Plantes et petites bêtes des Hauts-de-France : le Liparis de Loesel, une discrète orchidée qui se reproduit toute seule

Le Liparis de Loesel est une petite orchidée discrète, rare, et aux caractéristiques étonnantes. Classée vulnérable, elle fait l'objet de programmes de protection pour la maintenir dans ses milieux naturels.

Petite, discrète, et tenace : c'est le Liparis loeselii ou Liparis de Loesel, une plante de la famille des orchidées qui fleurit de fin mai à début juillet. Avec son milieu de vie particulier, ses cycles de floraison irréguliers et son mode très autonome de reproduction, le Liparis de Loesel est une fleur unique par bien des aspects, mais extrêmement mise en danger par la disparition de son habitat naturel. 

Le Liparis de Loesel, une fleur qui aime barboter

"On va la retrouver dans les "pannes dunaires", des dépressions humides au sein des dunes, avec des nappes d'eaux affleurantes au sein des sables. On la retrouve aussi dans les marais arrière-littoraux et aussi chez nous dans les tourbières des vallées alluviales [plaine en faible pente où des zones sont fréquemment immergées, ndlr]", décrit Quentin Marescaux, responsable au Conservatoire d'espaces naturels des Hauts-de-France.

On rencontre encore cette plante rare sur le littoral du Nord et du Pas-de-Calais, dans la vallée de la Somme, de l'Avre et au niveau des marais de la Souche, dans l'Aisne. Des données anciennes prouvent que l'espèce était auparavant plus étendue dans la région.

C'est une espèce menacée de disparition dans toute l'Europe, qui est en déclin en France et a déjà disparu de certaines régions. Dans les Hauts-de-France, c'est une espèce qui est très rare et considérée comme vulnérable par l'UICN.

Une plante rare et vulnérable

Sa disparition est d'abord liée à la "fermeture" progressive de son écosystème. Les cours d'eau, notamment, ont tous été canalisés, et les perturbations naturelles saisonnières ne peuvent plus jouer leur rôle. "Dans les dunes là aussi, c'est l'aménagement, la fixation du littoral : l'humain ne voulait pas de sable dans ses habitations, et a beaucoup planté pour fixer les dunes. Mais la création des pannes dunaires se faisait naturellement, avec le vent qui enlevait du sable au niveau des nappes d'eau. La dynamique dunaire a été bloquée par les aménagements humains, ces milieux se ferment, et on n'en crée pas de nouveaux", retrace Quentin Marescaux.

Dans les zones de marais, c'est l'évolution de nos pratiques agricoles qui dessert le Liparis de Loesel : "c'est lié à l'abandon des usages traditionnels qui ont persisté jusqu'au début du XXe siècle notamment les pâturages extensifs, les pratiques de fauche des roseaux... Bien sûr, c'est une plante qui est liée aux zones humides, donc tout ce qui est lié à l'asséchage, les pompages et draînages pour les cultures... Cela lui nuit" conclut l'expert.

Depuis 2010, cette orchidée fait l'objet d'un plan national de sauvegarde. Le Conservatoire d'espaces naturels des Hauts-de-France s'efforce de sauvegarder les milieux naturels encore existants, de restaurer ceux qui ont disparu, et de remettre en place des pratiques favorables comme la fauche. Il s'efforce aussi de recenser les populations de Liparis de Loesel.

Une plante "à éclipse" qui se reproduit toute seule

La tâche n'est pas si facile : le Liparis de Loesel est ce qu'on appelle une plate "à éclipse" : elle ne fleurit pas tous les ans, même si, sous terre, la vie et son bulbe sont bien toujours là. "Tous les ans, il y a de grosses fluctuations de population, qui sont essentiellement liées à ça. Dans le marais de Villiers, sur la commune de Saint-Josse (62), on a un suivi depuis 2009. On avait 44 pieds en 2009, 257 pieds en 2021, mais en 2018, par exemple, c'était retombé à 53 pieds. La courbe varie, mais reste à la hausse" se réjouit Quentin Marescaux.

Le Liparis loeselii n'est pas connu pour avoir eu une utilité particulière pour l'homme, n'étant pas une plante médicinale ou comestible, mais peut tout de même surprendre. La famille des orchidées, atteste le responsable de conservation, est une des plus évoluées et ingénieuses, et notamment dans la manière dont elle parvient à se reproduire. Certaines orchidées parviennent à reproduire la forme et l'odeur d'un insecte femelle pour attirer les mâles, sur lesquels la plante va déposer elle-même de petits sacs de pollen ensuite dispersés alentours. 

Le Liparis de Loesel est dans un cas de figure presque encore plus désarçonnant. "La pollinisation de cette espèce n'a pas pu être observée", remarque Quentin Marescaux. Aucun rôle à jouer pour les abeilles et autres pollinisateurs. La plante se reproduit de deux façons différentes : en s'auto-fécondant grâce à des organes mâles et femelles présents dans la même fleur, ou en divisant son propre bulbe. Une fois la fleur fécondée, ses graines seront dispersées par le vent et doivent encore non seulement atterrir sur un terrain humide propice. Dernier facteur en jeu : comme toutes les orchidées, sa graine a besoin, pour se développer, d'un champignon fonctionnant lui aussi en symbiose avec un autre organisme, ce qui leur permettra à tous les deux de se développer.

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