L'histoire du dimanche - D'Abbeville à la cour du roi, Rose Bertin l'influenceuse mode du XVIIIe siècle

Issue d'une famille modeste d'Abbeville, Rose Bertin est devenue en quelques années une créatrice reconnue. Modiste attitrée de Marie-Antoinette, son influence est telle qu'elle obtient même le titre de "ministre des modes" à la cour de Versailles.

"Le règne de Marie-Antoinette fut celui des futilités et du chiffon, et, si elle ne créa point un ministère de la toilette, il y eut, à la cour de Versailles, des coiffeurs, des couturiers et des faiseuses de modes plus écoutés que des conseillers du roi.", décrit Emile Langlade dans son ouvrage "La Marchande des Modes de Marie-Antoinette" publié en 1911. 

De celles et ceux qui ont le plus d'influence, on peut aisément citer Marie-Jeanne dite Rose Bertin, une roturière née à Abbeville le 2 juillet 1747 près de l'église Saint-Gilles. Ses parents ne travaillent pas dans le textile. Son père Nicolas Bertin est cavalier de la maréchaussée, sa mère Marie-Margueritte Méquignon garde-malade. Pourtant très tôt, la jeune fille se passionne pour la confection. À l'âge de 16 ans elle quitte Abbeville pour Paris. Son destin va alors basculer.
 

"C'était un peu la Karl Lagerfeld de l'époque"

"Elle sera embauchée au Trait galant, précise Éric Berriahi, responsable du service archives et bibliothèque patrimoniale de la mairie d'Abbeville, c'était un établissement qui fournissait les grands de ce monde, les princes, les comtes, les comtesses." C'est à ce moment-là que Marie-Jeanne change de prénom pour Rose. Quelque temps après son arrivée au Trait galant, son talent ne tarda pas à être remarqué, notamment par la princesse de Conti. 
 
Alors qu'elle n'est âgée que de 23 ans, elle ouvre son propre magasin Le Grand Mogol près du Palais royal, et se fait un nom. "C'était une femme assez exceptionnelle pour l'époque, vous imaginez, 23 ans et déjà cheffe d'entreprise, il fallait avoir du caractère", confie Éric Berriahi. 
 

Au Grand Mogol, elle crée et vend ses tenues. Les nobles et les grands bourgeois viendront fréquemment chez elle. "Elle avait déjà pas mal d'influence, c'était un peu la Karl Lagerfeld de l'époque", sourit le responsable des archives à la mairie d'Abbeville. Parmi ses clients prestigieux, Louise Marie Adélaïde de Bourbon, duchesse de Chartres. C'est elle qui va la présenter à la reine Marie-Antoinette. 

Sa spécialité : les grandes coiffures

Très vite le courant passe entre les deux femmes. "Elle va jouir des faveurs de la reine, indique Éric Berriahi. Et une fois qu'on habille la reine, on est considéré comme celle qui va donner le ton de la mode." Rose Bertin nommée "ministre des modes" imposera son style à la cour. "Ce n'est pas qu'une simple couturière, c'est une véritable créatrice", poursuit le responsable du service archives de la mairie d'Abbeville. 

La spécialité de Rose Bertin, c'était avant tout les grandes coiffures. Elle créa notamment le "Quès aco" : une coiffure "composée de trois panaches, plantés derrière le chignon" décrit le biographe Emile Langlade. Mais aussi le "hérisson". "Les cheveux se portaient alors relevés sur le front avec le secours d'épingles immenses ; ils étaient frisés à la pointe, et, par derrière, formaient plusieurs rangées de boucles énormes." détaille-t-il.
 

Une robe conservée à Bellancourt

Après la Révolution, Rose Bertin ne rencontra plus le même succès qu'auparavant. Accusée d'entretenir les dépenses somptueuses de Marie-Antoinette, principal reproche du peuple adressé à la reine, elle s’exile à Londres. "Elle détruira au passage ses livres de comptes, pour ne pas qu'on trouve les dépenses des clients", souligne Éric Berriahi. Rose Bertin ne revient en France qu’en 1795 où elle reprendra possession de ses biens, son atelier et sa maison à Epinay-sur-Seine. Elle mourra dans cette commune de Seine-Saint-Denis en septembre 1813. 

"Je ne peux pas vous dire si elle est revenue un jour en Picardie", confesse Éric Berriahi. Malgré tout, Rose Bertin semble avoir eu toujours un attachement particulier pour sa région. "Marie-Antoinette, ne parvenant pas à avoir d'enfants, Rose Bertin, lui conseilla d'effectuer un pèlerinage à la chapelle Notre-Dame de Monflières à Bellancourt. En remerciement, la reine fit don d'une robe cousue de fil d'or confectionnée par Rose Bertin", raconte-t-il.
 
 
C'est dans cette petite commune de la Somme, qu'est conservée encore aujourd'hui cette robe. Ainsi le souvenir de celle qui a marqué l'histoire de la mode restera pour toujours, sur ses terres, en Picardie. 
 
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