Comme chaque année depuis huit ans, des œuvres colorées monumentales investissent les murs de la ville de Boulogne-sur-Mer pour son festival de Street-art. Plus de 85 peintures murales réalisées par des artistes locaux et internationaux s'exposent à ciel ouvert. Découvrez en quelques unes en images.
Sans trembler, le geste est exécuté avec précision. Le trait de peinture blanche encore fraîche que vient d'apposer l'artiste Bertrand Civetta sur le crépi de la maison permet de définir encore un peu plus les contours de son œuvre, une danse macabre amoureuse entre un squelette et une jeune femme.
La gigantesque peinture s'ajoute aux quelque 70 fresques qui ornent déjà Boulogne-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais. L'art s'est invité durablement en ville pour la 9e édition du festival Street-art, lancé en 2016 par le maire Frédéric Cuvillier. Une quinzaine de nouveautés sont à découvrir cette année.
La ville austère et quadrillée reconstruite après la Seconde Guerre mondiale offre ainsi à ses habitants un tout nouveau visage. À chaque coin de rue, des explosions de couleurs dans tous les styles : surréalisme, anamorphose, photo réalisme, trompe-l’œil inspiré par l’art déco, portraits, art abstrait...
Nos journalistes Ophélie Masure et Sergio Rosenstrauch se sont rendus sur place pour admirer les œuvres de leurs propres yeux. Sélection des plus beaux clichés.
Un artiste Boulonnais "fier" de sa ville
Le Boulonnais Bertrand Civetta fait partie des treize artistes de nationalités différentes invités à peindre les murs de la ville. À le voir à l'œuvre en haut de son échafaudage, on ne se doute pas que l'exercice représentait un réel défi pour lui.
"Ce n'est pas simple du tout ici alors que dans l'atelier on a un certain confort, on a le temps, on a aussi moins de contraintes physiques. J’ai dû revoir un petit peu mes techniques, il y avait une part de hasard, je ne savais pas très bien où j'allais", témoigne l'artiste au pantalon tachetée de peinture.
"En prenant un peu le temps et dans le calme, on réussit à s'adapter d'une manière ou d'une autre et c'est très excitant, je suis fier de ma ville", explique Bertrand Civetta.
Un festival international
Parmi les artistes de cette année, le Russe Rustam QBic, qui peint une vieille dame face à l'oubli. "Avec la vieillesse elle essaye de mémoriser des choses mais certains souvenirs partent, alors elle tente de les rattraper avant qu'ils ne s'envolent", explique-t-il.
"Ce sont des messages laissés par différents artistes, cela embellit notre ville et je trouve que c'est une bonne chose", réagissent les habitants de passage, "c'est beau à regarder, c'est mieux que de la peinture délavée, le coin en a vraiment besoin".
Mauricette en XXL
Certains habitants ont même l'honneur de devenir le sujet des peintures. C'est le cas de Mauricette, 92 ans, cheveux blancs comme la neige, tablier fleuri et pantoufles fourrées aux pieds.
C'est dans cette tenue que la petite dame a été immortalisée. De quoi la faire gentiment râler. "En blouse et en pantoufles fallait pas faire ça ! Hier, dimanche, j'étais bien habillée", s'esclaffe-t-elle.
L'artiste mexicain Bache, qui était déjà en train de peindre une fresque, a vu en Mauricette le portrait craché de sa propre grand-mère et a voulu reproduire son portrait sans attendre.
Un musée en plein air
"La philosophie depuis 2016 c'est d'apporter de l'art dans la rue, de démocratiser la culture par la rue, c'est un musée en plein air", explique Amziane Abid, le directeur artistique du festival de Street art.
"On n’est pas dans la décoration, chaque artiste apporte son univers et chaque spectateur a sa propre lecture", poursuit-il en précisant que les peintures ne sont pas des commandes. "Ce n'est pas parce qu'on est au port de pêche qu'il faut dessiner des poissons, au contraire c'est bien d'élever la démarche", éclaire le directeur artistique.
Pour voir toutes les œuvres dispersées dans la ville il faudra compter... sept heures de marche. Pour éviter de se perdre, des visites guidées sont organisées chaque samedi à 16h, jusqu'au 31 août.