Pour la première fois de sa scolarité, Gabriel, 15 ans, n’a pas pu bénéficier d’un accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH) pour son entrée en seconde. Une absence dénoncée par sa maman, qui souhaite alerter sur la situation. Pour son fils, mais aussi pour tous les laissés pour compte dont l'accompagnement se fait au détriment d'un autre.
“Mon fils est autiste Asperger, comme Paul El Kharrat”, résume Stéphanie Jablonski-Marlière, la maman de Gabriel, 15 ans, originaires de Gravelle, dans le Pas-de-Calais. Il a un langage élaboré, une aisance dans les calculs et une grande intelligence. Il est aussi perfectionniste, peut facilement s’éparpiller et a peur de l’inconnu.
Porteur d’un trouble du Spectre Autistique (TSA) asperger et de dysgraphie sévère, il bénéficie depuis la 4e d’un Matériel Pédagogique Adapté (MPA), c’est-à-dire d’un ordinateur, et depuis la moyenne section d’une aide humaine via un accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH). Le tout afin de l’accompagner dans le suivi de sa scolarité en milieu normal.
Mais en septembre, Stéphanie Jablonski-Marlière a été prévenue que son fils, élève en seconde Générale et Technologique depuis septembre, n’aurait plus d’AESH à ses côtés, faute de moyen. En cause ? Une décision qui a baissé les aides humaines octroyées au Lycée Guy Mollet d’Arras de cinq à deux personnes. “L’établissement est aussi démuni que moi. Il doit déshabiller Paul pour habiller Jacques, c’est schématique”, déplore-t-elle.
Un guide essentiel
La notification d’aide mutualisée a pourtant été accordée en faveur de Gabriel par la MDPH et lui permet, logiquement, d’être accompagné à mi-temps par une personne. Un guide essentiel dans la scolarité de l’adolescent. “On l’aide à reformuler, à se canaliser, à comprendre correctement une consigne, à l’aider dans son organisation pour renommer les fichiers et les ranger correctement…”, énumère Stéphanie Jablonski-Marlière.
À la rentrée, lorsqu’elle a appris la mauvaise nouvelle, la maman a alerté à plusieurs échelles. Courrier à la rectrice et au président de la Région Hauts-de-France Xavier Bertrand, appels au service de gestion et de recrutement des AESH (SAGERE)... “J’ai tapé à toutes les portes”, raconte Stéphanie Jablonski-Marlière.
On l’aide à reformuler, à se canaliser, à comprendre correctement une consigne, à l’aider dans son organisation pour renommer les fichiers et les ranger correctement…
Stéphanie Jablonski-Marlièremaman de Gabriel
Le lycée arrageois, qui compte 2 000 élèves, ainsi que l’Association des Parents d’Élèves (APE), sont particulièrement présents pour la famille : “Les dirigeants du lycée font en sorte de pallier du mieux qu'ils peuvent ce manque cruel, tient à souligner la cadre de santé.
À force d’avoir “tapé du poing sur la table”, Gabriel est passé d’aucune aide en septembre à 2 heures à la fin du mois, pour atteindre actuellement 8 heures par semaine. Soit la moitié de ce qu’il devrait avoir. Il est tout de même passé d’une première note d’1,5/20 à 15/20 à la dernière.
Le jeu des chaises musicales
“Le lycée a fait avec les moyens et je l’en remercie. Mais ça s’est obligatoirement fait aux dépens de quelqu’un d’autre”, regrette la maman de 56 ans, prête à endosser le rôle de porte-parole pour d’autres élèves, car “les personnes qui remuent ciel et terre auront quelque chose, les autres n’auront rien”, déplore-t-elle. Elle se dit “angoissée” par la pénurie de ces “petites mamans”, dont les raisons sont profondes.
Les personnes en situation de handicap peuvent aller beaucoup plus loin si on leur en donne les moyens.
Stéphanie Jablonski-Marlièremaman de Gabriel
Outre le fait de maintenir des notes à la hauteur de ses capacités, sa maman aimerait que Gabriel puisse obtenir son bac - et le passer dans de bonnes conditions. Car contrairement à ce que ce type de décision laisse à penser, avec des AESH davantage octroyées en primaire que dans le secondaire, “les personnes en situation de handicap peuvent aller beaucoup plus loin si on leur en donne les moyens.”
Stéphanie Jablonski-Marlière a souhaité écrire au ministère de l’Éducation nationale, avant de se raviser après le changement de gouvernement. Mais elle prévoit d’ores et déjà de le faire l’année prochaine. “Je sais que je devrai encore me battre. Et je le ferai car quand on a un enfant en situation de handicap, c’est un continuel combat”, assène-t-elle, toutefois “usée”. Malgré tout, c’est encore à son fils qu’elle pense avec inquiétude. “Dans ces conditions, qu’est-ce que l’avenir pour ces gamins ?”, s’enquiert-elle.