Une femelle hibou grand-duc, soignée depuis mai par l'association Picardie Faune Sauvage, a été relâchée samedi 13 janvier 2024 sur la base aérienne de Creil (Oise) avec laquelle la Ligue pour la protection des oiseaux du département a noué une convention. Une première qui inaugure ce nouveau partenariat.
En quelques secondes, la porte de sa caisse à peine ouverte, le grand rapace de deux mètres d'envergure pour trois kilos prend son envol. Cette femelle hibou grand-duc a été retrouvée blessée le 6 mai 2023 dans le Nord de la France. Elle est âgée d'au moins deux ans.
Huit mois en centre de soins
Sérieusement blessée, elle a passé huit mois au centre de soins de l'association Picardie Faune Sauvage avant d'être relâchée samedi 13 janvier. "On l'a retrouvée dans un état un peu alarmant parce qu'elle avait un œil abîmé, un côté qui était très enflé. On pense à un choc avec un véhicule, mais ce n'est pas certain", explique Christophe Rousseau, le président de l'association.
"Elle était très affaiblie. Au début, on a eu du mal à la remonter parce qu'elle restait au sol, prostrée, très longtemps. Il y a eu pas mal de soins derrière. Mais elle se battait quand même", poursuit Christophe Rousseau. "Depuis quelques semaines, elle est particulièrement sauvage, donc on a trouvé que c'était le bon moment pour la relâcher."
Un rapace rare dans les Hauts-de-France
C'est la première fois que l'association recueille un hibou grand-duc au centre de soins. Le rapace est assez rare dans la région, même s'il y est observé plus souvent ces dernières années. Historiquement, il niche plutôt sur des plateaux rocheux. Mais les ornithologues observent qu'il niche parfois pratiquement à terre, notamment en Finlande et en Sibérie.
"Il s'adapte beaucoup plus à l'absence de l'homme que simplement à un milieu en particulier. On peut très bien en trouver en forêt de résineux comme de feuillus", observe Christophe Cadé, porte-parole de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) de l'Oise.
La base aérienne de Creil : un endroit propice
La base aérienne de Creil, d'une surface de 450 hectares, où le hibou a été relâché samedi, est située en plein milieu de la forêt d'Halatte et du parc naturel régional des Hauts-de-France.
On a des résineux, des grandes forêts et des grandes plaines où il va pouvoir chasser. Il va pouvoir capturer ses proies très facilement
Christophe Cadé, porte-parole de la LPO de l'Oise
Le hibou grand-duc se nourrit principalement de rongeurs (rats, souris, campagnols). La base aérienne est donc propice, car appropriée en termes de proies potentielles. Et l'heure du relâcher, 16h30, n'est pas anodine. "C'est à la tombée de la nuit et au lever du soleil que sa force de frappe va être la plus efficace", rappelle le porte-parole de la LPO. "80% de sa tactique de chasse va reposer sur sa capacité à entendre les sons, 19% sur la vue et 1% sur l'odorat", précise Christophe Cadé.
Un partenariat pour développer la biodiversité
Depuis 2016, plus aucun avion ne décolle de la base aérienne de Creil qui compte 2 000 militaires. Sa mission principale est de permettre des activités de renseignement. Fin décembre 2023, elle a signé un partenariat avec la LPO.
"On a à cœur de défendre notre biodiversité. Le ministère des Armées est quasiment le premier propriétaire terrien de l'État, avec d’énormes installations, pas forcément occupées ou utilisées de façon permanente. Donc, on a un développement naturel qui s’y passe et on essaie de mener des actions pour développer cette biodiversité", expose le colonel David Sécher, responsable de la base aérienne de Creil.
Ce hibou grand-duc est le premier animal à être relâché à Creil. Le colonel espère que cela va donner des idées à d'autres bases aériennes. "C'est une nouvelle étape dans nos projets pour le développement durable et la biodiversité", se réjouit-il.
Pour Picardie Faune Sauvage, ce relâcher est la consécration d'un travail de longue haleine. "C'est le meilleur moment", confie, ému, Christophe Rousseau. À l'avenir, le rapace devrait rester à proximité de la base aérienne de Creil, dans un rayon de 5 à 7 kilomètres, en toute quiétude.
Avec Lucie Cailleret / FTV