La question du port de l'uniforme est revenue sur le devant de la scène médiatique depuis que Brigitte Macron s'y est dite favorable. Plusieurs syndicats s'y opposent, estimant que ce n'est pas la solution pour réduire les inégalités en milieu scolaire.
Des élèves tout en bleu, arborant le logo de leur école sur leurs vêtements : c'est devenu le quotidien à l'institution Sévigné de Compiègne. Depuis 2018, les élèves de cet établissement privé catholique doivent porter une tenue règlementaire, qu'Erick Ducrocq, le chef d'établissement, refuse d'appeler un uniforme : "Les footballeurs, les avocats ou les bouchers n'ont pas un uniforme, ils ont une tenue pour aller travailler : et bien là, c'est la même chose."
"Ça élimine les marqueurs sociaux"
Au début de leur scolarité, leurs parents doivent débourser une centaine d'euros pour un "trousseau" dans lequel les enfants devront piocher chaque matin pour choisir leur tenue. Pour le bas, c'est pantalon foncé obligatoire. "C'est pratique, il n'y a pas de prise de tête le matin, même s'il y a une grosse exigence du personnel de l'établissement, explique Charline, élève de terminale. [...] Parfois, on arrive avec un jean un chouïa trop clair, et on se fait reprendre."
Une contrainte qui ne semble pas déranger les élèves outre mesure. "On est tous pareils, ça évite le harcèlement", estime l'adolescente. Marisa Ducrocq-Luis, professeure d'espagnol, partage cet avis : "Ça élimine les marqueurs sociaux, et ils sont tout de suite dans le travail, ils ne regardent pas le voisin, s'il a un pantalon ou des chaussures de marque."
Un moyen de se fondre dans la masse au sein de l'établissement, mais de se distinguer à l'extérieur. Lorsqu'on demande à Charline si elle est fière de porter cette tenue dans la rue, elle n'hésite pas une seconde : "Ah, oui !", répond-elle avec enthousiasme. "Il faut être encore plus exigeant en dehors de l'établissement pour faire attention à l'image qu'on renvoie de Sévigné", dit-elle.
L'argument est d'ailleurs repris dans les brochures promotionnelles de l'école : "chaque élève peut être fier de revêtir sa tenue, il fait ainsi rayonner son établissement et ses valeurs", peut-on lire sur le site internet.
"Lutter contre les inégalités plutôt que les invisibiliser"
Pour la plupart des syndicats d'enseignants, l'argument de l'égalité ne tient pas la route. "Tous les discours qui visent à dire que l'uniforme va favoriser l'égalité masquent les vraies solutions, estime Rémi Baudry, représentant du syndicat Sud éducation Somme, invité sur le plateau de France 3 Picardie. La vraie solution pour plus d'égalité, c'est plus de moyens. C'est avoir plus de professeurs face aux élèves, c'est mettre tous les moyens pour les personnes en situation de handicap."
Même son de cloche du côté du Snuipp-FSU. "Il faut lutter contre les inégalités au lieu de vouloir les invisibiliser", a déclaré Guislaine David, la porte-parole et co-secrétaire, sur France Info.
Ce sujet est surtout là pour faire diversion.
Rémi Baudry, Sud Éducation Somme
Rémi Baudry estime par ailleurs que les débats sur l'uniforme n'ont pas lieu d'être aujourd'hui. "142 postes vont disparaître en 2023 sur l'académie d'Amiens, dans le primaire comme dans le secondaire. On parle du port de l'uniforme alors qu'il y a la baisse des moyens, la réforme des retraites qui arrive, et c'est de ça dont on discute dans les salles de profs", affirme-t-il.
À noter que si la Première dame s'est dite favorable à la généralisation du port de l'uniforme, le ministre de l'Éducation nationale Pap Ndiaye a réaffirmé récemment que le gouvernement y était opposé.