Aux championnats de France UNSS d'haltérophilie, la belle histoire de ces collégiens de la Somme

Fin mars 2023, des élèves de l'option sport santé du collège d'Ailly-sur-Somme ont participé aux championnats de France UNSS d'haltérophilie, ramenant un trophée et des médailles. Une folle aventure pour ces jeunes éloignés de l'activité sportive il y a encore six mois.

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Tout est parti de l'idée d'un professeur d'EPS du collège d'Ailly-sur-Somme. Thomas Cuisset a décidé de mettre en place une option "sport santé" pour les élèves dispensés ou en difficulté avec l'activité physique. Parmi les activités proposées, des exercices d'haltérophilie qui en ont motivé certains à le pratiquer en UNSS, la première fédération française du sport scolaire du second degré.

Après six mois de pratique, les élèves ont participé aux championnats de France UNSS par équipe organisés à Berck-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais. Solène Magnier, élève de quatrième dans ce collège du Val-de-Somme a été la première élève en fauteuil roulant à jamais y concourir. Nous les avons suivis de l'entraînement à la compétition. 

Haltérophilie handisport 

Arraché, épaulé jeté… Ces gestes d'haltérophilie n'ont plus de secret pour Solène. L'adolescente, qui n'avait jamais pu pratiquer de sport auparavant, s'apprête à participer aux championnats de France UNSS par équipe. Une première pour cette collégienne atteinte du syndrome de Little, qui l'empêche notamment d'utiliser pleinement le bas de son corps.

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Solène Magnier pendant une séance d'entraînement adaptée. ©Antoine Roynier / France Télévisions

"Ça m'a beaucoup aidée personnellement dans mon handicap, avec mes déplacements. Même dans les gestes du quotidien parce que, forcément, l'haltérophilie augmente la force. Donc j'ai plus de tonicité pour mes mouvements au quotidien", remarque la jeune fille.    

En haltérophilie handisport, la compétition se limite au développé coucher. Des gestes différents de ceux des valides. Alors son professeur a trouvé une parade. Il a installé des pads pour rehausser les plans de la barre. Il a aussi fallu "trouver la manière de parer, de mettre ses mains sur les côtés, pour que ce ne soit pas plus facile, mais pour que ce soit juste une sécurité", explique Thomas Cuisset.

Booster la confiance en soi

Comme Solène, Eva a de la corne aux mains depuis six mois. Elle n'avait jamais réussi à trouver LE sport qui lui convenait. Aujourd'hui, elle a fait de ce corps qui la complexe, un atout. "Je complexe toujours un peu, mais ça va beaucoup mieux. Je n'avais pas du tout confiance en moi et depuis que je fais de l'haltéro, ça va beaucoup mieux", se réjouit Eva Dobel, en quatrième au collège d'Ailly-sur-Somme.

Championne de Picardie, recordwoman de la Somme dans sa catégorie, Eva progresse vite. Et ses résultats sportifs ont des répercussions positives sur sa vie quotidienne. "Ça lui a donné de la gagne et de la motivation pour l'école. Elle travaille mieux au collège, elle s'épanouit, elle grandit, elle devient une vraie jeune fille", observe avec fierté Claire Laski, la maman d'Eva.

L'adolescente l'a remarqué également. "Avant, j'étais celle tout au fond de la classe, qui ne parlait à personne ou qu'à des potes. Je ne participais pas du tout, maintenant, je participe un peu plus", appuie-t-elle.  

"Un vrai soutien physique dans un petit cocon"

C'est grâce à leur professeur d'EPS qu'Eva et Solène se sont découvert cet intérêt pour l'haltérophilie. En créant cette option sport santé en 2018, Thomas Cuisset a créé des séances adaptées à chaque pathologie, chaque niveau, comme des cours de soutien. "Ça me fait du bien parce que je ne peux pas faire du sport comme je veux, avec les difficultés que j'ai", explique Marion Delanchy, élève en quatrième. "Il nous encourage dans ce qu'on fait, il ne nous met jamais de côté. C'est grâce à lui si j'en suis là", souligne Jérôme Belpaume, également en quatrième. 

