Quels sont les critères adoptés lors de la constitution des classes au sein des collèges et lycées? La répartition des élèves perturbateurs, les options, la mixité filles-garçons, et très peu le hasard, répondent les proviseurs, qui considèrent cet exercice comme un enjeu majeur.
Ils sont une très large majorité à estimer qu'une construction des classes "pensée et réfléchie" influe sur la dynamique de classe (91%), la cohésion entre les élèves (90%), les problèmes comportementaux (88%) et les résultats scolaires (84%), indique une étude publiée mardi par le Cnesco, organisme chargé d'évaluer l'organisation et les résultats du système scolaire français.
Cette question occupe "une place croissante" depuis une vingtaine d'années, note Philippe Tournier, secrétaire général du syndicat des personnels de direction de l'Education nationale (SNPDEN). En raison de la multiplication au collège, à partir de la moitié des années 90, des incidents liés à "l'âge bête", ajoute-t-il. Il a alors été décidé de disséminer, bien plus qu'avant, les élèves en difficulté comportementale.
Critères
Ainsi au collège, les cinq critères les plus usités pour constituer les classes sont les problèmes comportementaux des élèves (cité par 96% des principaux), la diversité des profils scolaires (96%), les options (95%), la mixité filles/garçons (95%) et les tensions entre élèves (93%), selon cette enquête réalisée cet été auprès de 480 chefs d'établissement.Au lycée, les proviseurs prennent surtout en compte les options, la mixité filles-garçons et les tensions entre élèves. Les langues vivantes, les dispositifs spécifiques (classes européennes par exemple), l'équilibre filles/garçons sont autant de variables à entrer dans "un énorme tableau Excel", explique à Didier Georges, proviseur du lycée Le Corbusier à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis).
Succès pas toujours garanti
Une fois les classes constituées, on calcule la moyenne de chaque groupe à partir des notes des enfants, et des ajustements sont effectués pour obtenir "une certaine homogénéité" de niveau."Mais ce travail ne garantit pas toujours le succès. On peut avoir deux classes identiques sur le papier, avec quasiment la même équipe de profs, mais l'une fonctionnera et l'autre pas", note-t-il. "Quels sont les leviers pour assurer le dynamisme, l'engouement pour le travail, l'entraide entre les élèves ? Mystère".
Plus de huit chefs d'établissement sur dix jugent que les classes de niveau --prohibées par la réforme Haby de 1975-- et les classes socialement homogènes ne sont pas pertinentes. Mais ils ne sont que 51% à estimer que les enseignants sont plus efficaces face à une classe hétérogène scolairement et 31% disent ne pas avoir d'opinion.
Et les parents ?
Collèges et lycées confondus, plus de la moitié des personnels de direction (57%) indiquent avoir peu souvent ou jamais des demandes des parents pour mettre leur enfant dans telle classe ou avec tel camarade. C'est au collège que les parents interviennent le plus et 57% des principaux déclarentprendre souvent en compte ces demandes. Par exemple lorsqu'un élève en difficulté peut trouver de l'aide avec un camarade particulier, lorsqu'un enfant était en souffrance dans sa classe ou pour permettre le covoiturage entre élèves du même village en milieu rural.
Et 64% des principaux affirment prendre en compte les groupes d'amis lors de la constitution des classes, soit deux fois plus qu'au lycée. Le modèle français, à l'inverse du modèle nordique par exemple, ne cherche pas particulièrement à conserver les mêmes classes ou la même équipe pédagogique pour une classe donnée d'une année sur l'autre, note la sociologue Nathalie Mons, présidente du Cnesco.
Le Conseil national de l'évaluation du système scolaire préconise une plus grande transparence sur les critères utilisés par chaque établissement --rejoint sur ce point par le représentant des personnels de direction Philippe Tournier-- et recommande de débattre de ces critères et de leur hiérarchisation. Il souhaite également une meilleure formation de l'encadrement sur ce sujet.