Au moins 12 enfants à la rue, dont un bébé de 7 mois : RESF alerte sur la situation des familles sans-abri à Amiens

La fermeture d'un lieu d'hébergement d'urgence provoque l'inquiétude du Réseau éducation sans frontières, car certaines familles qui y étaient hébergées se retrouvent sans solution. Les bénévoles étaient reçus ce jeudi 2 mai à la préfecture de la Somme.

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"C'était la catastrophe hier à la gare, déplore Didier Cottrelle, bénévole du Réseau éducation sans frontières de la Somme, ce vendredi 3 mai. À 22h30, il restait vingt personnes dans le hall, avec douze enfants, dont un bébé de sept mois. Toutes les familles ont appelé le 115, à 19h30, à 21h, à 22h30, pas de solutions."

La maman pleurait toutes les larmes de son corps, elle était complètement paralysée par la peur.

Didier Cottrelle, bénévole au RESF

Ces personnes, pour la plupart déboutées du droit d'asile, ont fini par se disperser dans la ville pour tenter de trouver un abri. "Une famille a dormi dans un parc, une dame avec trois enfants ont été dans une entrée d'immeuble. Quelqu'un leur a ouvert, ils ont dormi dans un couloir", explique le bénévole. Pour d'autres, il n'a pas de nouvelles. "Il y a une dame seule qui est partie avec sa fille de 13 ans, je ne sais pas ce qu'elles sont devenues. La maman pleurait toutes les larmes de son corps, elle était complètement paralysée par la peur. En plus, sa fille était malade depuis le matin."

"Le nombre de places reste notoirement insuffisant"

Cette femme était, jusqu'ici, hébergée rue de la Croix-Rompue, dans le sud d'Amiens dans un lieu d'hébergement d'urgence aménagé en novembre 2023 pour, justement, permettre aux mères isolées de ne pas dormir à la rue avec leurs enfants. Le dispositif, mis en place pour les mois d'hiver, avec une trentaine de places, vient de fermer ses portes, le mardi 30 avril, pour travaux. Une mauvaise surprise pour le RESF de la Somme, qui espérait une prolongation jusqu'à la fin du mois de juin. 

Les 11 femmes et 27 enfants qui y étaient hébergés ont donc dû quitter les lieux. "À partir de mardi soir, les mamans se sont mises à appeler le 115, explique Didier Cottrelle. La plupart des mamans ont été prises en charge, mais relativement tard dans la soirée, voire dans la nuit. Deux mamans étaient restées dehors, et le RESF a décidé de les mettre à l'abri à l'auberge de jeunesse, parce qu'il y avait des enfants en bas âge." Mais il leur faut, chaque jour, trouver une nouvelle solution. 

Notre crainte, c'est que comme à l'été dernier, il y ait un grand nombre de familles qui se retrouvent dans la rue.

Didier Cottrelle, bénévole au RESF

Inquiets de cette situation, les bénévoles du Réseau éducation sans frontières ont été reçus ce jeudi 2 mai par le directeur de cabinet du préfet et la direction départementale de l'Emploi, du Travail et des Solidarités (DDETS). Ils demandent l'augmentation du nombre de places d'hébergement d'urgence, et la pérennisation des dispositifs comme celui de la Croix-Rompue. "Notre crainte, c'est que comme à l'été dernier, il y ait un grand nombre de familles qui se retrouvent dans la rue, parce que malgré le travail et l'action évidente de la préfecture et de la DDETS, le nombre de places reste notoirement insuffisant. Il faudrait l'augmenter notablement, mais la réduction des crédits de l'état fait que localement, les acteurs nous disent que pour pouvoir libérer des places, il faut dégager des frais autre part", détaille Didier Cottrelle.

Une nouveauté a tout de même un peu rassuré les bénévoles : désormais, les femmes ayant un enfant de trois ans ou moins seront prises en charge par le conseil départemental. "Auparavant, c'était seulement si le plus âgé des enfants avait moins de trois ans que l'hébergement était prévu par le conseil départemental, précise Didier Cottrelle. Ce que nous dit la préfecture, c'est que les 11 cas de la Croix-Rompue, cinq femmes sont concernées par cette mesure. Reste donc les six autres, qui vont dépendre des appels réguliers au 115."

Inquiétude autour de la sécurité des mères isolées

Sybille Luperce, bénévole également au RESF, note que "le dialogue avec la préfecture a été rétabli, mais on nous a quand même dit que forcément, zéro personne à la rue, on ne pourrait pas s'en assurer. Il n'y a pas les moyens de mettre tout le monde à l'abri de façon constante." Des solutions d'accueil de jour existent par ailleurs pour ces familles, notamment par l'association Agena pour les mères seules.

Comment un enfant peut-il suivre une scolarité normale, quand il a cette incertitude sur l'hébergement ?

Sybille Luperce, bénévole au RESF de la Somme

Mais Sybille Luperce pointe du doigt les risques encourus par les femmes qui n'ont pas de solution pour la nuit. "Passer la soirée à la gare dans l'attente d'un dernier appel à 22 heures, qui débouchera ou non sur une prise en charge, c'est l'angoisse et ça nous préoccupe pour leur sécurité. Ça nous préoccupe aussi pour la scolarité des enfants : comment un enfant peut-il suivre une scolarité normale, quand il a cette incertitude sur l'hébergement ?"

Elle demande par ailleurs le rétablissement des "permanences mensuelles", supprimées il y a plusieurs années. "C'étaient des réunions avec le service des étrangers, où l'on pouvait présenter des dossiers de personnes qui étaient dans l'impasse, et essayer de trouver des solutions pour des situations individuelles", explique-t-elle.

Après le constat fait à la gare jeudi soir, RESF 80 a décidé d'adresser un courrier au directeur de cabinet de la préfecture et aux services de la DDETS. 

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