Emmanuel Macron et Theresa May, lors d'un sommet jeudi, vont conclure un nouveau traité pour que la Grande-Bretagne ouvre davantage ses portes aux jeunes migrants bloqués à Calais et fournisse une aide financière à la France.
Comme le réclame la France, la Grande-Bretagne s'engagera à examiner très rapidement, "en quelques jours" selon l'Elysée, les demandes de migrants pouvant entrer sur son sol : les mineurs isolés, vulnérables ou pouvant bénéficier du regroupement familial, ainsi que les demandeurs d'asile (moins de 30.000 l'an dernier).
Paris et Londres devraient, lors d'un sommet à Sandhurst, aussi annoncer une coopération policière renforcée pour contrôler la frontière. Ce nouveau traité complétera, sans les remplacer, les accords du Touquet de 2004 fixant la frontière à Calais, un ville où depuis dix ans viennent échouer des milliers de migrants d'Afrique et d'Asie centrale qui rêvent de passer la Manche.
Les deux dirigeants annonceront en outre une contribution supplémentaire "importante" du Royaume-Uni à la France pour le développement économique de la région de Calais. Son montant était encore en négociation mercredi, a précisé l'Elysée.
Une centaine de migrants mineurs à Calais
"Le point sur lequel nous mettons une grosse pression, ce sont les mineurs non accompagnés, parce qu'il y en a de plus en plus", a expliqué mardi le chef de l'Etat, qui s'est rendu à Calais juste avant le sommet. Quinze mois après le démantèlement de la "Jungle", l'immense bidonville où s'entassaient plus de 7.000 personnes à Calais, le nombre de migrants dans la région a fortement baissé, puisqu'ils seraient 350 selon la préfectureet 600 selon les associations, dont une centaine de mineurs.
En février 2017, François Hollande était monté au créneau pour appeler le Royaume Uni à "prendre ses responsabilités" à leur sujet. Sur les quelque 2.000 mineurs de la "Jungle" pris en charge, la Grande-Bretagne s'était en effet engagée à accueillir tous les enfants isolés ayant de la famille sur place et à étudier les dossiers des mineurs "vulnérables". Mais au bout du compte, seuls 893 avaient été acceptés par la Grande-Bretagne. Et depuis un an, seuls 8 mineurs sont passés.
"Aujourd'hui les procédures sont extrêmement longues en Grande-Bretagne, les vérifications de l'état-civil et du lien familial sont pointilleuses et comme la volonté politique manque, très peu de gens passent", souligne Pierre Henry, de France Terre d'asile.
Pour Paris, le sujet risque de devenir brûlant alors que le nombre des "mineurs isolés étrangers" pourrait atteindre 25.000 cette année.
Appui au Sahel
Le sommet de jeudi, qui se déroulera dans l'Académie militaire de Sandhurst, au sud de Londres, comportera aussi un large volet défense. Les deux pays annonceront des projets communs en matière de missiles, de détection sous-marine et réaffirmeront le projet de drone de combat franco-britannique FCAS (Système de combat aérien du futur), a précisé l'Elysée .Londres et Paris doivent aussi annoncer une coopération opérationnelle renforcée dans les zones d'intervention conjointe, notamment dans le cadre de l'Otan. Mais c'est surtout pour le Sahel que Paris compte sur l'appui britannique : le Royaume-Uni renforcera son appui opérationnel "de manière très significative" à l'engagement français dans la région, s'est félicité l'entourage du chef de l'Etat. Selon la presse britannique, Londres est prêt à "écouter les arguments" français pour une contribution financière supplémentaire et pourrait fournir au Sahel des moyens de surveillance -- ses drones Reaper-- et des hélicoptères Chinook
Les questions culturelles seront également au menu, avec l'annonce d'une dizaine de jumelages et d'un programme d'échange d'oeuvres, dont la célèbre tapisserie de Bayeux qui pourrait pour la première fois quitter le sol français à partir de 2020, perspective aussitôt saluée par la Première ministre britannique.
Les négociations du Brexit, menées entre le Royaume-Uni et la Commission européenne et pas en bilatéral, ne sont officiellement pas à l'ordre du jour mais planent sur les discussions. La presse britannique fait elle un lien entre Brexit et pressions françaises : "Emmanuel Macron veut persuader Londres d'accepter des migrants de Calais en échange de son soutien pour un meilleur accord commercial avec l'UE", s'est indigné le quotidien populaire L'Express.