Covid-19 - La galère des couples binationaux : "On a été obligés de se retrouver en Serbie pour se voir quelques jours"

Les mesures sanitaires prises lors de la crise du Covid-19 ont de lourdes conséquences pour les couples binationaux non mariés, notamment lorsque l'un des partenaires vit dans l'espace européen. Beaucoup ne se sont pas vus depuis le début du confinement. C'est le cas de Sébastien* et de Zeynep*.

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"C'est vrai qu'on n'a pas choisi la facilité ! On a commencé à se voir quelques semaines avant le confinement. Mais on ne pouvait pas prévoir !!". Au téléphone, on entend bien que Sébastien* en rit mais que le coeur n'y est pas vraiment. A 38 ans, il vit une histoire d'amour avec Zeynep*, une jolie Turque de 33 ans. Elle est infirmière à l'hôpital public en Turquie, lui travaille dans l'audiovisuel en France et vit en Picardie. "On avait décidé de se voir à peu près une fois par mois", explique Sébastien*. Mais c'était sans compter la crise du coronavirus, le confinement, la fermeture des frontières et les mesures sanitaires.

Une semaine en 7 mois


Et la fin du confinement n'a pas arrangé leur situation. Plus de 4 mois sans se voir. La dernière fois que Sébastien* a pu retrouver Zeynep*, c'était en juillet dernier. Mais tout ne s'est pas passé comme prévu : "J'avais un visa de tourisme pour aller en Turquie. Mais quand je suis arrivé devant la police aux frontières, je me suis fait refouler. On m'a dit que je pouvais entrer en Turquie mais pas sortir de l'Union Européenne !!! explique-t-il. Je me suis retrouvé à l'aéroport de Bruxelles. Donc, on a décidé de se retrouver en Serbie. Zeynep a pu sortir de Turquie facilement. Le problème apparemment, c'est pour entrer dans l'Union Européenne. Elle ne peut pas venir en France. En 7 mois, on a passé une petite semaine ensemble".

Un collectif et 2000 couples en France


Un problème qui concerne des milliers de couples binationaux mariés ou non en France. Au point qu'un collectif, "Love is not tourism", a vu le jour en juin pour recenser tous les cas de couples binationaux en galère et les aider dans leurs démarches. Il regroupe près de 2000 couples. "Notre but, c'est de retrouver nos compagnes et nos compagnons qui sont à l'étranger et qui ne sont pas rentrés. Beaucoup sont ensemble depuis des années. Certains ont des enfants ensemble. Ce n'est pas de l'immigration, s'agace Nicolas Perret, l'administrateur du groupe. A cause du Covid, les frontières ont été fermées. Je n'ai pas vu ma compagne qui est russe depuis le 15 janvier. Avant le Covid, elle venait avec un visa de tourisme. Mais ils ne sont plus délivrés par beaucoup de pays".

Un laisser-passer plutôt qu'un visa


Le gouvernement, en la personne du secrétaire d'Etat au Tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne, s'est penché sur la question et tente de trouver des solutions. Mais ce qui est pour le moment mis en place n'est pas satisfaisant pour Nicolas Perret : "Au début, le gouvernement français a rouvert le visa famille aux couples mariés et pacsés. On nous a proposés d'avoir un visa famille mais ce n'est pas ce qu'on veut ! On veut garder nos visas tourisme ! Actuellement, la solution, c'est de donner des laisser-passer aux conjoints étrangers pour qu'ils puissent venir en France. On doit en fait monter un dossier très personnel avec des critères assez particuliers. Ce dossier va au consulat français dans le pays de notre conjoint. Il passe devant une sorte de "commission" qui dépend du ministère de l'Intérieur et qui décide ou non de nous délivrer un visa. Parmi les critères, il faut être en couple avant le 1er septembre 2019 pour être considéré comme un couple. Il faut aussi qu'on se soit rencontrés au moins une fois sur le territoire français. On a l'exemple : lui est Français, elle est Américaine. Ils sont en couple depuis 10 ans mais elle a changé son passeport parce qu'il était vieux et donc elle n'a plus les tampons des visas précédents et donc, ils ne sont pas considérés comme un couple."

Prouver la relation


Des situations qui se répètent partout dans le monde : 
 
Un dossier tellement "ubuesque" à réunir que Sébastien* et Zeynep* n'ont pas souhaité entamer les démarches : "On ne l'a pas demandé vu les pièces justificatives nécessaires pour faire le dossier. Il faut par exemple un contrat de bail en commun. Or par définition, un couple binational vit dans deux pays différents. On doit prouver qu'on a un compte joint. Mais à quoi ça sert quand on vit dans deux pays différents ? Et tous les couples, même mariés, n'ont pas forcément de compte joint."

"Tenter le coup"


Autre possibilité pour les conjoints étrangers de rentrer en France : demander un visa long séjour. "Mais c'est tellement compliqué avec le consulat de France en Turquie ! On a l'impression que plus personne ne sait comment il faut faire et ce qu'il faut faire", se désole Sébastien*.

Tous réclament une procédure simple pour obtenir à nouveau des visas de tourisme : "On demande juste de faire une déclaration sur l'honneur pour avoir notre visa de tourisme, répète Nicolas Perret. Et le gouvernement, lui, nous demande de prouver qu'on est amoureux."

Sébastien*, lui, n'a pas l'intention d'attendre que les choses se débloquent. Dans quelques jours, il va à nouveau essayer d'aller en Turquie retrouver Zeynep* : "Je vais tenter le coup et je vais voir si je peux passer. Mais je ne suis pas sûr à 100% de pouvoir y entrer même si le pays est ouvert. Psychologiquement, c'est difficile pour Zeynep*. Depuis avril, elle travaille dans un service Covid. Elle commence à fatiguer sérieusement". 

*Les prénoms ont été modifiés

 
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