Le Béthunois Félix Dorfin condamné à mort pour trafic de drogue en Indonésie : ce qu'il faut savoir

Le Béthunois a été condamné ce lundi matin à la peine capitale, alors que le parquet avait requis 20 ans de prison.

Félix Dorfin se trouve désormais dans le couloir de la mort. Le Béthunois de 35 ans, arrêté en septembre dernier à l'aéroport de Lombok en possession de 4 kg de drogues (cocaïne, ecstasy, amphétamines...), a été condamné ce lundi matin à la peine capitale par la justice indonésienne
 
Le parquet avait d'abord requis une peine de 20 ans de prison doublée d'une amende de 10 milliards de roupies (700 000 dollars) à l'encontre du Nordiste, mais dans ce pays qui compte l'une des législations anti-stupéfiants les plus strictes au monde, il est fréquent que le juge aille au-delà des réquisitions.
 


 

Qui est Felix Dorfin ?

On sait très peu de choses sur le Français de 35 ans, si ce n'est qu'il est né de Béthune (Pas-de-Calais) – comme il est indiqué sur son passeport qui est apparu sur la télévision indonésienne – et qu'il voyageait régulièrement en Asie du Sud-Est. Une fréquence de passage qui a poussé la justice indonésienne à le considérer comme un "coursier professionnel".
 

Le trentenaire, lui, nie les faits depuis le début de l'affaire. Son avocat commis d'office (le troisième qui lui a été assigné) Deny Nur Indra, le décrit même comme "une victime" qui ne savait pas ce qu'il transportait, ajoutant que "s'il avait su quelle était la cargaison, il ne l'aurait pas amenée ici."

Sur les quelques photos qui ont été communiquées depuis son arrestation, le Nordiste apparaît le visage fermé, et esquisse même un sourire sur certaines d'entre elles.
 
Sa famille reste en tout cas très discrète et ne souhaite pas communiquer, a-t-on appris auprès de son entourage. Le maire (UDI) de Béthune, Olivier Gacquerre, a d'ailleurs confié n'avoir pas été sollicité par ses proches. Ses propres recherches indiquent que le jeune homme serait plutôt domicilié du côté d'Auchel, à une quinzaine de kilomètres de sa commune.

Félix Dorfin entretient bien des liens avec sa famille restée dans le Pas-de-Calais, puisque sa mère a reconnu avoir fait un versement de près de 500 euros "dans le but d'améliorer les conditions de détention" du Béthunois.

La somme a semble-t-il finalement servi à préparer une tentative d'évasion, fin janvier : une policière, soupçonnée d'avoir reçu un pot-de-vin, lui aurait fourni une couette, un téléphone et de quoi scier les barreaux de sa cellule.
 

Le trentenaire compte en tout cas faire appel. "Félix Dorfin est sous le choc" a indiqué son avocat, précisant qu'"il ne s'y attendait pas du tout puisque le parquet avait demandé seulement 20 ans".

 

De quoi est-il accusé ?


Le 1er octobre 2018, la police indonésienne annonce avoir interpellé le 21 septembre un ressortissant français à l'aéroport de Lombok. Ce dernier détenait plusieurs typs de drogues – dont 2,9 kg de kétamine et d'amphétamine, et 850 pillules d'ecstasy – dans une valise à double-fond. 

Félix Dorfin, "avait apporté les (drogues) directement de France. Il est passé en transit par l'Allemagne, puis par Singapour. Ensuite à Lombok il devait les transférer à quelqu'un" indiquait alors le chef de la police des stupéfiants de la région de West Nusa Tenggara, Yus Fadillah. 
 
Selon la police, il avait tenté de s'enfuir quand les douaniers avaient inspecté ses bagages, avant d'être rattrapé. Le trentenaire, présenté comme un coursier professionnel par les autorités indonésiennes, réussit à s'évader fin janvier 2019.

Alors qu'il se trouve dans un centre de détention de Mataram, "il s'est échappé par la fenêtre depuis le deuxième étage du centre de détention, il est descendu en utilisant un sarong et des rideaux attachés ensemble" précisait le porte-parole de la police de cette région.

