architectes des bâtiments de France de les accompagner pour visiter le site en question. Le projet leur a été présenté avant qu'ils ne donnent leur avis favorable de principe. L'architecte en question "a d'ailleurs suggéré d'essayer de conserver au maximum le bâtiment existant, le réhabiliter, quitte à faire une extension pour avoir la capacité suffisante". 

Ensuite, le document d'urbanisme du projet a été mis en ligne, le PLU (plan local d'urbanisme) a été modifié de telle sorte à "ce qu'on puisse accueillir un équipement en intérêt collectif sur ce site-là", puisque la zone ne le permettait pas au départ. 

C’est un projet qui prend 3 ans parce qu’il y a des délais administratifs incompressibles d'un point de vue réglementaire. Il y a aussi un permis de construire à déposer qui prend un certain temps compte tenu de l’environnement, puisqu’on est dans des espaces protégés. La dernière chose, c’est qu’il y a le délai de construction qui, lui aussi, prend un an, voire plus d’un an aujourd’hui.

Benjamin Oury, élu à l'Urbanisme de la ville de Compiègne

Cette nouvelle cantine se trouvera rue de Lancry, près de la villa Marcot, un ancien internat en cours de réhabilitation, où se trouve déjà une annexe du collège avec des salles de technologie et un logement de fonction au fond de la cour. L'opération coûtera, selon la présidente du Département, 4,1 millions d'euros. 

Des solutions intermédiaires

À cinq minutes à pied de cette future cantine, devant le collège Jacques Monod, son directeur, Pierre Kabisso, admet qu'il s'agit d'une situation "compliquée" qui oblige à trouver des "solutions intermédiaires". Parmi elles, un collège public, non loin de Jean Rostand, où une trentaine de collégiens, accompagnés par deux assistants d'éducation, ont une cantine où manger. 

Une autre partie des élèves, "à peu près 80", selon le directeur, va manger chez les Sœurs Franciscaines qui disposent de trois salles. Néanmoins, les repas sont à 7 euros, et tout le monde ne peut pas se le permettre financièrement. Ce qui creuse les inégalités sociales entre les collégiens.

Sœur Jeanne Marie admet que l'accueil de ces élèves permet avant tout d'avoir une rentrée d'argent, même si elle se réjouit de voir des jeunes "dans un autre cadre que celui de l'enseignement". 

Tout est plein. On ne peut pas se permettre de faire 36 services, on a aussi notre vie religieuse à côté, donc on ne fait pas que ça. Ce n’est pas notre métier d’être restauratrice.

Soeur Jeanne Marie

Laila, mère de famille inquiète, a été forcée d'acheter un téléphone à son fils pour rester en contact avec lui quand il mange en dehors du collège, en l'occurrence chez les religieuses. Elle se réjouit toutefois de la perspective prochaine d'une nouvelle cantine.

Tous les autres élèves - 270 en tout - sont lâchés dans la nature, sans solution. Certains rentrent manger chez eux "et comme nous avons une pause méridienne qui est d'une heure et demie, ça leur laisse le temps de rentrer, manger et revenir". Mais la situation se complique davantage pour les collégiens dans des familles monoparentales, quand les deux travaillent, ou pour ceux qui habitent trop loin de l'établissement pour faire l'aller-retour. 

Le corps enseignant n'est pas en reste

Et même si les élèves semblent être les premiers concernés, les professeurs, eux aussi, ont leur mot à dire. Au collège Jacques Monod, les enseignants n'ont pas non plus où manger, à part dans la salle des profs. "L'espace est restreint, la majorité rentre manger à la maison, mais sinon, on ramène de petites gamelles", lance Nathalie Hubert, professeur d'anglais.

Une autre précise qu'à "l'étage, il y a une salle avec un réfrigérateur", mais aussi deux micro-ondes, dont l'un est tombé en panne. "Là où il y a le micro-ondes, c'est la salle de reprographie", renchérit Nathalie Hubert. S'y installer, "c'est risquer de tacher les documents pour les élèves, donc ça fait un moment qu'on vient dans cette salle-là qui est un peu plus chaude et chaleureuse". Cela limite aussi les risques de salir le matériel pédagogique. 

Mais la nouvelle d'une cantine qui ouvrirait en 2026 est venue comme "un soulagement". Nathalie Hubert voit en cela "un espoir pour la continuité du beau travail qui se fait ici. Donc, on est ravis et c’est un gros soulagement pour les parents et les familles qui mettent leurs enfants ici".

Il y avait une une réelle inquiétude au sein de la communauté éducative sur l’avenir de notre collège. Et on se dit qu’enfin, on s’occupe de nous.

Nathalie Hubert, professeure d'anglais

Une baisse d'attractivité

Mais ces solutions provisoires ne sont pas suffisantes. La preuve : plus de 270 élèves continuent de manger dehors, dans le centre-ville, ou à la maison. Certains parents préfèrent même inscrire leurs enfants ailleurs.

Malgré tout, Pierre Kabisso reste optimiste. Une fois que ce problème sera réglé, le collège Jacques Monod "va reprendre la place qu'il occupait depuis plusieurs années". Il précise quand même que son établissement n'a rien perdu de sa splendeur : "le collège Jacques Monod a une bonne réputation, car les enseignants et les représentants des parents d'élèves sont très engagés". 

Comme ça fait longtemps, les parents ont pris l’habitude. Il n’y a pas trop de plaintes. Maintenant qu’ils savent qu’il y a une solution pérenne qui va se mettre en place et une solution intermédiaire qu’on est en train de mettre en place.

Pierre Kabisso, directeur du collège Jacques Monod à Compiègne

En attendant que la solution pérenne arrive - c'est-à-dire la mise en place d'une cantine au sein de l'établissement - le directeur affirme multiplier les efforts. Il a négocié avec le lycée Gaëtan Denain pour augmenter le nombre de places réservées à ses élèves. "On va passer à 50 places", contre 30 actuellement. 

L'établissement veut aussi augmenter l'effectif d'élèves qui pourront manger chez les Soeurs "avec une discussion avec la mairie" qui tentera d'aider "certaines familles" qui n'ont pas les moyens de mettre autant d'argent dans un repas tous les jours. "On va essayer de faire ça en attendant que la cantine soit construite", assure-t-il.

Depuis la nouvelle d'une future cantine, Pierre Kabisso note avoir reçu des appels de parents qui seraient prêts à inscrire leurs enfants dans son établissement : "maintenant qu'il n'y a plus ce problème-là", lance-t-il, convaincu. 

Certains auraient même demandé à être demi-pensionnaires à la rentrée. Mais le problème est-il réglé pour autant ? Il reste encore des négociations à faire d'ici l'ouverture de la cantine en 2026 pour satisfaire les estomacs de tout le monde... sans trop s'éloigner du collège. 

Avec Mohamed Errami / FTV

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