Une centaine de manuscrits, lettres et objets ayant appartenu au marquis de Sade dont de rares pièces de théâtre écrites par l'auteur de "Justine" sont mis en vente mercredi par ses descendants à l'hôtel Drouot.
Les pièces proposées par la maison de vente parisienne proviennent des rares documents sauvés des flammes à la mort de Sade le 2 décembre 1814. Ce qui ne fut pas brûlé fut mis dans un coffre et scellé derrière des étagères de la bibliothèque du château familial de Condé-en-Brie (Aisne).
Une oeuvre très longtemps taboue
"De ce jour un tabou total s'est abattu sur la famille", se souvient Thibault de Sade, un descendant du marquis dont les parents ont redécouvert les oeuvres de leur ancêtre peu de temps après la fin de la Seconde guerre mondiale.
Devenu "un complet inconnu", le nom même de Sade avait été "gratté sur l'arbre généalogique". "Toute leur vie, nos parents se sont battus pour faire connaître Sade, contre les préjugés, contre les mensonges et pour la vérité (...) Ils ont donné mission à leur cinq enfants de continuer ce combat pour la connaissance", poursuit Thibault de Sade à l'origine de la vente.
Parmi les pièces proposées figure le fauteuil du marquis de Sade (entre 40.000 et 50.000 euros). C'est dans ce fauteuil, en partie d'époque Louis XIII, que Sade écrivit la plupart de ses textes (y compris quand il fut enfermé à Vincennes, la Bastille ou Charenton).
Un tableau, attribué à Jean-Marc Nattier et représentant le père du marquis est estimé entre 30.000 et 40.000 euros. Comme son fauteuil, ce tableau accompagna Sade de cachot en cachot.
Six pièces de théâtre dont cinq qui ne furent jamais jouées sont mises à l'encan. "Le boudoir ou le mari crédule", courte pièce saisie par la police après sa rédaction en 1783 à la prison de Vincennes, "Le Capricieux", comédie en cinq actes et en vers, et "L'égarement de l'infortune", drame en trois actes écrit en 1781 alors qu'il était emprisonné à Vincennes, sont estimées entre 30.000 et 40.000 euros.
Près de 30 ans derrière les barreaux
Sans doute l'une des dernières pièces écrites par Sade en 1807, quand il était enfermé à Charenton, "Franchise et trahison", pièce en trois actes et en prose, est estimée entre 40.000 et 50.000 euros.
Ecrite en 1791, la seule pièce de Sade acceptée par la Comédie française, "Le mysanthrope (sic) par amour", une comédie en cinq actes, est quant à elle estimée entre 15.000 et 18.000 euros.
La seule fable connue écrite par le divin marquis est également proposée à la vente. Probablement écrite durant son emprisonnement à la Bastille ce conte de quatre pages est estimé entre 10.000 et 15.000 euros.
Sur sa liste de course, "un coussin pour le croupion"
Parmi les curiosités, on trouve un bronze du crâne de Sade (4.000/5.000 euros) ou encore une liste manuscrite des courses demandées par Sade de sa prison du donjon de Vincennes. Sade demande des livres, un cahier de 600 pages, "un coussin pour le croupion", "des grandes bougies de nuit" (3.000/4.000 euros). Sade (1740-1814) a passé au total près de 30 ans de sa vie derrière les barreaux.
Son oeuvre a été occultée durant tout le XIXe siècle et ce n'est qu'au milieu du XXe siècle que l'éditeur Jean-Jacques Pauvert édita les textes de Sade malgré la censure. Sade a été édité dans la prestigieuse collection de la Pléiade en 1990.