Selon l'association Utopia 56, qui a tourné des documents vidéos, deux jeunes exilés de 18 ans auraient été victimes de violences policières à Calais, dans la nuit du 22 août.
C'est une nouvelle affaire de violences policières sur des exilés à Calais, documentée par les associations Utopia 56 et Human Rights Observer et portée sur le bureau du procureur de la République de Boulogne. Plusieurs CRS sont accusés de s'en être violemment pris à deux jeunes garçons de 18 ans dans la nuit du 22 au 23 août 2022.
Selon les témoignages des personnes présentes, un groupe de jeunes qui avait pour projet de trouver un camion vers le Royaume-Uni est tombé sur le fourgon de CRS alors qu'il approchait d'une station-service. L'ensemble du groupe a fait demi-tour, sauf les deux adolescents de 18 ans.
Des adolescents laissés en sang sur la chaussée
"Lorsque les CRS arrivent à leur niveau, l’un des policiers porte un premier coup au visage à chacune des deux personnes. Les CRS saisissent les deux personnes par les bras pour les emmener dans une rue latérale à l’abri des caméras, ce qui constitue un acte de préméditation. Un des agents a alors porté un nouveau coup violent au visage de l’une des personnes, qui est tombée au sol. Après avoir mis la seconde personne à terre, environ 7 CRS leur ont donné de nombreux coups de pieds au sol. Les CRS sont repartis en riant, laissant les deux personnes blessées au sol", rapportent les bénévoles d'Utopia 56, appelés sur leur ligne d'urgence par les amis des deux victimes.
Les vidéos réalisées sur place montrent une personne encore au sol, et le sol amplement taché de sang. Le 31 août, Utopia 56 et Human Rights Observer ont procédé à un signalement auprès du procureur de la République de Boulogne-sur-Mer, Guirec Le Bras, accompagné d'un dossier contenant les preuves réunies sur place. Entre 2015 et 2021, au moins trois policiers ont été condamnés pour des violences sur les exilés de Calais, comme des gifles, des coups ou des vols de téléphone. Deux autres ont été reconnus coupables de violences sur des journalistes ou des humanitaires présents sur le campement de réfugiés.
Fin de l'omerta chez les forces de l'ordre
Selon Utopia 56, ces faits graves sont "le résultat des politiques de harcèlement et de maltraitance menées à la frontière depuis des années." Dans un rapport publié en octobre 2021, l'ONG internationale Human Rights Watch jugeait que la politique de sécurité menée sur le littoral constituait une "humiliation" et un "harcèlement permanent". Ce 8 septembre, la police a d'ailleurs procédé à un nouveau démantèlement sur le Quai de la Meuse. "Comme d'habitude, commente Jean-Claude Lenoir, président de l'association Salam. Environ 10 cars, un mec avec un flashball... Quel est l'intérêt, alors qu'ils vont se remettre en place, et combien ça nous coûte ? Ils ont fait ça pendant la pluie, alors qu'il y a de nombreux enfants. Ce sera la même chose dans une demi-heure, mais avec des gens trempés. C'est scandaleux."
Mais dans ces affaires de violences, une nouvelle donnée, précieuse pour la Justice et les associations, commence à émerger. C'est le concours de certains CRS et gendarmes, en désaccord avec ces agissements violents, qui brisent l'omerta professionnel et témoignent contre leurs collègues violents.
Concernant l'agression du 22 août, Utopia 56 affirme avoir également reçu un témoignage policier, d'un CRS issu d'une autre compagnie. "C'est inacceptable, ils ont laissé le pauvre comme un chien abandonné, c’est ce genre de collègues qui nous font énormément de tort".