Qui était réellement le docteur Charles Paul, né à Boulogne-sur-Mer et devenu le plus célèbre médecin légiste du XXe siècle ? Découvrez son parcours surprenant et sa personnalité hors-norme dans un documentaire réalisé par son arrière-petit-fils.
"Bougre de bougre, vas-tu finir par me dire de quoi tu es mort !". Ainsi s'exclamait, raconte-t-on, le Dr Charles Paul (1879-1960), surnommé "l'homme aux 100 000 autopsies", à la morgue de Paris. Le médecin légiste est aussi resté, pour la postérité, "celui qui parle avec les morts."
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Ses aïeux étaient médecins côté maternel et magistrats côté paternel. Lui, décida de concilier les deux. Orateur détonant, vulgarisateur scientifique hors pair, personnage dont la bonhomie et l'humour noir surprenaient dans les tribunaux, le Dr Paul est rapidement devenu la coqueluche des médias. Il a mis son expertise au service des plus grandes affaires du début du XXe siècle : fusillade de la Bande à Bonnot, affaires Stavinski, Pierrot le fou, Landru, Petiot, assassinat de Jaurès puis du Président Doumer.
Précurseur de la médecine légale
Le docteur Paul est devenu un personnage médiatique en 1912, à la suite de l'affaire de la Bande à Bonnot. Au cours du procès qui fit suite à la fusillade qui mit fin aux activités criminelles de la bande anarchiste, le médecin légiste témoigna de sa découverte lors de l'autopsie des cadavres : le chef du groupe, Jules Bonnot, blessé par les balles de la police, s'est donné la mort avec son propre revolver. Bref, il n'a pas été tué par la police, mais s'est suicidé.
À partir de ce moment charnière, il enchaîne les autopsies à un rythme effréné : 2 000 à 4 000 par an ! Il s'illustre par la suite en procédant à l’examen des corps et l’autopsie du directeur du Figaro en mars 1914 et de Jean Jaurès, le 31 juillet 1914.
En 1915, il est chargé d’étudier les effets des gaz militaires pour déterminer la nature des armes chimiques utilisées par l'armée allemande, à partir des autopsies de soldats gazés. Après-guerre, il devient naturellement le directeur de l'institut médico-légal de Paris.
N’oubliez pas qu’un cadavre découpé ne ment pas. Il livre toujours ce qu’il a dans le ventre. Je vous défie d’en dire autant de vos clients vivants.
Dr Paul s'adressant au juge Batigne
Le Dr Paul s'illustre également dans la retentissante affaire Landru, entre 1919 et la fin 1921. Il étudie les restes d'ossements retrouvés dans la villa de Gambais (Yvelines) et fait des expériences de crémation de têtes de moutons dans la cuisinière même de Landru. "D'après mes expériences, un pied disparaît en 50 minutes, une moitié de crâne débarrassé de son cerveau en 36 minutes, un crâne entier en 1h10, enfin, une tête complète avec le cerveau, les cheveux, la langue, disparaît en moins d'1h40", indique l'iconoclaste médecin.
Lors du procès du tueur en série Henri Désiré Landru (11 victimes entre février 1915 et janvier 1919), la déposition du légiste est tellement choquante que certaines personnes s'évanouissent dans la salle d'audience. Le 25 février 1922, le Dr Paul accompagne Landru à son exécution. Le médecin, qui conservait les pièces à conviction après la résolution de grandes affaires, a gardé le stylo-plume qui servit à Landru pour appâter ses victimes.
Un savant iconoclaste, populaire et bon vivant
Aucune mort suspecte n'échappe à son scalpel et autres outils (scie à crâne, couteau à foie, ...). Du vagabond anonyme retrouvé mort au président Paul Doumer, assassiné en public le 7 mai 1932 à Paris, le médecin légiste est partout.
Je dois l'avouer, j'adore ce terrible métier. Si on veut me faire un beau cadeau, il n'y a qu'à m'apporter les restes d'une femme coupée en morceaux, d'un noyé en état de décomposition avancée ou d'une victime de crime maquillé en suicide.
Dr Charles Paul
Le Dr Paul est cité sous son propre nom dans les enquêtes du commissaire Maigret, de George Simenon. L'auteur, avec qui il avait lié amitié, sollicitait régulièrement ses conseils pour ses romans policiers. Dans ses mémoires, l'écrivain décrira son ami ainsi : "Médecin légiste, gourmand, gourmet, bon vivant, admirable conteur d’histoires".
>>> Découvrez la vie et l'œuvre de Dr Paul "le détective au scalpel", racontée par son arrière-petit-fils, Giuillaume Pittard, jeudi 7 mars à 22h50 sur France 3 Hauts-de-France et en replay pendant 30 jours sur france.tv.
La dernière autopsie du Dr Paul
Un documentaire de Guillaume Pittard
Production : Sébastien Onomo / Les Films d’Ici