Le portrait de la semaine : Maxime Patte, prof d'histoire, YouTubeur, chroniqueur et amoureux de la Picardie

Maxime Patte, c’est le professeur d’histoire-géographie qu’on rêve tous d’avoir. Un enseignant passionné et passionnant qui donne le goût d'apprendre. En cours au lycée, mais aussi grâce à ses web-documentaires ou lors de chroniques historiques à la radio.

Un amoureux 2.0 de la région Picardie qui fait la fierté de ses élèves ainsi que de leurs parents. C’est une histoire de passion et d’envie de transmettre qu’on vous raconte dans ce portrait de la semaine. Tout commence au début des années 2000 dans le Vimeu...

"Je suis un pur produit picard !"

"Je suis originaire de Friaucourt sur le littoral picard. J’ai toujours beaucoup travaillé. Au collège et au lycée, je n’avais aucune facilité, mais je voulais m’accrocher. Alors pour persévérer, pas de secret : il fallait bosser."

Sa passion pour l’Histoire, Maxime la tient de son professeur Jean-Marc Ricouard. C’est en suivant ses cours au lycée de Friville-Escarbotin dans la Somme que Maxime a la révélation : "Ce prof savait nous emporter, nous rendre curieux. Il a totalement changé mon regard sur ce qui m’entourait. À l’époque, j’étais comme tous les gamins, le Vimeu, pour moi, c’était une région ennuyeuse où il ne se passait jamais rien. Alors qu’en fait..."

Les cours de Monsieur Ricouard changent complètement la donne. Maxime apprend à s’intéresser, à observer. Il découvre alors sa région sous un autre angle, avec son passé industriel glorieux, ses savoir-faire uniques dans la serrurerie et la robinetterie. Pour bien appréhender le présent, il faut en connaître le passé. Et pour se plonger dans le passé, il faut savoir être curieux. C'est ce que Maxime retient.

Je suis quelqu'un de très passionné, et c'est ce qui plaît à mes élèves.

Alors, c'est décidé, Maxime lui aussi sera prof, animé par cette envie de fournir les bonnes "clés" (quoi de plus normal quand on vient du Vimeu...) pour mieux comprendre l'Histoire. Direction l'Université Picardie Jules Verne (UPJV) à Amiens, où il obtient licence et master, et passe le concours d'enseignant en 2013, à 22 ans.

Après une première année au lycée Henri Martin de Saint-Quentin dans l'Aisne, Maxime cible le sud de l'Oise pour la suite de sa carrière : le lycée Jean Rostand de Chantilly, celui de Jules Uhry à Creil et enfin le lycée Marie Curie de Nogent-sur-Oise où il travaille depuis presque quatre ans et enseigne aux trois niveaux : seconde, première et terminale.

"C'est un lycée de l'Oise réputé dans les matières scientifiques. On a pas mal de bons élèves qui viennent ici suivre la filière S. Et je m'y plais beaucoup."

En parallèle, Maxime fait également des interventions au fil de l'année scolaire à Amiens auprès des étudiants de l'UPJV. Mais, pour le professeur, l'histoire ne s'arrête pas là, bien au contraire. Elle prend une nouvelle tournure. Car au-delà des cours de monsieur Ricouard, Maxime a retenu une autre leçon : savoir capter l'attention des élèves.

"Je suis quelqu'un de très passionné, et c'est ce qui plaît à mes élèves. Mais j'avais besoin de voir plus loin. J'étais à la recherche d'un moyen de "dépoussiérer la classe", de changer un peu l'image du prof."

Les outils numériques d'aujourd'hui au service du passé

Passionné depuis toujours par les médias, Maxime se penche alors sur les moyens de communication qui s'offrent à lui. Son objectif : trouver une utilisation sensée et intelligente d'Internet et offrir "un bonus" à ses élèves, qui viendrait approfondir les cours en classe.

Maxime se décide alors à sortir de sa zone de confort. Il est désormais possible d'acheter du matériel de tournage abordable et de bonne qualité à l'instar des logiciels de montage. Pas question pour Maxime d'élaborer un sous-produit qui se noiera dans la masse des vidéos disponibles sur les réseaux.

Il faut faire les choses dans les règles de l'art. Équipe réduite, mais équipe quand même ! Maxime s'entoure d'amis et d'anciens élèves, tous prêts à jouer le jeu et chacun à son poste : cadreur, preneur de son, scripte et monteur. Les tournages sont pensés sur plusieurs jours. Maxime se transforme en réalisateur et en présentateur.

