Loi immigration. "Pour" ou "contre", deux députées Renaissance justifient leur vote

L'une a voté contre, l'autre pour. Ingrid Dordain et Violette Spillebout, deux députées du groupe Renaissance dans les Hauts-de-France, expliquent ce qui a motivé leur vote concernant la loi immigration, rédigée mardi 19 décembre par la commission mixte paritaire, puis adoptée par le Parlement dans la foulée.

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Le projet de loi sur l'immigration a été adopté mardi 19 décembre en fin de soirée par le Parlement. Une version du texte durcie, issue de la commission mixte paritaire (CMP), et proche de celui adopté en première lecture par le Sénat mi-novembre.

Les 14 députés et sénateurs de la CMP ont trouvé un compromis quelques heures seulement avant le vote, grâce à un accord scellé entre le camp présidentiel et la droite. La Première ministre, Elisabeth Borne, a reconnu mercredi matin sur France Inter que des mesures du texte sont contraires à la Constitution.

Dans les Hauts-de-France, Ingrid Dordain, députée Renaissance de la 2e circonscription de la Somme, fait partie des 20 députés du groupe majoritaire à avoir voté contre le projet de loi immigration. Violette Spillebout, députée Renaissance de la 9e circonscription du Nord, a voté pour, comme 130 autres députés de la majorité. 

Contactées par téléphone au lendemain du vote, les deux députées ont accepté de répondre à une interview croisée. 

Expliquez-nous les raisons de votre vote sur le projet de loi immigration.

Ingrid Dordain : Le texte allait trop loin pour que je puisse y apporter un vote favorable. J'étais en accord avec le texte issu de la commission des lois, mais celui issu de la CMP (la commission mixte paritaire) ne montrait plus d'équilibre entre le volet fermeté et le volet intégration. Ma position "contre" est apparue lorsque la ligne rouge concernant les prestations sociales, en particulier les APL, a été franchie. 

Quand on est une majorité relative, il faut savoir faire des compromis. Il faut un texte sur l'immigration avec de la fermeté pour éviter les actes terroristes par exemple. Mais la fermeté ne sert à rien si on n'a pas une bonne politique d'intégration des personnes étrangères sur notre territoire.

L'article sur les quotas n'était pas acceptable. Il est inconstitutionnel et sera remis en question. Quant au délit de séjour irrégulier, c'est lancer une chasse aux sorcières et permettre un contrôle systématique des personnes étrangères. La caution pour les étudiants étrangers et la restriction du regroupement familial me posaient clairement un problème.

L'ensemble de ce texte est sorti de manière trop précipitée. C'est une loi trop importante pour être traitée dans le cadre de la CMP alors qu'il n'y a pas eu de débat dans le cadre de l'Assemblée nationale. On ne peut pas travailler sur le sujet de l'immigration dans un comité restreint de députés et de sénateurs. C'est un sujet très sérieux. 

Violette Spillebout : En toute cohérence avec le projet de loi initial présenté par Gérald Darmanin (Ministre de l'Intérieur) et Olivier Dussopt (Ministre du Travail), et suite à la motion de rejet qui nous a obligés à des compromis avec les Républicains, j'ai voté pour ce texte de loi parce qu'il protège les Français face aux étrangers délinquants et parce qu'il intègre mieux les étrangers qui travaillent en France.

Ce vote, avec les voix du Rassemblement national, ne remet-il pas en cause l'engagement d'Emmanuel Macron qui, lors de sa réélection en 2022, a déclaré : "Vous m'avez élu pour faire barrage à l'extrême droite. Ce vote m'oblige" ? 

Ingrid Dordain : On est face à un Rassemblement national qui a voté la motion de rejet et aujourd'hui, ils essaient de faire croire qu'ils ont toujours été en accord avec le texte. On est face à une manipulation politicienne de Marine Le Pen qui veut reprendre ce texte en son nom. 

Ça me pose un gros problème de conscience et d'éthique quand je vois les prises de parole du Rassemblement national hier. Ils ont même voté contre le texte du Sénat au début. C'est un retournement de veste, auquel le Rassemblement national nous a habitués. 

Violette Spillebout : Ce projet de loi, parce qu'il vise une action efficace pour expulser des délinquants étrangers et pour raccourcir l'analyse des dossiers de demande d'asile, est un texte qui fait barrage aux idées du RN.

Nous avons porté ce vote avec 260 "pour", sans compter les voix du RN. Nous n'avons pas eu besoin d'eux pour faire cette loi.

Près d'un quart des députés Renaissance n'a pas voté pour le projet de loi, certains ministres envisagent de démissionner. La majorité, déjà toute relative, est-elle entrée dans une crise politique majeure ? 

Ingrid Dordain : Je ne parlerais pas de "crise politique majeure", ni de désunion du groupe à cette heure. Je dirais plutôt que cette majorité montre ses avis divergents. On n'est pas toujours d'accord au sein du groupe, qui est composé de différentes sensibilités, ce qui est une richesse. 

Aujourd'hui la question de quitter le parti ne se pose pas et je reste mobilisée avec la majorité présidentielle. Nous verrons ce qui se passe par la suite. Après, je prendrai mes responsabilités en fonction. Le président de la République (qui va saisir le Conseil constitutionnel concernant la loi immigration, NDLR) va s'exprimer ce soir (dans l'émission C à Vous sur France 5), nous verrons quel est son positionnement.

Violette Spillebout : Nous sommes en majorité relative, et ce que nous ont demandé les Français à l'Assemblée Nationale est de faire des compromis avec d'autres groupes politiques. Nous le faisons avec les Républicains, cela nous a obligés à modifier notre texte initial et à accepter certains renoncements qui parfois sont difficiles pour certains d'entre nous.

Je reste très attachée à l'intégration et même si ma proposition sur la transformation automatique du visa étudiant pour les apprentis en autorisation de travail n'a pas pu être étudiée dans le débat parlementaire qui n'a pas eu lieu, je continuerai de porter cette proposition auprès du Ministère de l'Intérieur pour accompagner toutes ces personnes qui apprennent un métier en France et que les entreprises veulent embaucher.

J'estime que c'est un devoir de se saisir des sujets d'immigration qui ont trop longtemps été abandonnés par les partis politiques, et en particulier par la gauche en France. Comme pour les sujets d'ordre républicain et de laïcité, on paie aujourd'hui l'inaction dans ce domaine.

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