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Thomas Cuisset, professeur d'EPS au collège d'Ailly-sur-Somme revient sur 5 années d'option "sport santé". ©Antoine Roynier / France Télévisions

"Pendant mes cours d'EPS, je me rendais compte que je n'arrivais pas à nourrir tout le monde, à la fois les très bons en EPS, le ventre mou et puis ces élèves un peu sur le côté qui étaient en grande difficulté", détaille Thomas Cuisset. "Je me suis dit qu'il fallait qu'on arrive à leur proposer quelque chose à part, rien que pour eux, un vrai soutien physique dans un petit cocon avec des activités ciblées, une ambiance un peu protégée, où il n'y a pas le regard de l'autre. Ils ont tous comme ils disent 'leurs petits problèmes', et vu qu'il n'y a pas le regard de l'autre, ils se lâchent."   

"Je suis très fier de vous avoir emmenés jusqu'ici"

Fin mars 2023, nous retrouvons Thomas et ses élèves à Berck-sur-Mer, dans le Pas-de-Calais, où sont organisés les championnats de France UNSS d'haltérophilie. Ils se sont lancés un défi de poids : remporter une médaille. Eva concourt dans l'équipe fille, Solène dans l'équipe sport partagé qui mêle athlète valide et handisport. C'est la première fois que cette catégorie est proposée en haltérophilie.

Vous allez vivre des trucs vraiment intenses et on compte sur vous pour tout donner. Maintenant, prenez plaisir, ça reste que du sport.

Thomas Cuisset, professeur d'EPS au collège d'Ailly-sur-Somme

À quelques heures de la compétition, Eva, Solène et les autres élèves se rendent sur le bord de mer pour un réveil musculaire. Sur la plage, Thomas Cuisset motive ses troupes. "Vous allez vivre des trucs vraiment intenses et on compte sur vous pour tout donner. Maintenant, prenez plaisir, ça reste que du sport. En tout cas, je suis très fier de vous avoir emmenés jusqu'ici", se réjouit le professeur.   

Un titre de champion de France en sport partagé

L'équipe de sport partagé est la première à entrer en piste. Solène inaugure le bal. Elle a trois tentatives. La première barre est assurée, ça coince en revanche sur la troisième, ses mains glissent. Solène tente son record. L'équipe remporte le titre de championne de France en sport partagé, la première de l'histoire !

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Solène lors des championnats de France UNSS d'haltérophilie. ©Antoine Roynier / France Télévisions

"Je suis très contente parce qu'on savait qu'on pouvait réussir et la preuve, on a réussi. On a tous atteint nos objectifs. Il y a eu des essais, mais au final, on a réussi à monter sur le podium et c'est tout ce qui compte", lance Solène. 

Une médaille d'argent

Du côté de l'équipe fille, la dynamique est bonne. Eva se concentre. "Pour l'instant, elle a encore besoin d'être rassurée, elle n'a que six mois d'haltérophile. Il ne faut pas oublier qu'elle n'a que 13 ans donc c'est encore 'un bébé'', estime Maxime Belguise, entraîneur d'haltérophilie. L'adolescente réalise son record au dernier essai.

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Eva lors des championnats de France UNSS d'haltérophilie. ©Antoine Roynier / France Télévisions

Eva tente ensuite de battre son record sur la dernière barre à 62 kg. Malgré les encouragements de ses amis et coaches, ça ne passe pas. Ce sera tout de même une médaille d'argent pour l'équipe. Eva est en larmes. Mais ses amis sont là pour la rassurer : "on est trop fières de toi", "t'es la championne" l'encouragent-elles, en la serrant dans leurs bras. "Dans tous les cas, même si je faisais ma barre, on aurait terminé deuxième. En vrai, on a fait un beau match", concède la collégienne. 

"Le sport, école de vie"

Grâces à leurs efforts, les collégiens d'Ailly-sur-Somme ont réussi à goûter à leur premier podium national. Thomas Cuisset est fier. "L'histoire a commencé il y a seulement quelques mois", rappelle-t-il. Il sort de ces championnats avec le sentiment "d'avoir réussi, de les avoir amenés jusqu'au bout". Il se souviendra aussi du "plaisir dans les yeux de quelques parents" présents à la compétition. 

"Ce sont des gamins qui ne sont pas forcément en réussite scolaire comme on l'entend et qui ont brillé, parfois malgré leurs différences ou leurs difficultés. Le sport, école de vie. Là, ils ont vu ce que c'était, avec des émotions dingues." Cette expérience unique dans l'histoire du sport aura permis à ces jeunes de construire la leur.

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