Hauts-de-France : le défi du recrutement, face à la pénurie de main d'œuvre dans le bâtiment

Le secteur du bâtiment est en tension, plus de 400 offres sont répertoriées sur le site de Pôle emploi 62. Pourtant, les candidats manquent. Alors la région investit et propose des formations. Exemple dans deux lycées du Pas-de-Calais.

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Des étincelles crépitent alors Dylan rajuste son masque de protection. Cet élève de 1ère spécialité chaudronnerie teste les tout nouveaux postes de soudure, reçus il y a quelques semaines. Un nouvel équipement, commandé pour "moderniser l'offre de formation" selon les mots du directeur d'établissement. Le marteau et l'enclume, outils traditionnels du chaudronnier, trônent dans un coin de la salle, comme un vieux souvenir. Car en 2021, l'apprenti chaudronnier utilise plutôt la réalité virtuelle. Dans une petite salle qui jouxte le plateau de formation, Dylan s'équipe maintenant d'un casque et de deux manettes. Devant lui, un écran projette son personnage virtuel sur un chantier. "C'est bon, tu peux te déplacer avec les boutons. OK, là tu arrives sur la plateforme de la station Total à Dunkerque", guide Gilles Saouma, le professeur, avant de nous glisser: "tout a été filmé en 3D". Dylan doit guider son personnage, faire des choix, se déplacer au cours de cette simulation. Une façon originale et ludique d'apprendre les règles de sécurité sur ce type de chantier, son futur environnement de travail. "C'est un peu du jeu vidéo, donc on n'a pas vraiment les risques du chantier et c'est mieux que d'être directement sur place. On a le temps d'apprendre pour plus tard" observe Dylan, enthousiaste.  

A Marquise, le lycée des 2 caps s'est équipé d'un tout nouveau plateau technique pour ses élèves. Des équipements ultra-modernes pour un coût total de 2 millions d'euros, payés par la région. Car l'enjeu est d'attirer de nouveaux candidats et changer l'image d'Epinal du chaudronnier. "Aujourd'hui, on fait beaucoup de conception, d'informatique. Mais on a du mal à intéresser de nouveaux jeunes, ils pensent que c'est un métier sale", raconte le professeur. Cette classe compte 10 élèves, au lieu des 15 places disponibles à pleine capacité. Pourtant, la filière recrute. Particulièrement dans la région, où l'industrie locale recherche ce type de profil. "On fait le tour des agences d'intérim et on ne cesse d'avoir des demandes de chaudronniers-soudeurs, pourtant on manque de candidat", observe le proviseur du lycée, Nicolas Blot. 

Des métiers "durs" qui n'attirent plus les jeunes 

Le site de Pôle emploi enregistre plus de 400 offres d'emploi pour la filière chaudronnerie. Et de façon générale, autant de postes sont disponibles dans les métiers du bâtiment : peintres, maçons, plombiers... Là encore, de moins en moins de candidats. "Ce sont des métiers souvent qualifiés de durs et depuis que le Covid est passé par là, ces activités n'attirent plus les jeunes" explique Stéphane Persyn, responsable au lycée professionnel de Lumbres pour le Greta, l'organisme de formation réservé aux adultes. D'autant que le salaire moyen dépasse rarement le SMIC.

Concrètement, Stéphane Persyn répond à des appels d'offres de la région pour mettre en place des formations dans les secteurs en tension. Au lycée professionnel de Lumbres, quatre filières sont disponibles, en travaux publics, peinture, plomberie et bois. Une formation de huit mois, rémunérée, gratuite et entièrement financée par la région, là encore. Elle délivre un diplôme équivalent au CAP mais souvent, les candidats manquent à l'appel. "L'an dernier, il y a deux formations qu'on n'a pas pu ouvrir faute de candidats, en plomberie et en maçonnerie. Et pour la filière bois, on a dû décaler le début de la formation au mois de décembre, pour être sûr de fonctionner à pleine capacité" analyse Stéphane Persyn.

Finalement, dix adultes de 19 à 50 ans composent cette quatrième promotion bois. Et pour eux, c'est retour à l'école. Guillaume Lévisse, 37 ans, planche sur une maquette de cylindre en bois, qui servira à supporter un toit. Il vient de quitter son emploi dans la communication. "C'est bizarre de reprendre le chemin de l'école mais c'est très vite compensé par le fait d'apprendre de nouvelles choses, aussi bien de nouveaux outils, un nouveau vocabulaire, que la matière et le bois en l'occurrence. Pour moi, tout commence avec un projet personnel, je veux construire ma maison avec une ossature bois et pourquoi pas ouvrir une entreprise ou en intégrer une" décrit Guillaume, sérieux. Bientôt, il devra réaliser deux stages en entreprise pour valider sa formation. Alors, le lycée développe des partenariats.

Souvent, Stéphane Persyn reçoit des entrepreneurs locaux dans son bureau du lycée. Il est en contact permanent avec eux, pour adapter les formations aux exigences du quotidien en entreprise. Pierre Wasselin est patron, spécialisé dans la filière bois et basé à Saint-Omer depuis 16 ans. Autant dire qu'il connaît la région. Pourtant, lui aussi peine à recruter. Mais ces formations pour adultes lui permettent de trouver les profils qu'il recherche. "Ce sont des gens matures, qui ont déjà des expériences professionnelles. Alors ils sont sérieux, motivés et curieux du métier qu'ils apprennent. Nous, entrepreneurs, nous avons besoin des lycées comme celui-là, c'est comme ça qu'on recrute efficacement", décrit le chef d'entreprise. Et déjà, l'an dernier, 5 contrats à durée indéterminée ont été signés via cette formation.

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