C'est une opération de sauvetage inédite pour l'entreprise d'Arques, dans le Pas-de-Calais. Un plan de refinancement validé par le tribunal de commerce, mercredi 8 janvier 2025. Le ministre en charge de l'industrie s'est rendu sur place pour annoncer un prêt de l'Etat de 30 millions d’euros et l'effacement d'une partie de la dette. La manœuvre suffira-t-elle à sauver le géant du verre ? Les syndicats en doutent.
Dans les années 2000, Arc International employait près de 13 000 personnes à Arques, dans le Pas-de-Calais. De belles années pour les salariés qui, depuis 20 ans, voient les plans de restructuration se succéder. Mercredi 8 janvier 2025, le tribunal de commerce de Tourcoing (Nord) doit valider un plan de refinancement de l'entreprise qui ne compte plus que 3800 salariés, régulièrement en chômage partiel.
Deux nouveaux actionnaires
Pour permettre à l'entreprise de continuer à exister, deux nouveaux actionnaires français font leur entrée au capital. Chacun apporte 15 millions d’euros. Il y a d'abord Pascal Cagni, un ancien d’Apple. C'est un proche d’Emmanuel Macron que le Président a nommé à la tête de l’agence Business France en 2017.
Le second est Patrick Molis, PDG de la Compagnie nationale de navigation, qui opère pour l’armée et assure le transport de la fusée Ariane jusqu’en Guyane depuis l'Europe.
L’actionnaire majoritaire actuel, l’américain Dick Cashin, injecte lui aussi 12 millions d’euros supplémentaires dans l'entreprise. L'État a posé comme préalable que le propriétaire de l'entreprise participe au redressement. Dick Cashin aurait investi plus de 200 millions à Arc depuis son rachat.
Prêt et effacement d'une partie de la dette par l'Etat
Les syndicats ont été informés des modalités de ce nouveau plan lors d'un CSE extraordinaire, mardi 7 janvier 2025. En plus des 42 millions d'euros apportés par les actionnaires, l’État accorderait un prêt de 30 millions d’euros, avec un taux de 9 %.
L'État effacerait aussi une dette, en tout 120 millions d'euros, qu'Arc lui doit.
Benoît Trinel, représentant CGT, ne se réjouit pas forcément de ce qui pourrait apparaître être une bonne nouvelle : "encore une fois, tous les quatre ans, l'état vient à notre secours. En 2015, il a effacé 300 millions d'euros de dette. Résultat les banques françaises n'ont plus voulu nous prêter d'argent. Nous avons dû emprunter à 12 % à l'étranger. Et aujourd'hui, nous avons à nouveau plus de 350 millions d'euros de dette."
Il poursuit : "L'entreprise est mal gérée. Certes, il y a la conjoncture actuelle avec moins de demande. Mais la dette est énorme. L'avenir, je le sens très mal. Et puis, l'ambiance, c'est une catastrophe. Ils font tout pour nous écœurer, pour que les gens partent d'eux-mêmes".
Un fleuron de l'industrie pour le ministre
Le ministre de l'Industrie, Marc Ferracci a déclaré lors de sa visite de l'usine : "On sait ce que représente Arc dans la région, en termes de poids économique, d'impact humain et il y a aussi une empreinte industrielle avec les fournisseurs qui sont beaucoup dans la région." Puis, "Arc est un fleuron de notre industrie locale, nationale et internationale. C'est un des leaders mondiaux de la verrerie, qui fait 80 % de son chiffre d’affaires à l'export".
Enfin, il a justifié sa présence : "Si j'ai voulu venir ici aujourd'hui, c'est pour annoncer une nouvelle qui est le fruit d'un travail, d'un accord collectif qui va permettre de pérenniser, de garantir le modèle économique de l'entreprise pour les prochaines années. Les actionnaires historiques, de nouveaux actionnaires, l'Etat ont mis de l'argent. Les acteurs publics, les collectivités locales, la Région, la communauté d'agglomération de Saint-Omer font des efforts en renonçant à une partie de leurs créances. C'est un effort collectif. L'État a joué un rôle d'ensemblier pour consolider une solution financière qui doit permettre à Arc de se projeter dans l'avenir".
Le syndicaliste de la CGT, Benoît Trinel broie, lui, du noir. Le nouveau plan ne va pas, selon lui, permettre de redresser l'entreprise, plus grand site verrier de France. Il affirme : "Les machines en production sont vieillissantes, elles doivent dater des années 70, on manque d'investissement, on emballe encore à la main !"
Depuis dix ans, l'Etat multiplie les prêts à l'entreprise. En 2022, elle lui a prêté 128,5 millions, 10 millions en 2023.