Jeudi 22 février, s'est ouverte à Saint-Omer, la quatrième et dernière journée du procès d'Alexandre B. L'agent d'une unité d'élite de la gendarmerie était accusé d'avoir tué par balle Henri Lenfant, 22 ans, membre de la communauté des gens du voyage, lors d'une intervention à Fouquières-lès-Lens en 2018. Le verdict a été rendu en début d'après-midi.
A l'annonce du verdict, plusieurs personnes de la famille de la victime se sont levées en hurlant à l'injustice dans la salle d'audience. Rassemblés dans la salle des pas perdus, les proches à bout de nerf ont projeté du matériel au sol. Les forces de l'ordre ont évacué les fauteurs de troubles, qui se sont rassemblés à l'extérieur du tribunal avant d'être encerclés et maîtrisés par les CRS.
Quelques heures avant le verdict, l'avocat général avait réclamé de la prison ferme au cours d'un réquisitoire musclé : "J'ai requis des non-lieux pour des gendarmes et des policiers au cours de ma carrière. Je ne retrouve pas les circonstances dans cette affaire".
"Pour moi, il n'y a pas de légitime défense", l'avocat général
En charge de porter l'accusation, le représentant du parquet s'était opposé à la thèse de la légitime défense, face à ce qu'il considérait comme un "crime particulièrement grave".
⚖️ Pas-de-Calais : la veuve et le père d'Henri Lenfant demandent justice à la veille du procès d'Alexandre B, un gendarme du GIGN jugé à partir du 19 février pour lui avoir tiré dessus lors d'une intervention en 2018.https://t.co/oDU80fLxd5 pic.twitter.com/ubCPIIUf31
— France 3 Nord Pas-de-Calais (@F3nord) February 18, 2024
En 2018, Alexandre B., agent du GIGN, mène une intervention dans un camp de gens du voyage à Fouquières-lès-Lens, où réside la famille Lenfant. Le groupe de gendarmes est à la recherche d'hommes soupçonnés de vols aggravés dans la région. Trois personnes tentent alors de s'enfuir en voiture. Le 28 septembre 2018, à 3h35 du matin, une BMW se range, deux passagers prennent la fuite, mais Henri Lenfant reste agrippé au volant de la voiture. Lorsqu’Alexandre B. s'engouffre par la porte passager avant, le véhicule démarre, l'agent fait alors usage de son arme et tire une balle à l'arrière du crâne du conducteur. Henri Lenfant, père de deux enfants, meurt sur le coup.
"Ce n'est pas la faute d'une institution, c'est le procès de la faute d'un homme"
C'est "le procès d'un homme qui a failli, qui a manqué à la devise du GIGN : s'engager pour la vie" a rappelé l'avocat général lors de sa prise de parole au procès. Il a souligné le comportement "fautif" de l'agent, dans la mesure où les autres gendarmes en intervention "ne se sont pas sentis en danger" et "ont rangé leurs armes". Pour lui, ce n'était donc "pas le procès d'une institution, mais le procès de la faute d'un homme, d'une action que l'on doit qualifier de criminelle."
L'avocat général avait été clair : "il n'y a pas de légitime défense". Suite à ces quatre jours de procès, il savait "que la décision n'était pas simple à prendre", bien que "la vie d'un homme, cette nuit-là, s'est éteinte suite à l'action criminelle d'Alexandre B." L'avocat général avait requis 2 ans d'emprisonnement et l'interdiction de porter une arme pour 5 ans.
Sébastien Busy, avocat d'Alexandre B., avait plaidé quant à lui l'acquittement. L'accusé estimait dans une interview au Parisien "avoir agi dans un « instinct de survie »".