Une évasion qui se serait faite avec la complicité d'une policière, laquelle aurait reçu un pot-de-vin de plus de 1000 dollars par la famille de Félix Dorfin, selon les autorités. Il est toutefois retrouvé une dizaine de jours plus tard dans la forêt au nord de Lombok, sur les indications des villageois. "Il n'a pas résisté, mais a d'abord essayé de corrompre nos agents" raconte même le chef de la police du nord de Lombok, Herman Suriyono.
 
Une tentative d'évasion et de corruption qui n'ont sans doute pas joué en faveur du Nordiste lors de son procès.

 

Peut-il échapper à l'exécution ?


L'Indonésie est l'un des pays les plus stricts en matière de lutte contre le trafic de drogue, passible de peine capitale. En 2013, le Français Roger Petrone avait été condamné à 6 ans de prison pour avoir fait entrer 69 grammes de cannabis en Indonésie.
 

En Indonésie, où la peine de mort est exécutée par fusillade, les condamnés à mort ont la possibilité de faire appel – Félix Dorfin a déjà annoncé par le biais de son avocat qu'il avait l'intention d'y recourir – voire de saisir la Cour suprême.

Le pays musulman le plus peuplé au monde avait stoppé les exécutions entre 2009 et 2012, avant de les reprendre : quatre en 2013, quatorze en 2015 et quatre en 2016, presque toutes pour trafic de drogue. Parmi ces condamnés à mort, deux seulement étaient de nationalité indonésienne, et un seul était européen. Il s'agissait d'un ressortissant néerlandais.

Cela n'a toutefois pas empêché l'Indonésie de condamner à mort 48 personnes en 2018, dont 15 étrangers jugés coupables de trafic de drogue. En décembre dernier, on comptait encore 308 condamnés en attente de leur exécution.

 

C'est notamment le cas d'un autre Français, Serge Atlaoui, qui avait été condamné en 2007 à la peine capitale. Ce dernier se trouve toujours dans le couloir de la mort, après avoir épuisé tous ses recours. Il était censé être exécuté en 2018, mais son nom avait été retiré de la liste au dernier moment.

Ce report s'explique-t-il par la crainte d'une crise diplomatique entre Jakarta et Paris ? En 2015, l'exécution des Australiens Andrew Chan et Myuran Sukumaran, condamnés pour avoir fait partie d'un réseau de trafic d'héroïne, avait provoqué de vives tensions avec Canberra.

 

De quels soutiens bénéficie-t-il en France ?


Lorsque Félix Dorfin avait été interpellé en septembre dernier, l'ambassade de France avait indiqué être en contact avec les autorités locales sur son cas. Le consulat voulait alors s'assurer "qu'il soit bien traité et qu'il ait droit à un avocat".

La porte-parole du ministère des Affaires étrangères a annoncé dans un communiqué que le Quai d'Orsay était "préoccupés par le verdict qui vient d’être prononcé à l’encontre de notre compatriote".

"Nous prenons note de sa volonté de faire appel. Il bénéficie de la protection consulaire depuis son arrestation en septembre 2018. Nous restons attentifs à sa situation" est-il précisé.

Interrogé sur le nombre de Français condamnés à la peine de mort dans le monde – sept – le Quai d'Orsay indique que la France "continuera d’agir en ce sens, notamment pour favoriser la commutation de ces peines."

Le maire de Béthune Olivier Gacquerre s'est également exprimé en annonçant qu'il allait "en appeler au Président de la République".

"Sur le principe, je suis opposé à la peine capitale" a précisé le maire centriste. Il "invite tous les élus à s'opposer" à la peine capitale, une "barbarie" qu'il juge "contraire aux valeurs des Lumières". "La France humaniste doit faire entendre sa voix".
 
"Je ne ferai pas d'ingérence sur cette affaire, je ne vais pas minimiser les faits dont il est question" tient à préciser l'édile. Tout en espérant que le jeune homme "a eu un procès équitable", Olivier Gacquerre souhaite voir sa peine aménagée.
 
L'actualité "Faits divers" vous intéresse ? Continuez votre exploration et découvrez d'autres thématiques dans notre newsletter quotidienne.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
Hauts-de-France
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité