Installé à Beaucourt-en-Santerre, Étienne d'Hautefeuille a installé une distillerie au sein de la ferme céréalière familiale. Il y fabrique un whisky picard à partir de l'orge qu'il cultive dans ce petit village de la Somme.
Tout commence sur une parcelle de 12 hectares, juste à côté le cimetière canadien de la commune. Sur ce sol calcaire sera semé de l'orge "d'ici quelques semaines, vers fin mars", souligne Étienne d'Hautefeuille. De la céréale, cultivée par la famille depuis des génération, il souhaite tirer un alcool local. Pour spécialiser dans les spiritueux, l'agriculteur de 35 ans s'est formé à l'Institut français de la brasserie et de la malterie de Nancy.
Le maltage
Une fois récolté à l'été, l'orge repose dans des silos jusqu'à la fin de l'automne. Cette période de "dormance" terminée, la céréale entre en distillerie pour être transformée en malt. Dans cette première étape, l'orge est humidifié et commence à germer : il délivre alors une grande partie de ses arômes. Elle est ensuite fumée - c'est l'étape du touraillage - à la tourbe picarde pendant 48 heures.
Le brassage
Le malt, préalablement concassé, est ensuite placé dans une cuve d'eau chaude pendant une heure et demi pour activer les enzymes. Le produit est ensuite filtré : la pâte de malt obtenue, le moût, est récupéré pour la fabrication du whisky. Il rejoint les brassins pour infuser pendant une semaine à une température constante de 25°C. Les drêches, résidus de la coque de la céréale, ont quant à elles un sort particulier : "Elles sont données aux vaches. J'ai un ami éleveur qui vient les chercher à chaque fois qu'on brasse," indique Étienne d'Hautefeuille.
La distillerie
C'est l'étape où le liquide devient spiritueux. "Ici, on vient séparer l'eau de l'alcool, en prenant soin de récupérer l'alcool bien entendu," ajoute Étienne d'Hautefeuille. Le moût, qui sort des brassins avec une teneur en alcool de 7° à 8°C, est alors chauffé dans une chaudière. Les vapeurs rejoignent la seconde partie de l'alambic, l'analyseur, une colonne cuivrée qui concentre les arômes de la vapeur. Celle-ci est enfin refroidie dans le condensateur et devient liquide. Du robinet de l'alambic s'échappe alors une eau de vie très claire, semblable à l'eau. "Mais elle titre tout de même à 65° d'alcool," signale notre guide.Le vieillissement en fûts
Le liquide est alors entreposé dans des fûts de chêne jeune pendant quelques mois, "afin que l'alcool gagne en tanins," souligne le distillateur. Puis il est transposé dans des fûts plus anciens, d'occasion, dans lequel le whisky passe la majeure partie de sa vieillesse. "Il faut être patient : à partir où l'eau de vie arrive dans les barriques, le chronomètre est lancé. L'alcool doit vieillir plus de trois ans pour porter l'appellation whisky," rappelle l'exploitant.
La ferme-distillerie d'Hautefeuille produira ses premières bouteilles en décembre 2018, avec l'orge transformée les années précédentes. Avant de se lancer dans le whisky, Étienne de Hautefeuille s'est auparavant fait la main sur deux recettes de gin.
"Quand je me suis installé, l'idée principale était de profiter de tout ce que l'on trouve autour de nous, ici en Picardie, raconte celui pour qui la traçabilité et la transparence du produit est plus important qu'un label bio. Dans ses gins, il est donc naturel de retrouver des baies de genévrier bien sûr, mais aussi des fleurs de sureau, des baies d'argousier picardes, mais aussi de l'armoise maritime, commune dans la baie de Somme. À consommer avec modération!
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