Suspendue pour avoir refusé de porter son masque en classe, l'enseignante de Gouvieux donne sa démission pour la fin de l'année scolaire, le Rectorat l'accepte avec effet immédiat

Suspendue depuis le 9 novembre parce qu'elle ne voulait pas porter un masque en classe, Anne-Claire Rossignol, professeure de français au collègue de Gouvieux dans l'Oise, a démissionné début janvier. Selon l'enseignante, qui est vaccinée, cette obligation gênait la dispense de ses cours.

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Elle était suspendue depuis le 9 novembre dernier au motif qu'elle refusait de porter son masque dans sa classe du collège de Gouvieux dans l'Oise. Anne-Claire Rossignol, professeure de français depuis 1999, a démissionné début janvier.

Mais selon les dires de l'enseignante en poste à Gouvieux depuis 2014, les choses ne sont pas si simples. L'affaire commence le 8 novembre 2021. Anne-Claire Rossignol décide d'enlever son masque en classe pour garantir la bonne qualité de son enseignement mais dans un contexte bien précis : "Je suis vaccinée, je n'ai jamais enlevé mon masque à proximité des élèves, je l'ai fait dans une salle où j'ai aménagé un espace pour être loin d'eux, à plus de 2 mètres, portes et fenêtres ouvertes. Je ne remets pas en cause le protocole sanitaire, je l'ai enlevé dans des conditions très particulières", nous précisait-elle le 16 novembre dernier.

La veille de cet entretien, la professeure avait été reçue par le DRH de l'Académie d'Amiens. "On m'a écoutée. Mais rien de fructueux n'est sorti de cette entrevue. Le débat sur comment aménager l'enseignement en masque n'a jamais eu lieu. Les élèves et leur santé psychique, la qualité de l'enseignement en temps de pandémie n'ont pas l'air d'être des sujets dignes d'intérêt. Ce n'était pas ce dont il fallait parler à ce moment-là. Ce n'était pas la priorité."

Rejet de sa demande de recours gracieux

"J'ai appris le 13 décembre par courrier que j'allais passer en conseil de discipline le 26 janvier. J'ai préparé mon dossier de défense que j'ai envoyé début janvier. Dans ce dossier, j'ai expliqué que j'allais partir mais que, pour le bien de mes élèves, je voulais finir l'année scolaire aux conditions imposées. J'y pensais déjà depuis un moment. J'ai essayé d'avoir quelqu'un au rectorat pour en discuter mais personne ne m'a jamais prise au téléphone. Mais j'étais prête à porter un masque en cours jusqu'à mon départ."

Une décision prise après le rejet de sa demande de recours gracieux le 13 décembre également. Anne-Claire Rossignol avait en effet soulevé des incohérences dans le fait que "le port du masque est une obligation professionnelle des agents de l'Éducation nationale dans le cadre de la gestion de la pandémie de Covid 19". Et de préciser : "le protocole 2021 ne mentionne pas “port du masque en présence des élèves” (ce qu'on me reproche), le Haut conseil de la santé publique me donne raison et le Conseil d'état précise que le protocole est un guide de bonne conduite et non une loi.

Convocation en conseil de discipline

Mais sa demande est rejetée. Et Anne-Claire Rossignol est convoquée en conseil de discipline : on lui reproche le non-respect du port du masque et "un manquement à mes obligations professionnelles avec comme précision entre parenthèses vidéos, presse", précise-t-elle. Elle a deux semaines pour préparer sa défense.

"Le 4 janvier, j'envoie ma défense ainsi qu'une lettre dans laquelle je m'engage à porter le masque jusqu'à juin pour revenir finir l'année avec mes élèves, et une autre dans laquelle je demande l'acceptation de ma démission pour la fin d'année scolaire ou quand ils le souhaitent, ne sachant pas si je peux fixer une date moi-même. Il faut savoir qu'un fonctionnaire n'a pas droit à la démission, c'est selon l'acceptation de l'administration. Elle a 4 mois pour accepter. Si ce délai passe sans réponse de l'administration, il faut faire une nouvelle demande. Et c'est reparti pour 4 mois. J'avais peur de retomber dans des choses juridiques et que ça dure."

Le 21 janvier, le couperet tombe : Anne-Claire Rossignol est informée par recommandé que la procédure disciplinaire à son encontre est abandonnée et que sa démission est acceptée sans délai, "à ma grande surprise alors qu'on manque de profs".

"Son choix"

Une démission confirmée par les services de l'académie d'Amiens : "le 4 janvier, Mme Rossignol a adressé au recteur une lettre de démission. Celle-ci a été acceptée avec notification en date du 21 janvier. Du fait de sa démission, la procédure disciplinaire engagée à son encontre a été abandonnée."

[Mise à jour du 28/01/22 : Dans un entretien avec nos équipes, le recteur de l'Académie d'Amiens est revenu sur cette décision. "Elle a souhaité nous adresser cette lettre de démission, expose Raphaël Muller. C’est son choix. [...] À partir du moment où elle a souhaité démissionner, [notre choix] a été de l’accepter à une date rapprochée."

Sur le port du masque en classe, il tient à souligner que ce refus serait un cas isolé parmi les 25.000 professeurs du territoire. "Il y a des protocoles sanitaires, insiste Raphaël Muller. On sait que c’est une contrainte pour les enseignants, particulièrement en ce moment. On sait aussi que c’est grâce à ça qu’on a pu garder les écoles ouvertes."]

"Atteinte à ma dignité"

Anne-Claire Rossignol redit sa volonté de démissionner à terme de l'Éducation nationale : "au-delà de mes convictions sur le fait que le port du masque est néfaste pour les élèves et pour leurs apprentissages, je ne pouvais pas rester vu la façon dont on m'a traitée : avant d'enlever mon masque devant les élèves, j'avais alerté par écrit ma hiérarchie sur les difficultés d'enseigner avec un tel protocole sanitaire. Personne n'a bougé. Et quand j'ai enlevé mon masque en classe le 9 novembre, on m'a sortie de ma salle devant tout le monde. J'ai pris ça comme une atteinte à ma dignité."

Désormais libérée de ses obligations professionnelles, cette mère de trois enfants va "se poser un peu". Passionnée de mythologie mésopotamienne, elle envisage l'écriture de contes sur le sujet. Elle espère également revenir à l'enseignement mais autrement "parce qu'enseigner, c'est toute ma vie".

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