Il y a deux mois, une petite commune de l'Arrageois apprenait que ses trois médecins allaient prendre leur retraite le même jour, le 31 octobre 2024. Si cela avait été anticipé par l'un d'entre eux, la mairie et les habitants restent sous le choc du départ précipité des deux autres. Bucquoy cherche désormais des médecins, désespérément.
En cette journée d'Halloween, le matériel médical qui trône dans les bennes à ordure de la maison médicale de Bucquoy, prend des airs d'épouvante. Ce 31 octobre 2024, les docteurs Legrand et le docteur Déplanque, les trois médecins de ce petit bourg de l'Arrageois, ont officiellement pris leur retraite. Derrière les grilles vertes du centre médical, les généralistes ont fait des allers-retours toute la journée pour vider leur cabinet, sous le regard des habitants venus voir de leurs propres yeux le départ de leurs praticiens. Comme pour vérifier l'inéluctable.
Ce départ laisse un goût amer à leurs concitoyens ; beaucoup reprochent aux docteurs Legrand d'avoir pris cette décision précipitamment, sans laisser à leur patientèle le temps de rebondir. "Nos trois médecins qui s'en vont comme ça, c'est stressant", relate Françoise, venue renouveler ses médicaments une dernière fois, en prévision. "Jusqu'à présent je devais faire 5km pour me faire soigner, là je devrai en faire au moins 15." Car dans cette zone rurale, les médecins qui acceptent de nouveaux patients sont rares.
Jusqu'à présent je devais faire 5km pour me faire soigner, là je devrai en faire au moins 15.
Françoise, habitante de Bucquoy
En colère, cette autre habitante se sent trahie par les praticiens qui "ont lâché tout le monde d'un seul coup, sans trouver de remplaçant". "On avait juste à prendre un rendez-vous le matin pour l'après-midi. Maintenant je suis inquiète car pour aller ailleurs, il faudra prendre la voiture sur des petites routes."
Une question épineuse qui revient sur les lèvres de tous les habitants et qui, pour l'instant n'a pas encore trouvé de réponse.
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L'espoir de trouver des remplaçants
Pourtant, Anne-Marie Barbier, maire de Bucquoy, n'a pas chômé. Remontée contre les médecins pendant un temps, l'élue se veut aujourd'hui plus apaisée et surtout, déterminée à avancer dans ce dossier très concernant pour ses administrés. "J'y pense tous les jours", livre la maire qui redouble d'efforts pour attirer de nouveaux médecins, allant jusqu'à proposer de délester tout jeune docteur qui s'installerait dans la commune de son loyer pendant deux ans. Mais pour l'instant, les nouvelles sont maigres.
"On a eu des retours mais de médecins qui sont de l'étranger, qui n'ont pas encore les autorisations pour exercer sur notre territoire", explique Anne-Marie Barbier. "On a joué sur l'attractivité de notre village avec un échantillon de professionnels de santé et un maillage de commerces. Je ne m'explique pas trop pourquoi de jeunes médecins n'arrivent pas."
On a joué sur l'attractivité de notre village (...) Je ne m'explique pas trop pourquoi de jeunes médecins n'arrivent pas.
Anne-Marie Barbier, maire de Bucquoy
Des solutions éphémères
En attendant, Bucquoy reste un bourg dénué de généralistes. Les plus proches, à Bapaume et Bienvilliers-au-Bois, ont un carnet d'adresses déjà plein. Un jeune médecin installé à Tilloy-les-Mofflaines a cependant proposé à la commune voisine de prendre quelques patients ayant besoin de rendez-vous réguliers.
Une autre solution : la téléconsultation. Un espace dédié à ces rendez-vous assurés par des médecins à distance, a ouvert à l'arrière de la pharmacie Roche. Une solution éphémère, que les habitants acceptent à contrecœur, en attendant de trouver mieux. "Je ne suis pas très fervent de ça, ce n'est qu'une cabine avec un branchement et une personne en virtuel", fait savoir un habitant, sceptique.
Ça faisait 30 ans que j'avais le même docteur, j'ai remué ciel et terre. Mais pour l'instant je n'ai trouvé que ça.
Josée, habitante de Bucquoy
Plus modérée, Josée voit ce système d'un bon œil, mais n'est pas sûre de sauter le pas. "La téléconsultation je ne sais pas ce que ça vaut, je n'ai jamais essayé. Mais il me faut bien un médecin." La retraitée envisage d'utiliser l'espace de téléconsultation "en cas de petit bobo", souhaitant plutôt s'informer auprès de la pharmacie en cas de besoin, même s'ils ne peuvent pas remplacer le savoir d'un médecin généraliste. "Ça faisait 30 ans que j'avais le même docteur. J'ai remué ciel et terre. Mais pour l'instant je n'ai trouvé que ça."