Metex Noovistago (anciennement Ajinomoto), le site de fabrication d'acides aminés pour la nutrition animale qui emploie plus de 300 personnes à Amiens nord, pourrait être bientôt placée en redressement judiciaire. Le groupe Metex fait face à des difficultés financières en raison, notamment, de l'envol du prix du sucre.
Le groupe Metex a annoncé ce mardi 12 mars avoir demandé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire pour ses filiales, dont Metex Noovistago, l'usine d'Amiens nord qui emploie 280 personnes. Les syndicats, puis les salariés, ont été informés ce jour de cette décision.
L'annonce s'inscrit dans un contexte déjà difficile. Depuis le début de l'année 2024, l'entreprise avait déjà recours à l'activité partielle pour faire face à ses difficultés financières. "La trésorerie brute consolidée s'élevait à 18,3 millions d'euros au 31 décembre 2023, contre 47,9 millions d'euros à la fin juin 2023", précise Metex dans un communiqué. Le groupe parle d'un "environnement économique hostile", évoquant un double problème : la hausse du coût des matières premières et la concurrence chinoise.
Le prix du sucre et la concurrence chinoise
Pour bien comprendre, il faut savoir que Metex est la seule entreprise en Europe à fabriquer de la lysine, un acide aminé à destination de la nutrition animale. Mais cette activité nécessite une très grande quantité de sucre, une matière dont le prix s'est envolé dernièrement, engendrant "une très forte hausse des coûts de production". Actuellement, les dépenses du groupe pour le sucre s'élèvent à 25 millions d'euros par an. Ses dirigeants sollicitent l'aide du gouvernement pour trouver des solutions pour faire baisser la facture, et le conseil d'administration espère que les procédures judiciaires permettront "de poursuivre les discussions avec les pouvoirs publics visant à restaurer les conditions d'accès au sucre à un prix compétitif."
L'autre obstacle que décrit le groupe est le "dumping permanent pratiqué par les producteurs chinois de lysine". Les coûts de production moins élevés, couplés à l'absence de taxes douanières, permettrait à leurs concurrents chinois de proposer des prix beaucoup plus attractifs, avec lesquels Metex ne peut pas rivaliser. Une question qui relève, cette fois, de la législation européenne.
Des députés en appellent au gouvernement
Ces problématiques avaient déjà été évoquées par le député (Picardie debout) d'Amiens nord François Ruffin, lors d'une grève dans l'entreprise en avril 2023, puis dans une question au gouvernement en 2023.
Mais, en toile de fond : un dumping venu de Chine. 85% de la lysine vient de là-bas. Son coût de revient est deux fois moins élevé. Mais avec une empreinte cinq fois plus forte.
— François Ruffin (@Francois_Ruffin) April 8, 2023
Ré-industrialiser, c'est se protéger. Protéger la planète. Protéger les salariés. pic.twitter.com/qSeGoPRHgU
"En Europe, le prix du sucre d'abord divisé par deux, a ensuite été multiplié par quatre, assurait-il. L'écart avec le prix mondial ne cesse de s'accroître, à mesure que la Chine subventionne sa production, et que nous, nous la laissons entrer. (...) Nous ne pouvons plus laisser les entreprises françaises comme Metex lutter à armes inégales avec leurs concurrentes chinoises." De l'autre côté de l'échiquier politique, le député (RN) du sud de la Somme, Jean-Philippe Tanguy, assure quant à lui avoir au mois de janvier "saisi le ministre de l'Économie Bruno Le Maire, afin que le gouvernement agisse en urgence pour soutenir cette entreprise industrielle d'avenir".
Le groupe est déterminé à surmonter cette période transitoire grâce à la qualité de ses actifs, de ses compétences uniques ainsi que des technologies dont il dispose.
Metex
Les deux élus soulignent par ailleurs que les méthodes de production de Metex sont meilleures pour leur environnement que celle des concurrents chinois. L'entreprise française fabrique la lysine avec du sucre de betteraves produit localement, là où la Chine utilise, d'après François Ruffin, du maïs générant "cinq fois plus de CO2". Pour Jean-Philippe Tanguy, "l'État et la région doivent accompagner l'entreprise dans son projet de production décarbonée afin de renforcer son modèle économique vertueux".
S'il est trop tôt pour parler des conséquences de ces procédures sur l'avenir du groupe et de ses filiales, le groupe Metex assure dans son communiqué être "déterminé à surmonter cette période transitoire grâce à la qualité de ses actifs, de ses compétences uniques ainsi que des technologies dont il dispose".