"Lors de l'écriture de chaque épisode, je pense très vite au découpage, au story-board. Je fais les demandes d'autorisation, j'organise chaque séquence en pensant au temps que cela nécessitera afin de ne perdre aucune minute lors du tournage. Il ne faut pas oublier que tout ce travail est bénévole. C'est passionnant, mais nous faisons ça pendant nos loisirs. Il faut aussi jongler avec les emplois du temps de chacun."

Il crée alors la chaîne YouTube Un Temps d'Avance et un premier web-documentaire sort entre les galets de Mers-les-Bains, sa région d'enfance, consacré aux bains d'eau de mer. Puis un deuxième, consacré à la révolution industrielle dans le Vimeu, puis un troisième... Voilà Maxime devenu YouTubeur.

"C'est vraiment une expérience collective très enrichissante. Autant j'aime parfois travailler seul, autant chaque tournage est un moment de partage incroyable, où chacun apporte sa pierre à l'édifice !"

L'essai est rapidement transformé. Les vidéos sont plébiscitées par les élèves qui en redemandent. Une de ces vidéos sur la révolution industrielle semble même avoir trouvé son public au-delà du Vimeu où elle a été tournée, dépassant les 100 000 vues.

Louis-Philippe 1er, la Première Guerre mondiale, le familistère de Guise, le château de Chantilly... Et le dernier en date : Amiens aux époques antique et médiévale mis en ligne en mars 2021. Maxime et son équipe sillonnent la région et traversent l'Histoire. "On a commencé il y a presque cinq ans et il a fallu accélérer la cadence. On est passés d'un tournage par an à trois ou quatre !"

Fier de la Picardie

Il faut être assez rapide (la durée de chaque épisode varie entre 10 et 20 minutes), le contenu doit être pertinent, venant compléter les leçons du lycée mais en restant accessible à tous les internautes. Maxime conçoit ses vidéos à partir du passé régional picard pour comprendre l'histoire nationale. Ou comment expliquer l'influence de la Picardie sur l'histoire de tout un pays.

"L'objectif est aussi de faire connaître et mettre à l'honneur le patrimoine régional. J'ai envie que les gens se réapproprient cette région." Un travail qui s'apparente à celui de tout bon journaliste régional au quotidien, qui tente de vulgariser un propos, un fait, pour le rendre accessible et compris du plus grand nombre.

Le retour des élèves ne se fait jamais attendre à la sortie de chaque numéro. Certains ont même bénéficié d'une avant-première au cinéma de Chantilly et ont fait salle comble.

Même les parents viennent me donner leur avis lors des réunions parents-professeurs !

Pour Maxime, le résultat est là. "Il y avait tout-de-même une grande prise de risques. Si ça ratait, je pouvais passer pour un has-been auprès des élèves !" Il savoure une expérience ô combien positive, à mi-chemin entre son rôle de professeur et celui de guide à travers la région. Un voyage scolaire virtuel et temporel.

"Les lycéens viennent m'en parler après les cours. C'est un autre moyen de créer du lien avec eux, d'échanger, de partager ! De transmettre, en fait ! Même les parents viennent me donner leur avis lors des réunions parents-professeurs ! "Hier soir, Monsieur Patte, on a parlé de vous et de votre émission pendant tout le repas !" lui disent-ils.

Des parents qui remercient l'enseignant et qui sentent leurs enfants plus curieux, motivés et intéressés. Pari de la transmission réussi.

Une notoriété grandissante

Au travers de ces web-documentaires, Maxime a su gagner le cœur de ses élèves. "Il ne faut pas oublier que je ne leur impose rien. Ça reste du volontariat de voir mes vidéos. À eux de faire la démarche ou non le soir à la maison."

Idem pour certains professeurs des autres matières de son lycée, qui ont aussi vu un intérêt pédagogique dans ses vidéos, pouvant enrichir leurs cours.

Et ce n'est jamais anodin de mettre en ligne des vidéos, surtout quand elles sont de qualité. D'autres médias ont rapidement remarqué les prestations de Maxime. Dans la région, tout d'abord, radio et télé ont vu un moyen de faire redécouvrir les environs. C'est le cas pour l'association beauvaisienne Archipop qui travaille avec Maxime lors de la réalisation de documentaires régionaux.

Maxime est aussi depuis quelques années chroniqueur pour France Bleu Picardie où il anime des programmes sur le patrimoine local. Et les projets avec la radio ne manquent pas : Maxime élabore actuellement huit émissions estivales d'une heure chacune sur certains aspects de l'Histoire : les vacances, l'école...

Une porte d'entrée vers l'antenne nationale. Maxime intervient régulièrement le dimanche matin dans les studios parisiens de la radio où il part à la découverte des monuments de la capitale. Il n'est pas rare non plus d'apercevoir Maxime sur France 3 Picardie en fonction de l'actualité et des événements. Il a également été sollicité par BFM TV pour commenter l'enterrement du professeur Samuel Paty.

Et comme Internet ne s'arrête pas aux frontières françaises, Maxime a aussi été remarqué à Berlin en Allemagne ainsi qu'à l'université du Luxembourg, où on l'invite à faire des conférences sur la place des historiens dans les médias. Des projets évidemment à l'arrêt pour le moment à cause de la crise sanitaire...

Il a aussi été félicité pour son travail par Thomas Cauvin, le président de la Fédération internationale pour l'histoire publique. "Je viens d'un milieu très modeste, j'accède à des choses auxquelles je n'aurais jamais imaginées. Comme quoi, tout est possible !"

Cependant, malgré toutes ces marques de reconnaissance, il n'a jamais été question pour Maxime de choisir entre sa fonction de professeur et son rôle d'historien dans les médias. C'est même dans la complémentarité entre ses deux aspects de sa vie qu'il trouve un certain équilibre.

C'est très important pour moi de rester enseignant. D'abord parce que c'est très rajeunissant d'être au contact des élèves. Ensuite, parce que j'ai besoin d'être toujours à leur niveau pour élaborer les documentaires, pour ne jamais oublier leurs points de vue. Cela permet de ne jamais être déconnecté, de toujours anticiper leurs interrogations.

Maxime rappelle aussi ô combien il se sent toujours aussi motivé à l'idée de se rendre au lycée en cours chaque matin. "Internet, la télé, c'est du plus pour moi, une expérience supplémentaire, mais je suis loin d'en vivre. De plus, quelle légitimité aurais-je dans mes web-docs si je n'étais plus prof d'histoire ?"

Et des idées, des projets, Maxime n'en manque pas. S'il songe déjà au sujet du huitième numéro d'Un Temps d'Avance, il a déjà mis en route une nouvelle série : Témoin d'un temps, au cours de laquelle il interviewe les personnalités de la région.

Il compte aussi sur ses élèves pour impulser de nouvelles idées : "En ce moment, ils me demandent des petits sujets sur l'actualité, des sortes de capsules de trois minutes pour résumer certains faits historiques. Par exemple, les Ouïghours et la répression chinoise. Alors, pourquoi pas ! On va essayer et voir ce que ça donne."

Toujours "Un temps d'avance" !

À tout juste 30 ans, il y a de quoi être admiratif du parcours de Maxime. Un Picard qui aime à le rappeler et un autodidacte de l'audiovisuel. Même s'il a bougé d'un département à l'autre, il a grandi ici, aime sa région, compte y vivre encore longtemps et ne se lasse pas de la redécouvrir et d'en partager les trésors. Pourtant, c'est comme si Maxime avait fait plusieurs fois le tour du monde.

Jeune papa d'un petit garçon de deux ans, reste une énigme à résoudre : où Maxime trouve-t-il le temps de faire tout ça ? "Depuis l'école, j'ai toujours appris à beaucoup travailler, à être très organisé. Et quoi de plus motivant qu'un métier et une passion qui plaisent ? J'ai la chance d'avoir un proviseur qui apprécie ce que je fais et me soutient. Alors oui, ça prend du temps, mais ce temps, je le prends. Et vous savez quoi ? Il m'en reste même encore assez pour vivre pleinement ma vie familiale !"

En fait, Maxime Patte ressemble à une sorte d'Indiana Jones des temps modernes. De quoi donner un bon coup de fouet à l'image du prof. Un parfait mélange entre la théorie et la pratique, pourvu d'un enthousiasme débordant tout en gardant les pieds bien sur terre. Ce qui n'empêche pas de rêver !

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